« Les Merveilles de l’ile Mystérieuse » Par Octave Béliard

Posté le 20 décembre 2009

 

En Avril 1991 commença ma collaboration à une revue amateur et consacré à la vieille anticipation. 

Ce bulletin nommé « Bulletin des amateurs d’anticipation ancienne et de littérature fantastique »débuta en Mai 1990 et réussit à maintenir son cap pendant pratiquement 36 ou 37 Numéros

Unique en son genre,elle demeure malgré son coté très amateur et une mise en page parfois des plus anarchique,une source de références indispensables pour tous les amateurs du genre. 

Traitant bien souvent d’éditions rares et introuvables, ce bulletin reste de nos jours impossible à trouver. En effet il était réservé aux seuls collaborateurs (mis à part quelques exemplaires ),ce qui limite considérablement la chance pour le collectionneur et chercheur dans retrouver la totalité.

Je vais  donc proposer sur mon blog l’ensemble des ouvrages que j’avais à l’époque analysé dans le bulletin afin de permettre à ceux qui le souhaitent,un résumé de quelques textes rares, oubliés sur les étagères poussiéreuses de nos bibliothèques

« Les merveilles de l’ile mystérieuse«   de Octave Béliard 

Lecture pour tous » de septembre 1911 No 12 pages 1066 à 1078 Illustrations de Lanos ( Bulletin N° 5 décembre1990)

 Lors d’une traversée de l’océan indien, le « Fulton » vieux bateau à vapeur se trouve dans une terrible tempête. Chose curieuse, le navire semble aspiré vers une île, plus précisément vers un gouffre immense ou le vent pénètre avec un bruit apocalyptique. Pensant sa dernière heure venue, le héros constate avec stupéfaction que ce trou béant, n’est autre qu’une immense porte. Un fois franchie, le navire se retrouve dans un calme absolu. Seul survivant avec le capitaine, notre homme va sans nul doute connaître l’aventure la plus incroyable de sa vie. Cette île n’est autre qu’une sorte de république de savants qui, retirés là par dégoût d’une humanité trop ingrate, y vivent grâces aux moyens naturels apportés par l’environnement et le génie de ses habitants. 

Tout y est domestiqué : les marées dont la force exercée sur d’immenses plaques métalliques actionnent d’innombrables machines à tisser. Le vent qui,une fois emprisonné est mis sous pression,transformé en air comprimé et distribué dans chaque habitation .Ce système permettant l’alimentation des appareils domestiques. Le volcan qui avec sa quantité énorme de lave en fusion, constituera la base d’une immense chaudière. L’énergie provenant de l’atmosphère, avec ses récupérateurs de foudre, une énergie prodigieuse et illimitée. Le palmarès des inventions revenant au final à cet appareil capable de capter les « vibrations calorifiques de l’air » .Celui-ci, placé dans une assemblée de philosophe en grande discussion, permet l’alimentation de centaines de couveuses. 

Dans cette véritable « république parfaite », pas de classe dominante : Savants et travailleurs manuels, même statut. La ville est construite selon un schéma identique, et le confort qui règne dans chaque habitation est de rigueur. Les rues, très espacées et peu encombrées servent au passage d’une multitude de véhicules électriques. En somme un concentré de technologie au service d’une communauté heureuse et pacifiste. Hélas, cette société idyllique sera comme il se doit, détruite par mère nature qui voulant reprendre ses droits, anéantira toute cette perfection lors d’une formidable éruption volcanique. 

Le seul survivant de cette incroyable aventure sera une fois de plus le rescapé du naufrage, narrateur de cette extraordinaire aventure et dont nous ne connaissons toujours pas le nom.

 En guise de conclusion,je voudrais insister sur la richesse incroyable de toutes ces publications qui,à l’instar de « Je sais tout » « Lectures pour tous » « Sciences et voyages » etc.… nous offrirent de petits joyaux de littérature conjecturale. Octave Beliard y donna de très bons textes et  malheureusement, la mauvaise volonté des éditeurs fait encore obstacle à la réédition de ces « merveilles » qui dorment bien tranquillement dans l’attente de jours meilleurs 

Pourtant,si la France fut longue à proposer des collections spécialisées,il sera utile pour le chercheur assez téméraire de se tourner vers ces divers périodiques,pour se rendre compte à quel point  l’imaginaire de nos écrivains ne demandait qu’à s’épanouir.  Qui pourrait prétendre que des textes comme « Celui qui viendra » de Tancréde Valéry, la majorité des œuvres de André Couvreur publiées dans « Les œuvres libres » ou « Un monde sur le monde » de Henri Lanos (paru dans Nos Loisirs) doivent rester dans l’oubli. A toute cette indéniable qualité littéraire, il est nécessaire de rajouter ce qui me semble être également un atout majeur de ce type de publication : L’illustration. Henri Lanos qui affûta sa plume dans de nombreuses revues, peut-être considéré comme l’un des plus brillant illustrateur de conjectures anciennes. 

Il fut sans nul doute le véritable artiste de science-fiction de l’époque en illustrant de nombreuses nouvelles et articles pour « Je sais tout » et « Lecture pour tous » avec un talent incomparable. A l’époque il n’y avait que Dutriac ou Orazi pour soutenir la comparaison. Lanos fit de nombreuses compositions pour des articles de C.Flammarion et des nouvelles de Lauman, A.Conan Doyle, J.Perrin (pour son incroyable « Terreur des images ») ,O.Beliard,Jean Rostand… Cet artiste possédait un coup de crayon prodigieux pour représenter,en véritable visionnaire,les progrès technique et les inventions de demain. Dans ses dessins, l’homme est toujours représenté de façon minuscule, écrasé par les machines qu’il a inventé, comme si ces immenses rouages, bielles et pièces mécaniques avaient une âme, ne désirant qu’une chose : asservir et dominer l’homme. 

L’exemple le plus caractéristique de son art est visible dans un de roman écrit en collaboration avec Jules Perrin « Un monde sur le monde »  ( « Nos loisirs » No 46 à 50 13 novembre au 18 décembre 1910 N° 1 à 16 1er Janvier au 5 Février 1911)

Dans cette anti-utopie technologique ou un milliardaire Américain construit une titanesque ville de fer, certains illustrations pleines pages de Lanos sont tout simplement hallucinantes. Malheureusement la mauvaise  qualité d’impression ainsi que le papier utilisé a l’époque n’offrent pas toutes les qualités requises afin d’obtenir un parfait rendu des illustrations originales. 

Peintre visionnaire de grand talent, il rentre dans la liste hélas peu volumineuse des artistes de talent qui au début du XX aime siècle  parvinrent à donner aux illustrateurs de science-fiction, leurs lettres de noblesse.

Octave Béliard et son oeuvre

Médecin de par sa profession,cet écrivain né en 1876 et décédé en 1951 consacra une grande  partie de sa vie à la littérature.Il fut en outre non seulement lauréat du prix Jules Verne et du prix Maurice Renard,mais également dans un domaine bien différent,le biographe de Sade,écrivain historique,encyclopédiste, etc….

Ce précurseur de la Science-fiction moderne écrivit maintes nouvelles annonçant déjà quelques grands thèmes très connus du public de l’imaginaire.IL est à mon avis un des premiers écrivains Français à utiliser dans une de ses nouvelles une machine capable de remonter le temps (« Aventures d’un voyageur qui explora le temps »).Un brillant exemple de l’influence du voyage temporel sur le déroulement des faits historiques.

« La journée d’un Parisien au XXIéme siècle » est une visite guidée de ce que pourrait étre notre belle capitale avec toutes les dernières innovation apportées par la science et il faudra attendre le texte suivant « Une exploration polaire aux ruines de Paris » pour en découvrir son funeste destin : le texte relate une exploration archéologique (dans un lointain futur) qui découvre sous une immense couche de glace les derniers vestiges d’une ville légendaire,lorsque Paris était une des plus grandes capitales du XXéme siècle.

D’autres nouvelles seront encore écrites et recueillies dans un volume paru en 1944 « Le décapité vivant et autres histoires d’outres vies »,où figurent de très bonnes nouvelles fantastiques (en autre le texte portant le titre du volume)

Mais ce qui demeure sans contexte le chef-d’oeuvre de l’auteur et un des titres phare de la conjecture ancienne est sans nul doute « Les petits hommes dans la pinède ».Treize ans avant « Le dieu microcosmique » de Théodore Sturgeon,voici l’histoire d’une race de minuscules humanoides créées par un embryologiste.Ce peuple, dont l’existence  se déroule dans cette fameuse pinède, évoluera d’une façon extraordinairement accélérée en raison d’une durée de vie très rapide.Ces « petits hommes » découvriront hélas que leur dieu/créateur est semblable à eux,un étre de chair et de sang,la crainte qui les animait jusqu’alors disparaitra.Arrivés pratiquement à l’apogée de leur technologie et de leur science,le témoin de cette formidable aventure détruira leur territoire,préservant ainsi « l’humanité d’une invasion plus irrésistible que celle des fourmis d’Amazonie » pour reprendre la phrase cité par Versins dans son encyclopédie.Le texte de A.Poleischuk « L’erreur d’Alexis-Alexeiev »Hachette « Le rayon Fantastique » N° 114 1963) est certainement plus poussé dans le développement,mais il faut bien reconnaitre que pour l’époque Béliard fit preuve d’un véritable tour de force.

Bibliographie de Octave Béliard dans la revue « Lecture Pour tous »

      - « Aventures d’une voyageur qui explora le temps » Illustré par Montchablon .N° 4 Janvier 1909 

      - « Une exploration polaire aux ruines de paris,récit des temps futurs» Illustré par H.Lanos N° 9 Juin 1911

      - « Les merveilles de l’ile mystérieuse » Illustré par H.Lanos Septembre 1911

      - « La journée d’un Parisien au XXI éme siécle » Illustré Arnould Moreaux et Biron-Roger .Noel 1910

      -  « La petite fille de Michel Strogoff  » Juillet ,Aout ,Septembre 1927.

 

Bibliographie Science-fiction d’Octave Béliard

 

      - « Les petits hommes dans la pinède » Paru en 1927 en pré-original dans « L’association médicale».Contenait un prologue non repris dans l’édition suivante.

     - « Les petits hommes dans la pinède»  La nouvelle société d’édition 1928 couverture illustrée couleur

     - « Le décapité vivant et autres histoires d’outre vie » Recueil de nouvelles. Le livre de Paris 1944

  • Le passé merveilleux
  • Le décapité vivant
  • La découverte de Paris
  • Le roseau de Tout Ankh Amon
  • Le sac de serge verte
  • Spiritisme
  • La seconde vie
  • La hantise
  • Le malacanthrope
  • Le karma
  • Le réflexe suprême
  • Visite de nuit
  • Le charmeur de bruits
  • La ville de rêve
  • Un dîner au Majestic
  • Le bouddha
  • Le seuil
  • L’étrange histoire de Françoise

    - « Le message mystérieux » Tallandier « Voyages lointains,Aventures étranges » N° 12 1928 Couverture Illustrée couleur

    - « La petite fille de Michel Strogoff » Hachette collection « Prix Jules Verne » 1927 Couverture illustrée couleur

     - « Orient contre Occident » Nouvelle publiée dans le numéro 3 du 15 Mars 1914 de la revue « Touche à Tout ». Rééditée dans le « Bulletin des amateurs d’anticipation ancienne et de Fantastique » N°36 Décembre 2005.

 

Nouvelles rééditées dans diverses revues

 

      - « Le passé merveilleux »( le décapité vivant….) Revue Fiction N° 79 Juin 1960 (pages 99 à 115)

      – « La découverte de Paris »(le décapité vivant….) Revue Fiction N° 141 Aout 1965 (pages 112 à 128)

     « La ville de rêve »(le décapité vivant…) Anthologie « Histoires étranges » Casterman 1964 (pages 73 à 79)

      - « Le décapité vivant »(le décapité vivant…..) Anthologie « Histoires étranges » Casterman 1964 (pages 203 à 219)

      - « Le Bouddha »  (le décapité vivant…..) Anthologie « Nouvelles histoires étranges » Casterman 1966 (pages 183 à 191)

      - « L’étrange histoire de Françoise » (le décapité vivant…..) Anthologie « Nouvelles histoires étranges »Casterman 1966 (pages 47 à 65)

      « Aventure d’un voyageur qui explora le temps » dans le recueil « Jour de l’an chez les momies » éditions « Le visage vert » Mars 1987.Il s’agit d’une reproduction en fac similé du texte paru dans « Lectures pour tous » de 1909. Cette longue nouvelle fût également reprise sous un forme abrégée dans le magazine « Lisez moi aventure » du 15 Février 1948 N°43

       – « La journée d’un Parisien au XXI éme siècle » N° 2 & 3 de la revue « Planète à vendre » (décembre 1990 et Mars 1991.Reproduction en fac similé du texte paru dans « Lecture pour tous » pour le Noël 1910.

Pour conclure « Les merveilles de l’ile mystérieuse » eut également les honneurs d’un réédition dans la revue « Das Neue Universum »en 1911.Cet énorme almanach créé en 1880 proposa tout au long de sa carrière des articles et des reportages sur le sport, la chasse,les découvertes scientifiques….La particularité du texte de Béliard vient du fait que dans l’édition Allemande,la paternité de l’oeuvre fut attribuée à son traducteur Herbert Frank et livrée comme une création originale. Cette nouvelle sera reprise en 1980 par les éditions Wilhem Heyne de Munich dans une anthologie réalisée par Wolfgang Jeschke « Als Der Welt Kohle Und Eisen Ausging »( Quand la houille et l’acier s’épuisèrent dans le monde).Ici également le nom de Herbert Frank sera conservé.

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 Les illustrations proviennent de la nouvelle « les merveilles de l’ile Mystérieuse »