Dossier « Les Détectives De L’impossible«
Dans cette petite famille que l’on appelle les « Détectives de l’impossible » il est toujours agréable d’accueillir des « petits nouveaux » et je dois avouer que je suis très heureux de pouvoir compter dans notre petit cercle un membre supplémentaire. Comme j’en avait fait état précédemment dans mon billet consacré à Jean Pol Laselle, je vous disais toute l’affection et la sympathie que je portais à son ou plutôt « ses » détectives de l’occulte. Nous le savons tous à présent, derrière ce pseudonyme se cache un écrivain qui au fil de plusieurs décennies ne cessa de se consacrer au travail si difficile et souvent ingrat de l’écriture, Brice Tarvel.
Son parcours est des plus passionnant et je dois avouer que si je ne me suis pas penché de façon acharnée sur l’ensemble de son œuvre il faut quand même dire que certaines de ses ouvrages m’ont fortement intéressés. J’ai en effet beaucoup adoré « Destination cauchemar » et « Dépression » signés François Sarkel mais plus encore, en bon « Geek » de Harry Dickson son premier volume consacré aux « Dossiers secrets de Harry Dickson » paru chez le petit éditeur préféré de la famille « Malpertuis ».
Il y a chez Brice Tarvel un style particulier, une « patte » inimitable qui le caractérise fortement et que l’on retrouve depuis ses premiers textes consacrés à « Brice Flandre ». Bien évidemment le style a beaucoup évolué, il est devenu plus fluide, plus agréable à lire et l’on se laisse porter par la richesse de son vocabulaire qui possède tout le charme suranné d’une époque ou le langage se dégustait comme les promesses d’un bon repas. Ces deux aventures se lisent d’un traite et se savourent comme un bon cigare et si je dois préciser une légère préférence pour la première aventure « la main maléfique » ( un hommage peut-être à la « main du diable » de Tourneur) avec des chapitres aussi mémorables que « La pieuvre de la tamise » ou « Les pantins de l’épouvante » la seconde aventure « L’héritage de Cagliostro » n’est pas en reste avec son passage surprenant où nous assistons à la mort de….mais je ne voudrais pas déflorer tout le suspens de cet épisode haletant. Une histoire des plus singulière mettant en avant l’existence d’une incroyable machine à ressusciter les morts. On se croirait dans le roman de Léon-Marie Thylienne « Celui qui se ressuscita » (la machine à ressusciter est une constante dans l’anticipation ancienne).
Une ambiance souvent glauque et poisseuse, un rendu final qui loin de copier l’auteur Gantois, le sublime en le personnalisant et lui donnant un souffle supplémentaire. Tout un monde dans lequel on s’abandonne avec délectation et qui me donne envie de me lancer sur les traces de son second volume. Lorsque j’ai découvert sa dernière production « Nuz Sombrelieu », quelle ne fut pas ma hâte de me plonger dans ce nouvel univers qui me semblait avoir toutes les caractéristiques d’un nouveau personnage populaire hors du commun.
Déjà le contexte de l’histoire, les années 20, la belle époque et si l’on regarde mes billets consacrés à « Fulgur » « Le Rour » « Fascinax » ou les « Vampires » vous savez à quel point je suis attaché à cette période. Ensuite il y a le personnage en lui-même. Imaginez un peu, un cul de jatte patron d’une agence portant le nom absolument génial de « cabinet des obligeances ». Victime des appétits féroces d’un monstre rencontré dans la mer des Sargasses alors qu’il trafiquait l’alcool de contrebande (Jean Ray encore et toujours) il compense alors cette singulière infirmité par une agilité extrême de ses membres supérieurs. Le pari n’était pas évident, car choisir un héros qui contrairement à la production habituelle est atteint d’une infirmité, il fallait oser. Dehors le beau ténébreux, le dandy bellâtre, le reporter adeptes des sports extrêmes, voilà une nouvelle race d’investigateur : le Détective cul de jatte.
Le cinéma de genre avait son masseur aveugle, son sabreur manchot, son justicier borgne ou son inspecteur en fauteuil roulant, Brice Tarvel vient d’enrichir le panthéon du héros handicapé.
Mais loin de s’arrêter à cette singularité, l’auteur vient enrichir sa toute nouvelle agence d’une galerie, de personnages en tous points pittoresques. Pour commencer Marcelline Hochebois, une ex femme canon et doué du don de divination, Ribert Lucot spécialiste des rapines en tous genres et contorsionniste de son état. A en juger par cet étrange état des lieux on pourrait avoir l’impression de se retrouver dans une annexe du cirque Barnum, détrompez vous car l’habit ne faisant pas le moine, cette curieuse équipe qui semble faite de bric et de broc possède plus d’un tour dans son sac. La vaillance et la perspicacité de chacun son des atouts déterminants afin de mener à terme cette seconde enquête. Car l’auteur, habitué à ce genre d’exercice, voulant donner de la consistance au « cabinet des obligeances » crée une histoire dans l’histoire ou il serait question d’un procès en cour, relatif à une affaire passée et relative à un curieux restaurant réservé à la haute bourgeoisie et où l’on consommait….de jeunes enfants.L’affaire fut rondement menée par Sombrelieu mais cela ne semble pas convenir aux différents accusées qui à l’image de leurs dents possèdent également un bras tout aussi long
D’entrée de jeu Brice Tarvel nous pose les bases d’un monde corrompu où toutes les exactions sont possibles, un univers construit sur le mal et la perversion . Une époque où les sociétés secrètes et les savants fous de tout acabits ont pignons sur rue et peuvent se livrer à leurs besognes peu recommandables. Tout leur est permis, ou presque car Nuz Sombrelieu en détective redresseur de torts veille au grain.
Dans cette première aventure « L’homme au ventre de cuir » devra déjouer les dessins abominables d’un lunatique savant qui, à la suite de circonstances incroyables et pour le moins ironiques (un cadeau fait à un ingénieur et ressemblant à cinq magnifiques rubis) vont en fait se révéler une terrible menace pour la population Parisienne. En résultera une déferlante de « Démons de Birmanie » dans les rues de la capitale que vous ne serez pas prête d’oublier. D’un contexte purement policier avec une série de crimes abominables, l’auteur va ainsi vous prendre par le bras et vous conduire subrepticement vers cette redoutable « maison du silence » où se tapissent de redoutables créatures, dignes des pires abominations volantes que vous retrouverez dans les pages de ce blog. Et tout cela sur 16 feuillets !
Dans un style très alerte et d’une grande fluidité, c’est un peu tout l’univers de Harry Dickson qui se retrouve ainsi transposé dans les murs de la capitale, mais avec le talent créatif qui semble être la principale qualité de l’auteur, les aventures de ce nouveau « détective de l’impossible » n’en sont que plus savoureuses et remarquables.
Un seul mot de conclusion, on en redemande encore car au travers de « Nuz Sombrelieu », c’est toute la magie et la démesure des feuilletonistes de la belle époque qui vient ainsi de renaître.
Pour l’heure et dans l’attente des prochaines histoires, je me lance dans les extraordinaires aventures de « Jeanne d’arc » de Robert Darvel, toujours chez le même éditeur et à la lecture du premier chapitre je pense que cette nouvelle saga tiendra également toute ses promesses. Le « Carnoplaste » n’a pas fini de nous étonner!
- « Nuz Sombrelieu, l’homme au ventre de cuir » Volume 1 : « Les prisonnières du silence » Une fantaisie de Brice Tarvel. Edition « Le Carnoplaste » éditeur de fascicules.
- « Les dossiers secrets de Harry Dickson » de Brice Tarvel. Tome 1 : « La main maléfique » & « L’héritage de Cagliostro » Préface de Richard D.Nolane. Editions Malpertuis collection « Absinthes, Ethers, Opium ».
- « Les dossiers secrets de Harry Dickson » de Brice Tarvel. Tome 2 : « La confrérie des hommes griffus » & « La maison du pluvier » Editions Malpertuis collection « Absinthes, Ethers, Opium ».
Un vent de folie souffle sur la capitale. La statue du génie de la Bastille tombe sur le cortège d’un souverain de passage à Paris, l’obélisque dans sa chute endommage la voiture présidentielle. Des véhicules explosent mystérieusement et le préfet de police se retrouve « effacé » disparaissant corps et bien. Tout cela dans un chassé croisé de personnages aussi mystérieux que Paul Step « L’homme qui voit à travers les murailles » (mais qui n’aperçoit que dalle !), la comtesse Elyane d’Arlez dit Eva, dont le seul nom peut provoquer l’invisibilité et puis le fameux « Fulgur », personnage mystico- policier se cachant sous les traits de Pierre d’Oray. Entre roman scientifique et d’aventure à la fois parodique et rocambolesque, laissons la parole à Francis Lacassin sur le deuxième plat de couverture afin de nous parler de ce petit « bijou » de littérature populaire :
« Paru en feuilleton en 1924 dans un obscur quotidien de l’Yonne, « Fulgur » est l’œuvre collective de neuf élèves du lycée Louis le Grand : Roger Vailland, Robert Brasillach, Thierry Maulnier, Paul Gadenne, Fred Semach, Jean Martin, José Lupin, Pierre Frémy, et Antonin Fabre. Trois d’entre eux connaîtront des fortunes diverses après 1945 : Robert Brasillach, sera fusillé ; Roger Vailland, figure de proue des intellectuels communistes ; Thierry Maulnier, élu à l’académie Française. »
Fortement influencé par le film à épisode « Judex », les fascicules de « Fantômas » et de « Todd Marvel, détective milliardaire » ce prodigieux roman d’aventures fantastico-scientifique met en scène une séduisante criminelle Eva, qui, à grand renfort de crimes étranges et de prodiges inexplicables, déchaîne l’Asie contre l’Europe .Elle réveille grâce au prophète Kahn Agavath, les descendants des Catalans qui accompagnent Marco Polo en Asie. Leur révolte menace de dislocation l’empire Britannique, déstabilise l’Indochine Française et lance à l’assaut du Sud de l’Europe une grande armée de 800 000 hommes.
Mais cette héroïne n’est pas la seule à démarquer ce roman complètement farfelu, puisque outre le fameux « Fulgur » alias Pierre d’Oray, les auteurs nous régalent également d’un certain Paul Step, détective attaché à la sûreté Parisienne, une version parodique de Sherlock Holmes. Un personnage dont la maladresse agrémente le coté comique de certaines situations. De cette galerie de personnages aussi bien pittoresque que référentielle il faut en convenir, il est évident que les auteurs durent prendre beaucoup de plaisir à magnifier ainsi tout un courant littéraire qui à l’époque était déjà bien rodé.
Car dans Fulgur, même si l’on devine une sacrée pointe d’ironie et une décontraction totale, les hommages aux auteurs populaires de l’époque ne font pas défaut. De Souvestre et Allain avec leur « Fantômas » pour le coté noir de l’histoire, sans oublier le célèbre « Rour » analysé dans les pages de ce blog et qu’il serait grand temps de rééditer, en passant par notre fameux Gustave Le Rouge et les aventures scientifico-policiéres de son « Mystérieux Dr Cornélius », Gaston Leroux n’est pas en reste avec un goût prononcé pour les situations extravagantes et incroyables. Nous avons donc ici un condensé du « must » de tout un panel de la littérature populaire, si chère à nos surréalistes.
Mais que l’on ne si trompe pas, à l’époque toute cette joyeuse bande d’étudiants regardait cette œuvre comme une galéjade et mis à part Brasillach qui lorgnait de façon obsessionnelle vers une carrière d’écrivain, les autres potaches ne pensaient pas aller au-delà de la simple feuille de brouillon. Si les 64 chapitres de cette saga ne sont pas exempts de maladresses et d’un style parfois limite, il ne faut par pour autant oublier les conditions dans lesquelles furent rédigé le texte. De tout ce fatras hilarant, ce fourre tout qui pourrait sembler anarchique, se détache une œuvre, certes bancale mais réunissant tous les ingrédients nécessaires à faire date dans les annales du feuilleton populaire.
Fidèle à une certaine tradition et aux pères qui leur servirent de modèle, « Fulgur » est traversé si je puis m’exprimer ainsi de « Fulgurances » inventives qui ne nous laissent pas indifférentes. Pour commencer le Professeur Baptiste Mexier, inventeur d’une technique permettant de devenir invisible et d’une invention anti-pesanteur : « L’apogeïte ». La bicyclette-hélicoptére qui permet de survoler Paris dans une discrétion absolue, un immeuble dont les portes ne sont visibles que lorsque celui-ci est plongé dans une ombre artificielle. D’ailleurs le sous-titre de « Grand roman d’aventure de police et d’épopée » n’est pas usurpé et ne lui manque que le qualificatif de « scientifique ». Des situations des plus extravagantes que n’aurait pas renié Cami avec son sens du burlesque et de la dérision, bien connu des lecteurs de ce blog.
Mais si la science est une des composantes de cette épopée hors du commun, le surréalisme et la démesure ne seront pas en reste et de ce coté également les auteurs qui ne semblent pas avoir de limites.Citons pour mémoire ce chapitre où nous assistons à la mise en « marche » des statues du Louvre avec cette scène improbable où la sculpture de « La vénus de Milo » se penche pour ramasser une étoffe et recouvrir sa nudité, et ce tableau d’une noirceur époustouflante où par représailles, l’armée Asiatique cloue par les mains deux mille jeunes filles sur les murs de la cité de Carcassonne. Comment ne pas succomber au charme de cette époque bénie où les chapitres portaient un intitulé avec des noms aussi surprenant que « Une armée digérée »
Pour les puristes qui accusent les auteurs d’avoir « Plagié » d’autres romans, je crois que les « coupables » de cette soi-disant ignominie, ne s’en cachent pas et comme bien souvent il fallait « tirer à la ligne » ils utilisèrent la plume de deux associés et non des moindres puisqu’il s’agit de Victor Hugo et dont Lupin va insérer un passage des « Travailleurs de la mer » ( Fulgur affronte la pieuvre afin de pénétrer dans le repère sous-marin d’Eva) et Brasillach qui de son coté « emprunte » à Philippe Soupault un passage d’un texte dont il ne se rappelait plus du nom et qui s’intitule « La mort de Nick Carter ». Les deux « victimes » seront créditées à la liste finale des auteurs du « Fulgur ». Voilà pour les « justificatifs»
Avec une intention assez louable de parodier leurs modèles, les auteurs parvinrent à créer une œuvre originale et si l’intention première était de réaliser une sorte de « farce littéraire » ils sont parvenus à immortaliser un personnage qui rentre désormais dans le panthéon des grandes figures mythiques de la littérature populaire. En voulant pousser à l’extrême le sens de la démesure ils ont sans nul doute apporté la preuve que le genre était réellement une marque de fabrique Française, tant pour son originalité et l’ambiance souvent surréaliste dans laquelle baigne les personnages.
Car ce qui fait la spécificité de nos « héros » à la Française, ce n’est pas tant les super pouvoirs dont la plupart du temps ils ne disposent pas, mais ce petit grain de folie qui bien souvent les anime, la noirceur et le sadisme des « méchants » qu’ils doivent affronter et la cadre magique souvent irréel de toute une époque où la science ne pouvait pas toujours tout solutionner et qu’il ne restait alors que le courage et la volonté du héros. Il est clair que cette « touche à la Française » que l’on retrouve dans les œuvres de Leroux, Souvestre et Allain, Le Rouge, De La Hire et bien d’autres encore, est une marque incontestable de qualité et de pérennité de tout un courant qui n’a pas son pareil dans tout autre pays.
Tous ces auteurs ont la Classe des grands romanciers dont les œuvres continuent à briller au firmament de la littérature de genre.
Terminons par cette phrase qui met en évidence le caractère coquasse et le ton loufoque du roman :
Le président de la république monte dans l’ascenseur de la tour Eiffel en compagnie de ses ministres:
« Et les faces exsangues, blanchies, noircies, de leurs yeux énormes et décolorés virent cette chose effarante : l’ascenseur arriva au troisième palier et ne s’arrêta pas ! »
« Fulgur, grand roman d’aventures de police et d’épopée » Par Jean Serviére. Editions Julliard collection « La seconde chance » Dirigée par Francis Lacassin. Préface et répertoire des personnages par Francis Lacassin.
Les responsables de cette édifiante « Farce littéraire » persistent et signent
Je crois qu’il était temps de rendre un petit hommage à un éditeur dont le catalogue nous propose depuis quelques années et de façon épisodique des textes d’anticipations anciennes, pratiquement introuvables de nos jours. Déjà le nom « L’arbre vengeur » est tout un programme à lui tout seul et si c’est celui qui, comme prétend le proverbe, cache la foret, souhaitons que l’avenir nous réserve bien des surprises dans notre domaine.
Petit format, prix très attractifs, les amateurs de curiosités n’ont aucune excuse de ne pas se laisser tenter. Dernière petite perle en date le superbe et trop peu connu « La chute dans le néant » de Marc Wersinger. Edité pour la première fois en France aux éditions « Pré aux Clercs » en 1947, puis réédité en 1972 dans la collection « Ailleurs et demain classiques » chez Robert Laffont sous la direction de Gérard Klein, l’ouvrage était pratiquement introuvable. Ce « Classique » méritait à mon avis une nouvelle chance, voilà qui est fait et il nous faut donc une fois de plus féliciter cet éditeur qui ose contre vents et marées, à prendre certains risques. Qu’il en soit ici remercié.
Un homme, Robert Murier, suite à un mal étrange, voit son corps se transformer, ses molécules se dilatent et va progressivement diminuer de taille. Sa structure moléculaire est telle qu’il va affronter de redoutables créatures qui ne sont finalement que des êtres de notre infiniment petit. Tout va ainsi prendre des dimensions ahurissantes, grain de poussière, bactéries, microbes. Petit à petit il va ainsi perdre la composante même de son organisme, son corps va se réduire à sa plus simple expression, pour finalement se confondre avec l’air qui nous entoure….vous découvrirez la suite en lisant ce curieux roman auquel il manque toutefois une portée un peu plus philosophique que l’on retrouvera quelques années plus tard en 1957 dans « L’homme qui rétrécit » de Richard Matheson.
D’un caractère plus « Documentaire » car il nous fait vivre en direct une expérience scientifique des plus incroyable, « La chute dans le néant » n’en reste pas moins un passionnant roman d’aventure scientifique aux confins de l’infiniment petit.
Pour rappel, quelques titres de la collection « L’arbre vengeur » où j’ai également cru bon de mettre deux ou trois titres qui, sans être de l’anticipation ancienne » n’en restent pas moins intéressants pour leur coté bizarre et décalé.
– « La chose dans la cave » par David H. Keller Date de parution : 20 avril 2007
– « Quinzinzinzili » par Régis Messac Date de parution : septembre 2007 (collection l’alambic)
– « Les ruines de Paris en 4908″ par Alfred Franklin Date de parution : 14 novembre 2008 (collection l’alambic)
- « Les figurants de la mort » par Roger de Lafforest Date de parution : 22 mai 2009
- « L’homme qui s’est retrouvé » par Henri Duvernois Date de parution : 25 septembre 2009
- « Les morts bizarres » par Jean Richepin Préface de François Rivière Date de parution : 13 octobre 2009
-« Le manuscrit Hopkins » par R.C. Sherriff Date de parution : 27 novembre 2009
-« Les 21 jours d’un neurasthénique » par Octave Mirbeau Préface d’Arnaud Vareille Date de parution : 17 mars 2010
-« La chute dans le néant » par Marc Wersinger Date de parution : 18 novembre 2010
« Elisabeth Faldras » de O.de Traynel. Librairie Paul Ollendorff. Paris 1909. Un des 25 exemplaires sur vélin de couleur (Bleu). Illustrations de G.Dupuis. (Bulletin des amateurs d’anticipation ancienne et de littérature fantastique N° 11 Novembre 1992).Tirage 140 exemplaires
Je dois avouer avoir été fortement déçu à la lecture d’un texte au titre pourtant prometteur « La découverte du Dr Faldras». Qui plus est avec une couverture des plus attrayante qui pouvait en dire long sur le contenu du précieux et rare ouvrage. Hélas l’attente était loin d’être justifiée et si le gros volume malgré ma déconvenue lors de sa lecture, est bien rangé dans ma bibliothèque à coté des volumes de Léon-Marie Thylienne (je sais, j’ai une idée particulière du rangement), je dois avouer qu’à l’époque je n’étais pas peu fier d’y joindre également celui qui semblait sa suite logique : « Elisabeth Dr Faldras ».
Pour cet ouvrage, j’étais tout de meme plus serein car il suffit de jeter un œil sur les superbes illustrations de G.Dupuis pour en conclure que cette fois on gravite sur du lourd : Combats de croiseurs aérien, hommes volants, rayon de la mort, péril jaune….diantre que du bon et de l’excellent même ! Une fois le premier chapitre entame, c’est le délire total et les idées péniblement esquissées à la page 292 de « La découverte du Dr Faldras » sont ici bien concrètes et pas dans la demi mesure. Jugez par vous-même.
Nous sommes en l’an 2096 et le docteur Faldras, noble vieillard de 240 printemps, fête son anniversaire entouré des 800 membres et descendants de sa longue lignée. Depuis la découverte de son sérum, certes dans le monde on succombe moins aux sévices de la grande faucheuse, mais il faut reconnaître que la surpopulation commence à se faire ressentir. Comme quoi un bienfait n’est jamais récompensé. Le progrès est sans contexte une bonne chose et l’humanité toute entière de ce fait bénéficie des dernières évolutions. Bien évidemment tout fonctionne à l’électricité, les déplacements se font par les airs ou au moyen de patins électriques, mais une rumeur de plus en plus persistante commence à grossir et tout le monde s’interroge sur un problème fondamental : La bouffe !
Toute médaille à son revers, un homme dans la force de l’age atteint désormais la centaine, mais à force de ne plus mourir, on commence à jouer des coudes et les ressources naturelles ne sont pas inépuisables. Dans sa ville natale, Sens, une cité d’acier et de cristal, Faldras est plongé dans une intense réflexion. En Orient, la révolte menace, la Chine, le Japon, la Corée…accusent les états confédérés Européens. En effet ces derniers n’acceptent pas le blocus de l’Afrique, devenu le grenier alimentaire de la planète et dont les nations « blanches » ont le monopole exclusif. Car les « blancs » en Arpagon de la boustifaille sentaient depuis longtemps poindre cette terrible pénurie alimentaire en faisant de ce fait alliance avec les nations Africaines. Du coup….c’est la guerre !
C’est alors un déchaînement de fureur et de violence. Face à la technologie Européenne, la supériorité numérique des peuples Asiatiques est un facteur déterminant et de ce fait la « chair à canon ne manque pas ». Les hommes sont ainsi envoyés au « casse pipe » que l’auteur nous décrit avec force de détails qui frôlent un passage de l’apocalypse. Face à cette incroyable marée humaine, la France doit s’incliner et penser coûte que coûte à la sauvegarde de leur génie national, Faldras. En signe de représailles, et devant un péril (jaune) qui se précise de plus en plus, les états confédérés font un embargo sur l’exportation du sérum de jouvence, géniale invention du célèbre docteur. Les résultats ne se font pas attendre avec pour résultats des Asiatique qui tombent comme des mouches en raison du sevrage de sérum frais que l’on doit s’injecter de façon régulière.
La pression monte crescendo du coté de l’agresseur qui veut frapper vite et fort sur le système névralgique de l’Europe. Il faut donc préserver Sens, la ville du génial inventeur et pour ce faire on s’active à son transfert dans une fortification souterraine, à plus de 300 mètres de profondeur. Parallèlement, le Docteur s’active à une autre de ses inventions qui, selon ses dires mettra un terme définitif à cette guerre ridicule. De son coté, l’armée ennemie progresse, engloutissant tout sur son passage, telle une déferlante humaine, hurlante et destructrice. La région se trouve encerclée par la plus puissante armada jamais rassemblée de mémoire d’homme. Tout semble perdu….non ! Un ingénieur de talent et inventeur d’un puissant explosif, va par un coup de dés impensable réussir à percer la croûte terrestre, provoquant ainsi l’éruption d’un gigantesque volcan dont la puissance formidable détruira tout dans un rayon de deux kilomètres.
L’armée de l’empire céleste sera ainsi défaite, à moitié brûlée, morte de faim et vieillissante. En raison de sa grande profondeur, la capitale provisoire des peuples libres « Electrica » sera saine et sauve. En signe de « gratitude » Faldras offre au monde sa nouvelle et formidable invention : La pilule nutritive ! Passons sur les explications de cette ingénieuse formule pour en arriver au résultat final, à savoir 40 g d’extraits chimiques essentiels à l’organisme dont les composants sont faciles à faire, à extraire, à avaler. La guerre va donc se terminer, un peu aussi faute de combattants, pour laisser place à un accord passé avec les nations Asiatiques, prémisse d’une longue période de paix et de prospérité. Quarante années après ces terribles événements, Faldras va mourir de sa belle mort, l’action du sérum n’étant pas illimitée. C’est ainsi de va disparaître ce génial personnage, avec le sentiment d’une vie bien remplie et du devoir accompli, sous les ovations de millions d’estomacs atrophiés et de palais agueusiques.
Les magnifiques compositions de G.Dupuis…….les ailes individuelles et les destroyers aériens tout se passe dans les airs en 2096
Une suite bien plus prometteuse!
Il y a tellement de choses à dire sur cet incroyable roman que la meilleure chose à faire…c’est de le lire ! Et si vous vous dépêchez un peu il y a encore moyen de le trouver sur le net à un prix assez raisonnable. Il faut dire qu’une fois n’est pas coutume et dans le cas présent, la fille est vraiment meilleure que le père. J’entends par là que la suite est largement supérieure au premier volet et si ma déconvenue fut grande à la lecture de « La découverte du Dr Faldras », il était pratiquement impossible de me décoller de sa suite « Elisabeth Faldras ». Remarquez, il parait que pour conquérir le cœur d’une fille, il faut s’attirer les bonnes grâces du père. Mais dans le cas présent il vous suffira de vous attaquer directement à la descendance, je vous assure que vous gagnerez du temps.
Le roman ne propose aucun temps morts et aborde joyeusement plusieurs thématiques dont l’immortalité, le péril jaune, la terre creuse, les guerres futures etc.…. avec un délicieux mélange d’humour fort bien approprié. Retenons ce passage où seront massacrés des centaines d’ennemis belliqueux et aux intentions peu louables, par un trio de vieillards de 210 ans, bien installés dans leurs fauteuils et aux commandes d’un puissant rayon de la mort. Et tout cela à distance s’il vous plait !
Le texte fourmille d’inventions délirantes, la technologie y est reine et puis quoi de plus enrichissant pour le progrès qu’une bonne guerre bien enlevée. Mais le terme de guerre est un bien faible mot, disons massacre à l’échelle mondiale. L’auteur avait le sens de la démesure et de l’exagération. Danrit à coté est une véritable midinette et pour cause, même une bombe atomique à coté de l’apocalypse finale ressemble à un bâton de dynamite. La thématique reste assez conventionnelle, mais le ton du roman, les illustrations d’excellentes factures et les excès de délire de l’auteur, me laissent un souvenir des plus agréable que j’avais partagé à l’époque avec la lecture simultanée d’un autre roman tout aussi extravagant : Le Fulgur !
O de Traynel serait le pseudonyme du Marquis de Jean de Neltray, de lui nous connaissons également un autre ouvrage « La boussole merveilleuse » éditions Boivin & Cie, 1923 avec des compositions de W.A.Lambrecht (Sources Bdfi)
La couverture du premier volume est superbe mais la démesure et l’extravagance sont au rendez-vous du second.
Dossier « Les Détectives De L’impossible »
Okamoto Kido
Okamoto Kido est surtout connu au japon comme étant le fondateur du roman policier à l’époque Edo. Très tôt au contact des occidentaux, il lisait alors les aventures de Sherlock Holmes dans le texte original, histoires qui ont fortement influencées sa création de Hanshichi, aussi célèbre au Japon que son homologue Anglo-Saxon. Des histoires à faire dresser les cheveux sur la tête ou monstre, revenants et fantômes font de fréquentes apparitions et Kido, au travers de son héros ne se contente pas de raconter des histoires de maisons de Samurais hantées, de meurtres, d’esprits vengeurs, de voleurs de Kimonos et de moines Bouddhiste corrompus, il y ajoute force détails sur la vie dans le Japon traditionnel, les croyances, les façons de s’habiller et sur une foule de personnages aux petits métiers divers et variés.
Même si je dois vous l’avouer j’ai été quelque peu déçu par la trame de certaine histoires qui manquent à mon avis d’un climax très fantastique les deux volumes, de ce « détective de l’occulte » made in Japan sont à découvrir sans modération, ne serait ce que pour l’aspect inhabituel de son origine.
Bibliographie des aventures de Hanshichi de Okamoto Kido
« Fantômes et Kimonos »
- A la poursuite du faucon
- Le bebé-monstre
- Meurtres à la lance
- Kappa et Geishas
- Le pavillon de Mukôjima
- La malédiction de la fille du marchand de saké.
« Fantômes et Samouraïs »
- L’esprit d’Ofumi
- La lanterne en pierre
- La mort de Kanpei
- A l’étage de la maison de bains
- Le professeur-monstre
- Le mystère de la cloche d’incendie
- La dame de compagnie
- L’étang de la ceinture voleuse
- La fonte des neiges au printemps
- Hiroshige et la loutre
- La demeure belle-de-jour
- Chats en rébellion
- La fille de la déesse Benten
- La nuit de la fête de la montagne
Aloysius Pendergast
- Aloysius X.L Pendergast est un personnage atypique et donc inclassable et si son intervention se fera plus discrète dans les premières aventures de Preston & Child, la vedette étant accordée à l’inspecteur d’Agosta (« Relic » et « Le grenier des enfers ») sa place sera totalement légitimée dès le troisième volume « La chambre des curiosités ». Il faut dire que ce personnage haut en couleur possède tous les atouts afin de séduire le lecteur. Il travaille pour le FBI, titulaire d’une maîtrise en anthropologie, homme d’une grande élégance et d’une grande culture il possède en outre un sens assez développé pour tout ce qui touche au mystérieux et au surnaturel. D’ailleurs la majorité des enquêtes où il se trouve impliqué, bien que souvent s’appuyant sur une base scientifique, flirtent majoritairement avec une ambiance fantastique pour ne pas dire surnaturelle.
Ses investigations le mèneront dans les égouts de New York à la recherche d’une créature redoutable, dans un musée à la recherche d’une aberration biologique, dans des endroits insolites et malsains où règne le mal, la magie, la sorcellerie, le crime et la souffrance. Finalement ce « détective de l’occulte » par la force des choses, ne sera pas employé en tant que tel, mais le coté étranges des enquêtes auquel il sera affronté à chaque aventure, le place tout naturellement dans cette catégorie. Souhaitons qu’un jour un éditeur aura l’heureuse initiative de rééditer « Le grenier des enfers » introuvables actuellement ou vendu à des prix honteusement prohibitifs.
Bibliographie des aventures de Pendergast de Douglas Preston et Lincoln Child
- Superstitions (Relic) (1995)
- Le Grenier des enfers (Reliquary) (1997)
- La Chambre des curiosités (The Cabinet of Curiosities) (2002)
- Les Croassements de la nuit (Still Life with Crows) (2003)
– Trilogie Diogène : « Le Violon du diable » (Brimstone) (2004) « Danse de mort » (Dance of Death) (2005) » Le Livre des trépassés » (The Book of the Dead) (2006)
– Croisière maudite (The Wheel of Darkness) (2007)
– Valse macabre (Cemetery Dance) (2009) – Fever Dream (2010)
Glastone & Bloodpint
- Surfant sur la mode de l’époque Victorienne et du Steam punk, Estelle Valls De Gomis, nous propose avec le volume « Les gentlemen de l’étrange » une vison très british et décalée des détectives de l’occulte. L’action se situe dans un Londres du XIX éme siècle, baigné dans son perpétuel Fog, lieu géométrique de toutes les terreurs où se terrent les horreurs les plus abjectes de la création. Cet dans ce contexte purement fantastique et cauchemardesque que Manfred Glastone, psychiatre et criminologue réputé et Wolfgang Bloodpint vont se trouver aux prises avec de singuliers et souvent fantomatiques criminels. Jeunes et sportifs, ils possèdent toutes les caractéristiques du dandy de l’époque. Bloodbint malgré son jeune âge est rentier et ses confortables revenus lui permettent de vivre dans l’oisiveté la plus totale et donc de se consacrer à son violon d’Ingres : La chasse aux spectres ! Les deux hommes se sont rencontrés à l’université et depuis une amitié sincère et durable s’est installée entre ses deux aventuriers de la première heure.
Qu’il s’agisse des ruelles ténébreuses de Londres, sur la Tamise, dans un asile de fou ou dans les fondation du futur métro Londonien, un seul mot d’ordre : traquer le monstre. De ce coté là ils seront plus que rassasiés puisqu’ils devront affronter un tueur sanguinaire, des vampires, goules, zombis, un wendigo, un savant fou, quelques fantômes et même le redoutable Kraken. Tout cela dans une ambiance très décadente fin de siècle où nos deux héros, aidés pour la circonstance de leur superbe gouvernante la mystérieuse Mlle Wihelmine et d’un inspecteur de Scotland Yard, croiseront au détours de leurs rocambolesques aventures, Bram Stoker ou Alester Crowley. De trépidantes péripéties qui fleurent bon la littérature populaire et qui prouvent tout le respect et l’admiration que l’auteur porte au genre. Un second volume était prévu chez l’éditeur « Le calepin jaune » mais qui hélas ne sortira probablement pas en raison de la cessation d’activité de ce petit éditeur.
Bibliographie des « Gentlemen de l’étrange » de Estelle Valls De Gomis
« Les gentlemen de l’étrange »(receuil de 10 nouvelles)
- Un cigare pour Manfred
- Le Zburator
- Wendigo
- Du gruyère et du sang
- Du vert dont on fait l’absinthe
- Ils burent un verre à Venise
- Le fantôme de Gloomshire
- Lueurs sur l’océan
- Promenade Londonienne
- Double vue
« Le bolide stratosphérique » de Alan Darmor. Editions « Propagande de la langue Bretonne » vers 1920/1930 ? (Bulletin des amateurs d’anticipation ancienne et de fantastique N° 11, Novembre 1992. Tiré à 140 exemplaires)
Paul Le Henaff, brillant polytechnicien et Yves, son frère major de l’école supérieure des mines et auteur d’une brillante thèse sur la transmutation des métaux, viennent de mettre au point un engin d’exception, capable de traverser les espaces interstellaires. Toutefois, afin de pouvoir vaincre les effets de l’attraction terrestre, risquant ainsi de dépenser la majeure partie du carburant de leur engin, ils optent pour la fabrication d’une fronde gigantesque, moyen qui devrait leur permettre selon les calculs de solutionner une partie du problème. Tout est donc réglé, le jour du départ approche et le « Bolide » va entamer, sur l’hymne Breton avec toute sa batterie de Binious, sa formidable rotation de propulsion, suspendu à un immense monorail circulaire. Une fois la vitesse voulue atteinte, voilà donc nos deux frères propulsés dans l’espace où ils ne mettront que deux jours pour atteindre….la planète Vénus !
A peine y a-t-on posé le pied que déjà on se sent comme à la maison : en effet on y respire mais attention, pas d’imprudence et n’oublions pas nos casques…coloniaux. Réchappés de justesse aux appétits féroces d’une plante carnivore (je l’avais oublié celle là dans mon post sur les plantes anthropophages !), Yves et Paul assistent effarés à la poursuite d’une créature humanoïde par une sorte de dragon. Hardi les gars ! Le temps de venir en aide au pauvre malheureux que tout le monde disparaît dans un tunnel gigantesque. Il s’agit en réalité d’une voie de transport rapide qu’empruntent les autochtones dans leurs déplacements. Les voici donc arrivés aux portes de la capitale Vénusienne où arrêtés sur le champ ils seront conduit séance tenante devant une sorte de tribunal où un être « fait d’énergie » les condamneront à une emprisonnement immédiat.
Enfermés en compagnie de deux robots à l’aspect plutôt amical, il faudra attendre l’intervention inespérée de leur gardien, qui n’est autre que la créature qu’ils voulaient secourir à l’entrée du tunnel, et qui en signe de reconnaissance va les délivrer. C’est ainsi qu’ils vont apprendre que les autres détenus sont en réalité des Martiens et que sur Vénus, ce sont les indigènes peuple pacifique, qui servent les maîtres. Ces derniers fortement minoritaires n’en sont pas moins despotiques et cruels. Grâce à la complicité des Vénusiens, nos Bretons regagnent le vaisseau spatial des Martiens. Plus puissant et mieux équipé, il pendra en « remorque » le Bolide, déjà bien endommagé lors de l’atterrissage.
Après un court voyage dans l’espace entrecoupé par l’attaque soudaine de créatures spatiales, l’astronef s’approche de Phébos où les pilotes dévoilent l’espace d’un court passage, l’aspect redoutable des habitants qui la peuplent. Arrivés sur Mars, les deux terriens admirent avec stupéfaction les progrès réalisés par cette formidable civilisation. Un des points essentiels, ils communiquent par un langage basé un peu sur notre alphabet morse et qu’ils sont pratiquement immortels. Leurs carcasses métalliques, carburent à l’énergie solaire et comme le dit si bien un des habitants : « Nous dépendons du soleil, notre existence est consécutive à la sienne, ce qui veut dire que notre fin n’est pas encore proche ! » Mais comme quoi il faut toujours tourner sept fois son piston dans sa bouche, il faudra qu’une stupide pluie de météorites s’abatte soudainement et à ce moment précis sur la cité Martien, fleuron de la technologie intergalactique.
Pendant ce temps sur notre bonne vielle terre, le père Le Henaff, un explorateur de réputation mondiale, rentre d’une longue expédition. A la maison tout le mondes est aux abois, car on est sans nouvelle des « petits » depuis belle lurette et il faudra curieusement les supplications de la bonne, pour que le paternel se mette au pupitre d’un émetteur super puissant afin d’envoyer une message dans les profondeurs de la galaxie. Après de nombreuses tentatives (pourtant dans l’espace personne ne vous entend crier…) il perçoit enfin un faible mais compréhensible message de détresse. Se pourrait-il que…mais oui ! Il s’agit bien de Paul qui lance un appel désespéré. N’écoutant que son courage, le père équipe le second « Bolide », que les géniaux fistons avaient eu la bonne idée de construire en même temps que l’original, afin de partir à leur rescousse.
A l’image du 20éme de cavalerie, le papa arrivera juste à temps sur les sables de Mars la rouge ( où ici également l’air est respirable) pour sauver in extremis sa petite famille, qui vient de s’accroître par la présence du Vénusien, seul rescapé de la terrible catastrophe. Inutile de s’attarder sur la réception que firent les autorités terriennes à ces « aventuriers de la science »
Impossible….pas Breton !
Dans son encyclopédie, Versin au chapitre Breton, disait qu’il n’existait qu’un seul roman de science-fiction « ancienne » rédigé par un auteur de cette région de la France. Tout le monde connaît bien évidemment « L’île sous cloche » de Xavier de Langlais (éditions « aux portes du large 1946 ») qui possède toutefois de meilleures qualités littéraires que le court roman de d’Alan Darmor et dont la thématique est bien plus passionnante tant le sujet est sensible et d’actualité : la modification génétique.Une œuvre à découvrir de toute urgence !
Mais pour en revenir à nos Bretons, voilà un ouvrage supplémentaire qui viendra un peu augmenter l’effort de guerre à notre louable domaine. Hélas, une fois de plus rareté n’est pas synonyme de qualité et si le texte se lit aussi rapidement que le « Bolide » met à atteindre la planète Vénus, heureusement que le texte ne fait que 45 pages. Mais j’ose espérer qu’il ne s’agissait que d’une œuvre destinée pour la jeunesse (rien ne semble le préciser pourtant) tant le texte est parsemé du début à la fin d’aberrations de toutes sortes. Et encore, ce n’est pas faire honneur à nos enfants que de leur faire avaler de telles énormités. Mais bon, le style fonctionne et le texte se laisse lire comme un roman d’exploration ou l’Afrique s’est substituée à Mars et à Vénus. Alors nous allons faire preuve d’un peu de clémence en restant attaché au coté coloré et pittoresque de cette extravagante aventure.
En ce qui concerne la datation du roman, il est impossible de retrouver une trace quelconque sur l’ouvrage, pas plus que sur le net qui reste obstinément muet sur cet éditeur. Il a certes publié de nombreux ouvrages en langue Bretonne mais aucune indication concernant cette œuvre, pas plus que sur l’auteur qui possède une forte odeur de pseudonyme. Apparemment le texte fut publié en pré originale dans la revue illustrée Bretonne « O lo lê » point final. Je pense toutefois que ce texte fut écris dans les années vingt, car il entre dans la catégorie des textes ou l’auteur utilise encore la fronde géante imaginée par Mas et Drouet.
Cette même technique sera également utilisée souvenez vous dans le roman de Graffigny « Voyage de cinq Américains dans les planètes ». Ce procédé sera par la suite vite abandonné, laissant place à la « fusée », permettant un décollage possible grâce à un mélange adapté de carburant et dont nous devons la découverte à un père de l’astronautique, Tziolkowski. Un preuve supplémentaire que le romancier, peut-être mal informé ou alors ne disposant que de la faible technologie proposée par son époque fut également confronté au problème de l’attraction terrestre. Mais il faut dire qu’en regard des délires proposés tout au long du roman, l’auteur ne devait certainement pas se poser trop de questions. Probablement a-t-il feuilleté une revue datant un peu et évoquant cette singulière possibilité (Il aurait tout aussi bien pu utiliser le canon géant proposé par Jules Verne).
En résumé donc un texte relativement rare, car édité par un éditeur assez improbable, sur du papier de piètre qualité, par un auteur totalement inconnu. La seule prouesse est d’avoir réussi à raconter une telle épopée en quarante trois pages, jamais nous n’avions rencontré une odyssée Terre/Vénus/Mars en si peu de jours. Reste également la qualité de certaines illustrations intérieures exécutées par l’auteur en personne qui bien que renforçant finalement l’hypothèse que ce texte était adressé à une jeune public, n’en restent pas moins très agréables à regarder car se rapprochant par moment à la légèreté du trait de Etienne Le Rallic. D’ailleurs simple coïncidence, ou influence d’un style, Le Rallic collabora à la revue « O lo lê », dans les années quarante, où il réalisa de nombreuses illustrations pour diverses histoires d’aventures. Ce pseudonyme cachet-il la signature du célèbre illustrateur ou un hommage au célèbre illustrateur en voulant reproduire son style ? Une hypothèse assez hasardeuse mais très séduisante.
En tout cas, une chose est sure, l’auteur fortement ancré dans la culture de sa région, ne voulait pas laisser le peuple Breton en marge du progrès.
L’oeil de la planète, une créature faite d’énergie ! La ville Martienne , un concentré de technologie
Une créature Vénusienne par vraiment sympathique En compagnie des robots Martiens
« La culture de l’humanité, par la fécondation artificielle sélectionnée » de Eugène Conti. Editions Figuiére 1937. (Bulletin des amateurs d’anticipation ancienne et de fantastique N°13 Février/Mars/Avril 1994. 200 exemplaires)
Voici encore un curieux et assez « drôle » petit roman que nous devons une fois de plus aux bons auspices des éditions Figuiére. Toutefois, s’il est vrai que ce roman relève de notre domaine, sa lecture en sera parfois laborieuse pour qui le thème de la fécondation artificielle est une chose rébarbative et indigeste. Mais certains passages sont tellement incroyables (vous jugerez par vous-même) qu’il sera bon de s’armer d’un peu de courage. Ce texte de plus, ne comporte aucun chapitre,il s’agit presque exclusivement d’un dialogue entre Henri Charville, médecin athlétique et créateur de la fécondation artificielle sélectionnée, face à sa future épouse, Brigitte Christiani.
C’est par la destruction totale de tout Paris que toute l’histoire va commencer. Des milliers d’avions invisibles à moteurs silencieux vont déverser des tonnes de bombes contenant la peste et le cholera. Des missiles supersoniques et des rayons foudroyants vont également semer l’horreur sur la capitale. En représailles, les Etats-Unis d’Europe vont également envoyer une réponse tout aussi radicale et vont raser complètement le pays agresseur. Sur les ruines seront reconstruites les nouvelles cités de demain et dans ces territoires ou tout sera à recommencer, la seule condition pour avoir sa « place au soleil » sera de se soumettre aux lois mises en rigueur et concernant la fécondation artificielle sélectionnée.
Charville est un personnage important dans cette société idéale et en véritable despote du spermatozoïde, ce dernier impose sa doctrine : les villes regorgent de jeunes chômeurs, forts et en bonne santé et il leur impose de fournir de façon hebdomadaire et obligatoire, 40 grammes de sperme. Si le lubrique savant s’aperçoit d’une diminution de la qualité du précieux liquide séminal, un avertissement. Si la chose se renouvelle c’est la radiation pure et simple des « membres actifs (humour voulu ou non de l’auteur ?) De la société de standardisation de la race humaine ».
La théorie du scientifique repose sur un concept très simple : Chacun de nous peut à son grés, construire le corps de son enfant et modifier son caractère, ses aptitudes et son intelligence par la chimie et l physiologie organique. Cette « culture de l’humanité » se détermine par deux facteurs fondamentaux à savoir :
- Le donneur possède un liquide de qualité irréprochable suite à un conditionnement naturel dés la naissance et ce, sur le plan mental, physique, intellectuel et alimentaire. Si ce n’est pas le cas pour le mari dont le sperme se révèle trop « mauvais »après une analyse rigoureuse, le pauvre homme devra être « conditionné » pendant une période plus ou moins longue.
- Utilisation les spermatozoïdes d’un des athlètes de la cité, en l’introduisant une fois prélevé de manière artificielle, chez la receveuse (conditionnée elle aussi) au moyen d’un pénis mécanique. C’est alors que vient poindre de manière très sérieuse, la description de la méthode artificielle de fécondation.
Au départ nous avons un mannequin reproduisant à la perfection le corps du mari. La matière le composant, a la douceur de la peau ainsi que sa chaleur. La figure modelée sur demande est celle de l’intéressé. La femme quand à elle pressant sur un ressort provoque des mouvements cadencés progressifs du pénis factice, et d’une rigidité suffisante. L’évacuation de la liqueur spermatique propulsée au bon moment dans le vagin,créé l’impression du réel,satisfaisant les désirs sexuels par une puissance particulière qui peut aller jusqu’à l’extrême, tout comme si elle avait été allumée par le feu de l’amour le plus intense. Une fois terminée, la femme arrête les mouvements du pénis en appuyant de nouveau sur le ressort. Aussitôt le membre factice se ramollit.
Vache de « poupée gonflable »….à la lecture de cette prouesse technique, il y a de quoi prendre peur ! Drôle de méthode scientifique, où l’homme de science serait un peu semblable au cultivateur, vigilant et averti, qui n’emploie pour « semer » que le grain « le plus lourd et le plus mûr ». Le pire dans l’histoire, c’est que tout cela est dit avec le plus grand sérieux ! Lorsque l’on évoque le terme de « culture » ici, on pourrait très bien utiliser celui d’élevage sauf que dans cette circonstance nous avons affaire à des êtres humains.
Le but de sa pratique, sera d’arriver à la stérilisation pure et simple de tous les porteurs de tares afin d’obtenir les plus purs produits de la race humaine. Ces cruelles divagations se feront réalités quelques années plus tard dans les camps d’exterminations nazis, où de telles expériences, plus monstrueuses encore, furent réalisées au nom du progrès et d la science. Même si au départ, Charville semble agir pour la noble cause en voulant abolir la dégénérescence physique et morale, au final le résultat ne sera que le produit d’un esprit totalitaire et complètement dérangé.
Une société uniformisée, avec des générations de créatures certes « supérieures » mais standardisées, au physique irréprochable. Un monde composé d’hommes de génie, à l’imagination puissante qui surgiront et amèneront le règne de la fraternité des peuples, supprimant ainsi toutes les frontières. Mais est- ce vraiment ce à quoi nous aspirons ? Les fondements de notre civilisation s’écroulent, la fécondation artificielle sélectionnée, prendra le pas sur toute autre forme de reproduction, abolissant ainsi à jamais la notion de sentiments. C’est au rythme de milliers de pénis montés sur pistons que l’humanité sera cultivée, pour la plus grande satisfaction de tous, mais surtout de toutes car dans la majorité des cas pour les maris, c’est l’abstinence qui est de mise.
La machine est l’avenir de l’homme.
Dans ce roman préfacé par le Docteur Edouard Joltrain, celui-ci nous brosse le tableau d’un monde où toute trace de décrépitude humaine, de haine et de médiocrité, sera abolie. En outre nous avons droit et ce pas forcément à bon escient, à une référence à Jules Verne.
Dans cet univers trop parfait dont Charville se veut le créateur, une fois de plus la science parviendra à surmonter bien des difficultés, au détriment finalement du bonheur des hommes. De son idéalisme un peu trop totalitaire, il ne laisse pas la moindre place au libre arbitre ni au hasard. En effet dans ce texte rien ne laisse supposer que certains individus pourraient être choqués par de telles méthodes et de ce fait avoir la possibilité de faire un choix. Il n’en est rien et par conséquent l’œuvre bascule rapidement dans une anti-utopie des plus radicale où un illuminé dicte sa loi que la majorité approuve en étant persuadé que c’est pour le bonheur de l’humanité.
Au sein de cette société qui repose entièrement sur la perfection, il ne restera pas d’autres solutions aux femmes que de recevoir les bonnes grâces d’un pénis mécanique. Si la notion de plaisir reste intacte, le procédé du coup élimine celle des sentiments et de l’amour. Sûrement que pour l’auteur, ne s’agit-il que de concepts trop humains, trop encombrants qui avilissent l’homme et qui n’apportent absolument rien à la « pureté » de la race. Même si au début, certains maris peuvent féconder naturellement une femme, qu’en sera-t-il par la suite ?
Au travers de ce délire « érotico mécanique » l’auteur apporte une solution qui semble intéressante, dont tout le monde parait se satisfaire, mais que se cache-t-il vraiment derrières tout cela ? Probablement la robotique au service du sexe, ou plutôt de la reproduction. Le plus dramatique dans l’histoire c’est que l’auteur semble y croire et même s’il nous livre à la fin de son roman un message de paix, pompeux à souhait, il fallait une bonne dose de naïveté aux lecteurs de l’époque pour ne pas y voir transpirer une forte odeur d’extrémisme : supprimons ou stérilisons les indésirables !
Sous son aspect bon enfant, le ton qui se dégage de tout cela est assez malsain, de grandes idées où la science me semble –t-il, est bafouée au nom des grandes causes. Fort heureusement que certaines inventions sont (involontairement) loufoques et l’on jubile parfois face aux énormités que nous livre l’auteur, comme cette machine à prélever le sperme de « façon astucieuse » et sans aucun contact physique….
Décidemment, la seule masturbation rencontrée dans cet ouvrage sera purement intellectuelle. Ce texte est à rajouter à la petite liste de la thématique abordée dans l’article précédent et qui, malgré la gravité de son sujet (j’entends par là une radicalisation du contrôle des naissances) constitue une pièce peu commune dans l’anticipation ancienne.