Le détective de l’étrange est une race hybride provenant du terreau fertile de l’imaginaire qui ne cesse depuis de nombreuses années de créer de nouvelles formes littéraires.
Oscillant entre le fantastique et le récit policier, cette branche dérivée de la littérature dite populaire, manque de réels repères, un peu comme l’enfant abandonné dont on à du mal à trouver les origines. Et pour cause, une fois de plus c’est « une genre dans le genre » et faute d’histoire bien précise, il est un peu à l’image des ses redoutables spectres pourchassés par nos célèbres détectives : il flotte entre deux mondes !
Pourtant les précurseurs furent nombreux et de « Dupin » d’Edgar Allan Poe, au célèbre binôme « Mulder/Scully », prés d’un siècle de chasseurs de fantômes, hantent les rayonnages poussiéreux de nos bibliothèques et envahissent l’espace clos de nos petits écrans. Les auteurs firent preuve alors d’une imagination débordante et l’on tremble devant les exploits de « Carnacki », on frissonne face à « John Silence », on convulse devant les aventures de « Harry Dickson » et on se pâme d’aise à la lecture des exploits de « Sar Dubnôtal »le « Grand Psychagogue ». Car au-delà du personnage central de l’histoire, bien souvent l’auteur nous livre un pur joyau de cette « para-littérature » où se mêlent en un accord parfait, fantastique, policier et parfois même anticipation.
Essayons d’imaginer un seul instant, une aventure de Harry Dickson réalisée par Alain Resnais (projet à l’étude qui ne vit hélas jamais le jour, consulter à ce propos le formidable ouvrage « Repérages » Editions Le Chêne 1974), ou alors un Peter Cushing interprétant « Carnacki » ou Eddy Constantine dans le rôle de « Teddy Verano »….
Des plus célèbres, aux plus anonymes, la quête reste la même : Traquer le mal sous ses différentes formes. Peu importe les moyens utilisés et les motivations de chacun, un seul et unique mot d’ordre va tous les unir à savoir en découdre avec les fantômes, spectres, revenants et autres formes ectoplasmiques.
Du comique au tragique, du médecin tiré à quatre épingle au privé alcoolique, de la supercherie scientifique aux phénomènes paranormaux confirmés, c’est tout un monde « au delà du réel » de maisons hantées, de statues maléfiques, d’êtres possédés, d’objets envoûtés, de matérialisations monstrueuses, de morts effroyables et de vengeances d’outre tombe, qui s’offrent à nous et ce pour notre plus grand plaisir.
Ma première rencontre avec ce singulier chasseur de spectres remonte à des décennies, à l’époque où je m’abreuvais jusqu’à plus soif des formats de poche de la collection « Marabout Fantastique » avec les magnifiques couvertures de Henri Lievens. Je me rappelle qu’une amie m’avait dit « tu devrais lire cela, je pense que cela va aussi te plaire » : j’avais dans les mains mon premier recueil des aventures de Harry Dickson le Sherlock Homes Américain ». Je dois avouer un peu avec honte que j’avais toujours rechigné à lire ses aventures, pensant qu’il ne s’agissait que d’aventures policières, genre dont je n’étais pas particulièrement friand à l’époque. Mais dès la première nouvelle, ce fut un choc et depuis, je n’ai jamais cessé de porter ce détective hors normes dans mon cœur bien qu’à l’époque, j’ignorais totalement l’existence des « détectives des ténèbres. »
C’est la lecture des deux numéros spéciaux de la célèbre et rare revue « Le Fulmar » que j’ai commencé à construire ma propre mythologie du genre. Publiés respectivement en Août/ Septembre pour le N°11 et Décembre 83/Janvier 1983 pour le N° 12, depuis cette date, je ne cesse de réunir tous les ouvrages en langue française appartenant au genre et plusieurs étagères appartiennent désormais à ce genre ou policier et fantastique font bon ménage. Je suis donc toujours extrêmement heureux lorsqu’il m’est possible de rajouter un titre à cette passionnante spécialité et qui plus est lorsque l’auteur ne réside pas très loin de chez moi.
Georges Foveau à qui l’on doit de nombreux ouvrages , et notamment une série « Les aventures d’Albert Leminot » sorte de détective de l’étrange « jeunesse » , des romans de Fantasy, d’essais et d’autres consacrés à la littérature générale, pour en arriver à deux ouvrages qui nous intéressent plus particulièrement : « La société des vieilles têtes à longs chapeaux » et « Théodore Compas le détective de l’étrange, le mystère des Pennes » . Ces deux publications, liées étroitement par la présence du fameux « Détective de l’étrange », sont une bien belle découverte en raison non seulement de l’appartenance à mon genre de prédilection, mais aussi et surtout pour la qualité des objets et la qualité des textes en eux-mêmes.
Si le premier ouvrage mentionné brille pour l’éclat de sa parure, édition cartonnée abondamment illustré de photos et de dessins de Thibaud Langlumé, il l’est aussi comme je le précisais par la présence de notre fameux détective que l’on retrouve dans « Le buveur de foi » ( inclus dans l’ouvrage cité précédemment) et le fascicule « Le mystère des Pennes » . Déjà le terme de « Fascicule » est un enchantement pour les oreilles et on se rappelle avec satisfaction ceux illustrés par Alfred Roloff et bien entendu plus proche de nous, la reprise du célèbre détective dans la collection du Carnoplaste sous la houlette de mon ami Robert Darvel. Une aventure donc qui embaume le midi de la France et construite avec brio autour d’une vieille légende ou abonde malédiction, société secrète, trésor caché…… Cette épopée fleure bon les publications populaires d’antan, mais avec un style calibré aux petits oignons nous révélant un Théodore Compas fort sympathique, aventureux au possible et charmeur à ses heures. On se prête au jeu de l’auteur qui, avec une mécanique bien huilée nous délivre les énigmes au compte goutte, pour terminer par un final digne d’une aventure d’Indiana Jones ……on en redemande !
Mais il ne s’agit pas que d’une autre simple aventure policière aux consonances fantastiques, Georges Foveau est un fin connaisseur du genre et on le devine entre les lignes tout son savoir faire et son érudition en la matière , avec certaines petites allusions dont cette fameuse rencontre avec le célèbre Harry Dickson dans un magasin de curiosités des plus singulier.
Il faut acheter et lire ces deux ouvrages disponibles sur le site « Dark Room » non seulement parce qu’il sont beaux, « Le mystère des Pennes » reprend un format à l’ancienne dans le style des Harry Dickson » mais aussi en raison de cette preuve d’amour envers toute une littérature de genre qui par l’existence de ce type de publications essaye de se démarquer et donner envie au lecteur de tenir entre les mains autre chose qu’un volume formaté à la couverture insipide et au contenu convenu.
Souhaitons de tout cœur que nous retrouverons très prochainement ce très sympathique « Détective de l’étrange » pour de nouvelles aventures et que l’auteur continuera à nous régaler de ces merveilleuses publications avec ce doux parfum suranné d’autrefois.
« Théodore Compas le détective de l’étrange : Le mystère des Pennes » Par Georges Foveau. Disponible sur le site « Dark Rooms »
« La société des vieilles têtes à longs chapeaux » de Georges Foveau et Thibaud Langlumé. Disponible sur le site « Dark Rooms »
Pour commander les ouvrages cliquez sur le lien: http://darkrooms.shop/index.php
Bonjour Jean-Luc,
un grand merci et un joyeux Noël.
Bien à vous.
G.