Habitué à présent à cette immense fête dinosaurienne qu’est le « Dinoblog » cette année une fois encore l’événement fut à la hauteur de mes attentes. Nos deux amis paléontologues, non content d’être brillant dans leur discipline , se passionnent également pour le domaine de la Savanture en nous gratifiant à chaque cession d’une communication sur le sujet et outre notre ami Marc Madoureau qui fit une brillante intervention sur la thématique des dinosaures au cinéma, j ’ai eu pour ma part l’année dernière l’immense joie de parler des dinosaures dans le roman d’aventure en couvrant une centaine d’année de publication . Mais il faut dire que notre ami Jean, directeur du musée ne manque pas une occasion, et ce, à chaque cession, de nous parler des dérives une peu fantasques de toute une génération d’écrivains pour qui le sujet, à défaut d’être une sujet à traiter avec la plus extrême des rigueurs, se devait de revêtir une forme distrayante pour le lecteur voire humoristique. Alors quoi de plus naturel pour notre très cher ami de clôturer cette version 2019 par une fort sympathique communication sur une question de la plus haute importance « Quand les dinosaures avaient des oreilles ». Sujet fort plaisant et traité d’une manière très rigoureuse avec exemples à l’appui et donc l’occasion de rebondir sur le sujet principal de ce petit papier : « Bulles de Dino »
Imaginez un cadre plus que propice, dans une grande salle où, en son milieu, trônent quelques beaux squelettiques spécimens et une allée, magnifiquement bien agencée en quatre petits espaces où les murs ne sont que reproductions de couvertures, d’affiches, de planches, de dessins et autres papiers colorés, autant de supports pour une magnifique exposition consacrée, comme son nom l’indique, à l’histoire des dinosaures en bandes dessinées. On n’imagine même pas le travail que cela a nécessité tellement cette exposition est riche et représente probablement…… non certainement, l’exposition la plus exceptionnelle sur le sujet !
Déjà, dés votre arrivée vous tombez sur le charme de ce panneau/tapisserie qui reprend en petite format une partie des BD que vous allez pouvoir admirer au sein de l’exposition. Commence alors un voyage dans le temps et dans l’histoire afin de rappeler au bon souvenir du visiteur que la genèse des dinosaures en bande dessinée est aussi ancienne que la découverte de ces illustres mastodontes. Se faisant pour l’occasion archéologues du merveilleux dessiné, nos deux complices , Jean et Christel, sont allés dénichés quelques perles rares, ignorées de toutes et de tous , allant même, grande classe, à réaliser avec quelques vieilles revues devenues introuvables, des albums plastifiés à consulter sur place et délicatement accrochées sur des panneaux afin que le curieux puisse les consulter à sa guise : lorsque l’exposition devient bibliothèque !
Une exposition qui devient alors au fil des reproductions un festival d’images tantôt humoristiques, tantôt de cette beauté surannée propre à ces images anciennes, voire terrifiante au fur et à mesure que nous progressons dans cet espace dédié. Car ici, l’intérêt n’est pas que graphique et purement artistique, il se veut également éducatif et nous sentons , panneaux après panneaux, que rien n’est laissé au hasard et qu’une bonne dose d’éruditions accompagnent les images d’un commentaire à la fois clair, précis , pertinent tout en restant raccord avec l’ambiance générale : humour et décontraction ! Mais il n’y a pas que cela à faire de cet endroit un lieu unique et l’on devine par les objets fait-maison qui ornent chacune des pièces qu’il y a non seulement de l’amour pour le travail bien fait, mais de magnifiques points de repère pour satisfaire encore plus le visiteur et l’inciter à tout regarder dans moindre détail, à savourer le plaisir que les organisateurs ont eu à apporter leur touche personnelle : vitrine pleine de BD dont chaque tranche est visible et vous pousse à regarder les titres (regardez bien il y a même une petite figurine de Rahan que j’aurais bien voulu emporter.) , une autre renfermant une pièce magnifique, un globe coupé en deux et prouvant que la terre est creuse et belle et bien habitée, une autre avec de précieux ouvrages sur les origines avec une splendide sculpture d’une créature antédiluvienne…..tout cela sans parler des affiches, des cadres et des superbes coussins dont deux furent vendus le soir lors de la vente aux enchères et dont l’un fut remporté par un membre du célèbre club des Savanturiers,
Un visite dont on a du mal à se détacher tellement elle fourmille de petits détails cocasses et amusants et comme nos deux amis sont d’une gentillesse extrême, tout cela se termine par le remerciement des auteurs et des éditeurs avec, suprême honneur une mention spéciale pour le club dont j’ai l’honneur d’assumer la présidence et ce n’est pas sans une certaine fierté qu’il y a un peu de nous dans cette exposition qui je l’espère ne restera pas lettre morte et qu’un éditeur inspiré parviendra à en saisir toute l’importance en osant publier cette fort belle et passionnante histoire des dinosaures dans la bande dessinée car il s’agit là non seulement d’une partie intégrante de notre patrimoine culturel, mais qui nous prouve également que science et fantaisie peuvent faire bon ménage . Franchement, n’y a t-il pas plus belle façon que de susciter de nouvelles vocations et donner , spécialité oblige, un bon coup de pinceau sur une discipline que l’on croyait austère et archaïque, mais qui est en fait d’une incroyable diversité et composée d’un panel de scientifiques aussi brillants qu’intéressants et bougrement accessibles .
Un événement à ne manquer sous aucun prétexte et franchement, si vous passez dans le coin, allez y faire une petite visite, parole de Savanturier, vous ne le regretterez pas, en plus vous repartirez avec plein de magnifiques souvenirs achetés dans une boutique à faire craquer tout bon collectionneur qui se respecte (n’oubliez pas le sac « Bulles de Dino » absolument génial.) et avec un peu de chance vous y croiserez Jean et Christel, dites leur que vous venez de notre part, vous allez voir vous passerez une journée somme toute exceptionnelle.
En résumé, une exposition qui ravira aussi bien les explorateurs en herbe que les aventuriers aguerris et vous fera embarquer dans une magnifique machine à voyager dans le temps , madeleine paléontologique où, enfant, vous dévoriez ces magnifiques histoires illustrées , vous transportant dans l’espace et le temps à la recherche de mondes inconnus.
N’hésitez pas à aller faire une petite visite sur leur blog aussi instructif que savoureux: http://www.dinosauria.org/blog/
Il y a des livres comme ça qui lorsque vous les refermez vous laissent un sentiment de satisfaction intense, de celle qui vous imprègne totalement avec cette sensation d’avoir eu entre les mains un objet unique que tout le monde a laissé filer , le laissant dans une ignorance totale et de fait vous l’approprier, le faire votre, comme un trésor caché et dont vous êtes le seul à connaître l’existence.
« La mort de Paul Asseman » de Laurent Mantese, c’est d’abord une couverture de Léo Gontier, une illustration envoûtante et qui résume bien à elle seule l’univers dans lequel le lecteur va se retrouver prisonnier, une maison, une fenêtre éclairée, une brume lactescente où l’on devine des silhouettes fantomatiques qui n’appartiennent pas à notre univers. C’est un paysage éclairé par une lune blafarde au-dessus d’une demeure aux allures d’une Malpertuis des temps modernes. Il y a déjà une ambiance qui se veut résolument fantastique et l’auteur, loin de vouloir berner le lecteur annonce déjà la couleur : le héros de l’histoire quoiqu’il arrive va mourir, ne nous reste plus qu’à découvrir de quelle manière. J’aime lire ce genre d’ouvrage où d’entrée de jeu, on ne tourne pas autour du pot sur plus de 300 pages. On sait comment tout cela va finir, mais le plus important n’est pas de savoir comment, mais surtout pourquoi. C’est ce que va faire Laurent Mantese dans ce texte qui oscille entre fantastique et roman de mœurs dans une écriture bien tassée d’un style époustouflant qui tour à tour vous plonge dans une sorte de mélancolie avec la précision toute chirurgicale de la vie des gens de la campagne dans une nature hostile et fascinante à la fois, pour passer à la terreur pure où il va justement se servir de ce cadre si propice à un climat aux différentes nuances spectrales. Une région où la rudesse des gens est le résultat d’une environnement à la fois hostile et d’une beauté sauvage. C’est l’histoire de plusieurs malédictions à commencer par celle de Paul Asseman qui après la mort tragique de sa femme et de son fils décide de se retirer loin de monde afin d’essayer de plonger dans une amnésie salvatrice, celle de cette maison, un ancien relais de poste, qui par tradition reçoit les différents médecins venus s’installer dans la région et qui abrite en son sein bien des secrets, celle des habitants condamnés à vivre dans cette région oubliée des hommes et qui renferme bien des légendes. C’est aussi et surtout l’histoire d’une médecin de campagne qui pense pouvoir changer le cours des choses, d’un étranger qui, bien que symbolisant le savoir, n’en est pas moins une pièce rapportée , un « gars de la ville » à qui l’on hésite d’accorder sa confiance . Mais c’est avant tout une histoire d’un homme face à ses responsabilités et sa condition d’être humain qui va se retrouver confronté à des situations dont l’étrangeté n’a d’équivalent que la violence par laquelle les phénomènes extraordinaires vont se manifester : tout dans sa cette nouvelle vie semble vouloir aussi bien le happer que le mettre en garde contre quelque chose d’indicible et au fil des pages qui glissent entre vos mains d’une manière effrénée, c’est toute l’originalité d’un fantastique d’une puissance incroyable qui prend forme pour se conclure d’une manière surprenante.
Dans cette nouvelle retraite, véritable entité vivante respirant au rythme de la nature environnante, le héros va tenter d’apprivoiser les murs de cette étrange demeure qui va nous livrer au fil de l’histoire bien des secrets, nous procurer bien des frissons.
Comme je vous le disais au début, Laurent Mantese est un virtuose des mots, il nous entraîne avec brio dans un récit d’une parfaite maîtrise et je retrouve là toute la puissance d’un Claude Seignolle avec ce talent si particulier de nous décrire des choses qui au premier abord insignifiantes, construisent un texte riche de descriptifs aux consonances poétiques, mais de cette poésie que seuls les gens de la terre peuvent percevoir, ressentir et dont il sont les seuls à en comprendre la finalité. Il y a de la musicalité dans son écriture, un rythme d’une sombre beauté, d’une mélancolie rare et qui vous attrape les tripes de sa poigne glacée pour vous laisser haletant, mais avec ce plaisir et ce juste avec des mots, d’être parvenu à vous faire pénétrer dans son univers et d’en partager les sombres menaces. La comparaison avec Seignolle n’est à prendre à la légère, juste placée ici pour faire plaisir à l’auteur ou inciter de potentiels lecteurs, non il y a dans son style une tradition du fantastique propre aux gens du terroir , l’empreinte d’une homme qui puise aux sources même de nos légendes ce terreau si fertile « ce murmure du vent qui se lève, la goutte du ruisseau qui passe et ce frisson de son âme afin de pétrir les choses dont on fait les histoires »
Lire « La mort de Paul Asseman » c’est la garantie de fleurter avec la plume inspirée d’un grand écrivain qui est parvenu à insuffler une âme nouvelle à la littérature de genre et nous donner certainement l’œuvre la plus aboutie sur la thématique de la maison hantée, entre autres, depuis de nombreuses années. Mais je ne vous en dirais pas plus les amis…..lisez le !
Remercions Philippe Gontier et « La clef d’argent » de nous avoir ainsi fait le cadeau d’une aussi belle pépite dans un aussi bel écrin, Laurent Mantese nous avait déjà témoigné de son travail d’écrivain accompli avec « Le comptoir des épouvantes » et « Le rapport Oberlander » aux éditions Mapertuis , voilà qui ne fait que confirmer qu’il est bel et bien un auteur incontournable au talent plus que confirmé.
« La mort de Paul Asseman » de Laurent Mantese Éditions « La clef d’argent » Avril 2019