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« La Presse En Péril Ou La Fin Du Papier ?  » Une Curieuse Prévision Du Crapouillot De L’an 3000

 

Dans cette charmante petite nouvelle toujours en provenance du « Crapouillot de l’an 3000 », l’auteur nous évoque un futur assez cauchemardesque, pour les amateurs de vieux papiers que nous sommes. En « anticipant » la disparition du support écrit au profit de cette sorte de « numérisation » avant l’heure il nous livre ainsi les prémices d’une mort annoncée pour des générations d’amateurs de ce bon vieux journal. Procédé tombant en désuétude et qui semble vivre à l’heure actuelle, comme pour faire écho à cette nouvelle, des moments bien difficiles.

Nous avions déjà évoqué la « disparition du papier  » lors d’un post précédent qu’il vous suffira de lire en cliquant sur le lien.

 

 

Vieux Papiers

 

Regarde, grand-papa, ce que je te rapporte du gre­nier ?

Et mon garnement de petit-fils jette sur mon bureau un tas de paperasses poussiéreuses,

Mandel, lui dis-je avec sévérité, je t’ai défendu de fouiller dans les combles. Tu y salis tes effets,.

Mes yeux se posent sur le paquet crasseux et jauni exhumé par mon petit-fils. Où a-t-il bien pu dénicher cela ? Figurez-vous un amas de grandes feuilles doubles divisées en colonnes et couvertes de caractères d’impri­merie que coupent ça et là des titres. Les premières pages de ces feuilles portent des frontispices variés, de types divers. Je compulse, pris d’une curiosité émue devant ces vestiges d’un passé si lointain.

Qu’est-ce que c’est que ça, dis, hein, grand-papa ?

Les grands-pères ont des trésors d’indulgence pour les

curiosités de leurs -petits-enfants. J’oublie ma réprimande. Et puis, à tenir sous mes doigts ces papiers qui datent de plusieurs siècles, je me sens un peu troublé, comme » lorsqu’on touche des reliques. Mon esprit évoque soudain l’existence primitive de nos ancêtres.

- Mais dis, grand-papa, qu’est-ce que c’est que ça ? Répète Mandel impatient.

- Ce sont des journaux.

-  Des journaux ?

- Oui, ce qui était la presse d’autrefois.

- Dis encore, hein, quelle presse d’autrefois ?

Allons, une fois de plus je n’esquiverai pas les questions embarrassantes, les explications détaillées !

La presse n’a pas toujours été ce qu’elle est aujour­d’hui, mon petit. Aujourd’hui, de minute en minute, les nouvelles mondiales arrivent à domicile par l’inter­médiaire de l’Agence Internationale, et s’inscrivent, automatiquement sur le transparent lumineux que tu vois dans l’antichambre et qui fait partie de l’ameublement à l’instar des chaises et des tables! Les opinions, les com­mentaires des hommes politiques et des journalistes sur les questions du jour te sont fournis par eux-mêmes. A heures déterminées, tu n’as qu’à décrocher le récepteur de l’appareil téléphonique-presse pour entendre leur parole. Mais autrefois ,je te parle d’il y a mille ans ! , la presse était imprimée. C’était ce qu’on appelait les journaux. Il y en avait beaucoup et qui se disputaient les nouvelles , comme si une nouvelle pouvait être jamais monopolisée ! Tu as là sous les yeux les exemplaires de quelques-uns de ces journaux : le Journal, le Matin, l’écho de Paris, le Petit Parisien, le Petit Journal, etc….

Pourquoi ces noms-là, dis ?

C’est ainsi qu’ils se distinguaient les uns des autres. On les achetait tous les matins.

Tous les matins !

Cela te semble extraordinaire que des hommes aient pu attendre vingt-quatre heures, et même davantage, l’an­nonce des événements. Sache que certaines informations étrangères n’étaient connues qu’après deux ou trois jours de délai.

Deux et trois jours !

- Eh oui ! Nos ancêtres n’avaient su tirer de l’électri­cité que de médiocres avantages, et la dépêche, avant d’être mise imprimée sous les yeux du public, subissait dans les salles de rédaction et dans les ateliers de composition une multitude d’opérations qui semblent puériles aujour­d’hui.

Mandel regardait avec vénération ces journaux.

- Vois la date de celui-ci : 1932, c’est l’époque où le fameux dictateur dont- tu portes le prénom fat presque roi de France et d’Allemagne.

Mon petit-fils s’éloigna, rêveur, presque inquiet de sa découverte qui lui révélait des âges extraordinaires. Ce soir-là, en compagnie de ces vieux papiers, je vécus dans le passé des heures amusantes à m’intéresser aux questions mesquines et incompréhensibles qui agitaient et passionnaient les hommes singuliers de cette époque.

 

André Charpentier.

 

Sur l’auteur

Il entre dans le journalisme à 19 ans. Il collabore au « Salut Public », à la « Presse Nouvelle » et à  « l’Homme Libre »  avant de devenir rédacteur du « Matin ». Il produit de nombreux feuilletons et contes pour divers journaux, revues et magazines. Auteur prolifique chez tous les éditeurs populaires, on lui doit chez Ferenczi un personnage pittoresque le policier français assisté de son chien Croûton. Avec ou sans chien, ces romans rondement menés demeurent fort distrayants.

Source : Métro police

 

 

                                                                         Le cauchemar de l’archiviste » Une vision de Lanos

 



« L’immortalité Une Source De Problèmes »: Enquête dans Le Crapouillot De L’an 3000

L’histoire de l’anticipation ancienne est parsemée d’ouvrages où de nombreux auteurs se sont posé la question de l’immortalité où tout  au moins de la prolongation de l’espérance de vie. Alors, à grand renfort de « Sérum de rajeunissement », « D’élixir de longue vie » et autres « machines à ressusciter » l’homme s’est toujours efforcé de trouver une parade à la brièveté de son existence et comme pour  refuser sa condition de simple mortel condamné à la putréfaction de ses chairs, imagina même de substituer certains de ses organes à l’immortelle mécanique. Certains arrivèrent à trouver des solutions, précieux avantage qui ne fut toutefois attribué qu’à l’inventeur lui-même, exception faite de temps en temps pour de rares privilégies. En règle générale, comme en témoigne le texte de Roger Vombal « L’immortel » mis en ligne sur ce blog il y a quelques semaines, il n’est forcément profitable d’user d’un tel avantage. Il, faut dire qu’une terre peuplée d’immortels, risquerait d’engendrer quelques problèmes, dont une surpopulation excessive en serait la conséquence la plus immédiate. Certains savants furent assez conscients du bouleversement social que cela entraînerait, voir la longue nouvelle de Camille Debans « Le vainqueur de la mort », refusant d’accorder son précieux sérum afin d’éviter une surpopulation catastrophique. Alors que faire ? Contrôler les naissances, réserver ce privilège à une élite ? Oui mais laquelle ?

Roland Dorgelès dans cet article paru dans le « Crapouillot » de Noël 1919, dans une jouissif « spécial l’an 3000 » apporte une solution des plus inhabituelle et qui de nos jours,ferait frémir  une morale trop bien pensante.

D’autres articles tout aussi réjouissants suivront dans les jours à venir.

 

Questions Sociales : A quel age faut-il tuer les vieillards ?

 

Le problème de la surpopulation de l’Europe devient chaque jour plus angoissant. L’Amérique, de son côté, malgré ses vastes territoires libres, commence à s’inquiéter. On dirait que le monde étouffe dans ses frontières trop étroites.

Certes, lorsque le docteur Warnod, en 2642, isola le bacille de la mort et parvint à le vaincre grâce à son mer­veilleux sérum, personne ne supposait que ce « sauveur du genre humain », ainsi qu’on l’appelait, en était en réalité le pire ennemi.

Les hommes devenus presque immortels, la terre a été bientôt trop petite pour les héberger tous et il fallut envi­sager la destruction des habitants en surnombre.

Or, toutes les lois votées à cet effet jusqu’à présent n’ont donné satisfaction à personne et n’ont pas abouti à grand- chose. Elles n’ont fait que semer des germes de révolution.

Le plus rationnel eut été de décréter la mise à mort des vieillards à un âge-limite fixé par décret. Mais les hommes d’Etat, tous âgés, ont craint pour leurs jours, et ont préféré prescrire la mise à mort des jeunes gens que la leur. C’est d’ailleurs ce qui motiva en partie le renversement du pou­voir réactionnaire des Soviets, le siècle dernier.

Depuis, vingt lois se sont succédées, toutes aussi burles­ques, toutes inefficaces.

La dernière, qui nous régit encore, est celle du Sacrifice d’arrondissement. Le Journal officiel désigne tous les huit jours l’arrondissement condamné, et les habitants doivent se rendre à leur mairie avant midi pour y être électrocutés. Mais ce système est inique.

D’abord les politiciens et leurs amis échappent toujours, avertis à temps qu’il faut déménager. Enfin trop de déroga­tions ont été introduites au bénéfice des classes possédantes, si bien que le peuple seul est toujours sacrifié.

C’est pour remplacer cette loi impopulaire que les Etats Généraux ont demandé au Conseil des Philosophes d’étudier un nouveau projet. Nous croyons savoir que celui-ci récla­merait la mise à mort automatique des vieillards.

Une seule question demeure en suspens : à quel âge faudra-t-il les tuer? C’est ce que devra établir la prochain assemblée, et la discussion promet d’être orageuse, les membres du Groupe des Anciens ayant intérêt – un intérêt  capital – à ce que cet âge soit le plus avancé possible. Cependant beaucoup d’entre eux semblent d’ores et déjà condamnés, notamment le doyen, M. Paul Vaillant-Couturier, descendant du fameux tribun du siècle de Picasso, qui siége à l’Assemblée depuis plus de trois cent soixante ans.

Il est à craindre, si le projet n’est pas voté, que des trou­bles sanglants ne se produisent. Nous assisterions alors à une hécatombe de vieillards sans précédent dans l’histoire.

Ajoutons que pour donner l’exemple, deux vieillards se sont pendus hier, aux acclamations de la foule, dans le square Mac-Orlan. Leurs corps ont été pétrifiés et seront exposés toute la journée au foyer du Cinopéra.

 

 



Bibliographie Des Ouvrages De Références Sur L’anticipation Ancienne » Chapitre Trois

 

Aujourd’hui quatre nouvelles références et tout autant d’ouvrages indispensables afin de parfaire vos connaissances sur certaines oeuvres phares de l’anticipation ancienne. Des ouvrages à l’usage de l’érudit , mais aussi et surtout au  novice désirant  en savoir un peu plus sur cet univers incroyablement riche et passionnant.

 

« Guide de nulle part et d’ailleurs à l’usage du voyageur intrépide en maints lieux imaginaires de la littérature universelle » De Gianni Guadalupi & Alberto Manguel.  

J’espère très sincèrement que vous possédez sur les étagères bien garnies de vos bibliothèque cet ouvrage absolument indispensable et unique en son genre, sous la direction de Gianni Guadalupi & Alberto Manguel. En véritable dictionnaire des lieux de la littérature de l’étrange et du bizarre, il vous sera possible de faire un voyage assez insolite de tous ces endroits imaginaires de notre genre de prédilection. De la lettre A comme « Abaton » à la lettre Z comme « Zuy », il vous sera possible de faire (entre autre) un détour par « Sèléne » de la Paul Féval et de sa ville vampire, le quartier de « Sainte Beregonne » de Jean Ray, « Pellucidar » de Burroughs, la « Zuvendis » de H.R.Haggard, la  « Farandoulie » de Albert Robida, « L’ile au sable vert » de Tancréde Vallerey, « La cité des ténèbres » de Léon Groc, « Euphonia » de Hector Berlioz ou encore « Paroulet »de « La cité des premiers hommes » de Maurice Champagne. Lovecraft, Rabelais, Tolkien, Verne, Wells, Huxley, Borges, des auteurs connus et inconnus comme s’il,en pleuvait . Au total Des centaines de titres et de références, j’en découvre encore après plusieurs années, tout cela agrémenté de cartes,plans dessins et autres  gravures. Un ouvrage certes incomplet, tant le sujet est vaste, mais une expérience unique et qui ne peut qu’enrichir notre connaissance des mondes imaginaires. Éditions du Fanal. Très nombreuses gravures, cartes, plans et illustrations N&B Préface de André Dhotel. 1981.410 pages.

 

« Le petit détective » de G. &T.Thomassian. Pour connaître le détail de cette sympathique revu qui ne connut que 8 numéros je vous renvoie au billet que je lui ai consacré l’année dernière avec tout les détails sur son contenu. Elle se consacra uniquement à la littérature populaire et fut l’occasion sur l’ensemble de ses numéros, de donner l’occasion à Joseph Altairac de l’alimenter de quelques résumés, présentés sous forme de thématiques, et consacrés à l’anticipation ancienne. Date de parution de 1985 à 1991

 

« L’exploration imaginaire de l’espace » de Lucian Boia. Un ouvrage vraiment extraordinaire où, comme son titre l’indique, l’auteur s’est lancé à la conquête spatiale romanesque, des origines jusqu’à la période transitoire où l’on pensait encore que la lune ou Mars étaient encore habités. L’auteur nous décrit vraiment cette approche par l’imaginaire comme une véritable « colonisation » du système solaire où les « sauvages » Martiens ou Vénusiens remplacent les pacifiques habitants des pays reculés. L’homme voulant repousser les limites d’une terre devenue trop étroite et parfaitement cartographiée, par désir de conquête et de soif d’aventures, s’élancera à l’assaut des étoiles. Une place important sera accordée aux écrivains de la fin du 19éme au début du 20éme,tout cela agrémenté d’une iconographie riche de plus de 140 reproductions de dessins en N & B: Un must!Editions La Découverte 1987, 160 pages.

 

« La fin du monde, une histoire sans fin » de Lucian Boia. Toujours sur le même principe que l’ouvrage précédent, l’auteur nous dresse un tableau apocalyptique de la fin de notre bonne vieille terre et analysée au travers de textes et d’études « sérieuses » mais aussi et c’est ce qui nous intéresse en nous dressant un petit inventaire d’œuvres conjecturales anciennes ou les auteurs ont anticipés sous différentes déclinaisons la fin de l’humanité (Guerres, catastrophes naturelles, révolutions etc. …. Editions la découverte 1989.

 

 

Bibliographie Des Ouvrages De Références Sur L'anticipation Ancienne

 

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Le Roman Scientifique Français: Une Source D’inspiration !

Tout le monde se souvient de la préface de Pierre Versins à la réédition du roman de Gustave Le Rouge « Le prisonnier de la planète Mars »  et « La guerre des vampires » paru chez Jérôme Martineau et intitulé » : « Qui à copié ? » Le célèbre encyclopédiste faisait le parallèle entre le célèbre texte de Le Rouge et celui d’un autre écrivain , peut-être un peu moins connu, en partie parce que son ouvrage ne fut jamais réédité : H.Gayar. En effet dans « Les aventures merveilleuses de Serge Myrandhal » publié en 1908 ( en deux volumes) on retrouve des similitudes de thématiques et d’idées avec le roman de Le Rouge également rédigé en deux parties et paru de la même manière en 1908.

Sans parler de plagiat, Versins met le doigt sur une de ces énigmes littéraires qui, loin de soulever la polémique ne font que renforcer l’éventuelle possibilité de croisements d’idées, reste à déterminer dans le cas présent le dénominateur commun, car il est avéré qu’un autre roman, de Jean de la Hire  cette fois et intitulé « La roue fulgurante » serait également à joindre à ce passionnant dossier.

Toutefois, Versins reste plus ferme et accusateur en ce qui concerne une autre similitude entre deux textes fort connu des amateurs : « La force mystérieuse » de J.H.Rosny Aîné et « Le ciel empoisonné » de Sir Arthur Conan Doyle. Les deux romans datent de 1913 en parution en pré originale en revue, « Je sais tout » pour le premier et « Le strand magazine » pour le second. Toutefois la légère antériorité du roman de Rosny Aîné, laisse planer un doute et l’on ne peut effectivement que se poser quelques questions en regard des fortes ressemblances qui existent entre les deux romans. L’auteur de « La guerre du feu » s’explique assez clairement dans l’avertissement que vous trouverez dans l’édition de 1914, paru aux éditions Plon Nourrit & Cie et dont il vous sera possible de lire le contenu à la suite de cet article.

Un autre affaire tout aussi étrange se produisit également pour un roman de Théo Varlet «  La grande panne » et qui fut signalée en son temps par un des tout premier spécialiste de la science fiction en France : Régis Messac. Habitué à la lecture des nombreux « Pulp’s » qui paraissaient aux États-Unis, il releva un texte dont le contenu lui rappelait fort l’ouvrage de Varlet. En grand connaisseur du genre, il fit vite le rapprochement et en informa l’intéressé qui dans la deuxième éditions du roman expliqua dans un « Avant propos » comment fut relevé cette sorte de plagiat.

Le roman scientifique qui fut pendant longtemps taxé pour son manque d’originalité et sa « faiblesse » par rapport à la production Américaine de l’époque semble pourtant, à partir de ses deux exemples les plus significatifs, faire l’objet de toutes les attentions de leurs homologues d’outre atlantique, par la hardiesse de leur thématique et l’originalité des idées avancées. Combien de textes similaires qui furent l’objet de quelques « emprunts » dorment encore bien cachés à l’abri des milliers de références, dans l’attente d’une exhumation possible. Sans vouloir faire preuve d’un « patriotisme » exacerbé en voulant proclamer haut et fort (mais vous connaissez tous mon engagement pour l’anticipation ancienne d’expression Française) que notre pays peut se targuer d’avoir la primeur de posséder une « proto-Sf » unique et originale et d’entrer dans un débat fort passionnant qui pourrait être l’objet à mon avis d’un future « conférence » lors d’un prochain festival de l’imaginaire, il me paraissait important et salvateur de signaler une fois encore ces quelques faits qui, loin de vouloir dénoncer une forme de plagiat  peu scrupuleuse ( et je pense que cela fonctionne pour notre domaine dans les deux sens) peuvent démonter à quel point nos auteurs furent en avance sur leur temps.

Tout un monde qui nous reste encore à découvrir et à faire partager avec peut- être le fol espoir de conquérir tout un public qui dans une méconnaissance totale du genre par manque d’un support historique et bibliographique (mais il semblerait que ce dernier soit en bonne voie) reste encore dans l’ignorance d’œuvres aussi fondamentale que celle de Rosny, Renard, Couvreur, Varlet, Spitz…..et bien d’autres encore qui sommeillent en rêvant.


 

Avertissement de l’auteur à la parution de « La force mystérieuse » en volume aux éditions Plon Nourrit &Cie en 1914.

Le 11 mars 1913, un ami américain m’adressait le billet suivant :

« Avez-vous cédé à un écrivain anglais, et des plus célèbres, le droit de refaire votre roman qui paraît actuellement dans Je sais tout; lui avez-vous donné le droit de prendre la thèse et les détails, comme le trouble des lignes du spectre, l’excitation des populations, les discussions sur une ano­malie possible de l’éther, l’empoisonnement de l’humanité …tout?

« Le célèbre écrivain anglais publie cela en ce moment sans vous nommer, sans aucune référence à Rosny aîné, en plaçant la scène en Angleterre. »

A la suite de cette lettre, je parcourus le numéro du Strand Magazine, où mon con­frère britannique, M. Conan Doyle, com­mençait la publication d’un roman intitulé : « The Poison Belt ». Effectivement, il y avait entre le thème de son récit et le thème du mien des coïncidences fâcheuses, entre autres le trouble de la lumière, les phases d’exalta­tion et de dépression des hommes, etc. ; — coïncidences qui apparaîtront clairement à tout lecteur des deux œuvres.

J’avoue que je ne pus, vu l’extrême parti­cularité de la thèse, refréner quelques soup­çons — d’autant plus que, en Angleterre, il arrive assez fréquemment que des écrivains achètent une idée, qu’ils exploitent ensuite à leur guise : quelqu’un avait pu proposer mon sujet à M. Conan Doyle.  Certes, une coïncidence est toujours possible et, pour mon compte je suis enclin à une large con­fiance. Ainsi, j’ai toujours été persuadé que Wells n’avait pas lu mes « Xipéhuz », ni ma « Légende sceptique », mon « Cataclysme », qui parurent bien avant ses beaux récits. C’est qu’il y a dans Wells je ne sais quel sceau personnel, qui manque à M. Conan Doyle. N’importe, mon but n’est pas de réclamer. Je tiens pour pos­sible une rencontre d’idées entre M. Conan Doyle et moi, mais comme je sais, par une expérience déjà longue, qu’on est souvent accusé de suivre ceux qui vous suivent, j’es­time utile de prendre date et de faire remar­quer que « Je sais tout » avait déjà fait paraître les deux premières parties de la Force mysté­rieuse quand « The Poison Belt » commença à p ai ire dans le « Strand Magazine ».

 J.H.Rosny aîné

 

Avertissement de l’auteur à la réédition de « La grande panne » paru à « L’amitié par le livre » en 1936

Ce présent roman, la Grande Panne, a paru pour la première fois aux Éditions des Portiques, en octobre 1930.

Or, en octobre 1931, donc un an après, parut dans un magazine américain, Wonder Stories (Histoires mer- veilleuses), urne nouvelle signée Rowley Hilliard : « Death from the Stars » (la mort venus des étoiles J, dont Vidée initiale ressemble singulièrement à celle de La Grande Panne. (Deux savants, Julius Humboldt et George Dix on, découvrent une poussière mystérieuse dans un météore. Cette poussière mystérieuse est urne forme de vie élémentaire. Elle se développe aux dépens de la vie terrestre. Les végétaux sont brûlés, leurs feuilles deviennent noirâtres. Les humains sentent d’a­bord des démangeaisons, puis des brûlures. Dixon meurt dans des souffrances atroces. Humboldt comprend le danger ; mais il est lui-même atteint, tellement atteint qu’il peut à peine remuer. Il trouve cependant la force d’arroser de pétrole le cadavre de Dixon, son lit, le cottage et le jardin, et toute la zone contaminée ; puis il s’enferme à double tour et met le feu. On attribue son suicide à la folie.

Cette nouvelle eut beaucoup de succès. Les lecteurs réclamèrent une suite. M. Hilliard leur donna satisfac­tion, et la deuxième parut quelques mois plus tard dans- le même magasine.

Au reste, s’ils sont bien évidemment inspirés de mon roman, ces deux récits sont d’une rudesse toute yankee, et tous deux tournent au macabre.

Dans l’état actuel de la législation américaine, je n’aurais pas grand’chance d’obtenir une compensation pécuniaire pour cet acte de « piraterie ». Mais, tout comme le maître J. II. Rosny aîné Va fait pour son roman la Force Mystérieuse, j’ai cru devoir établir ici ma priorité par ce rappel des faits, en tête de cette nou­velle édition de la Grande Panne.

Et je remercie mon bon confrère ès-anticipations Régis Messac, romancier, traducteur et historien de la littérature d’imagination scientifique, qui a eu l’amabi­lité de me signaler ce plagiat.

P. S. — Un roman intitulé Les Naufragés d’Eros et formant « suite » à La Grande Panne paraîtra pro­chainement chez un éditeur qui reste encore à trouver *

Thé Varlet

 

* Roman qui paraîtra en 1943 chez « L’amitié par le livre » sur le titre « Aurore Lescure pilote d’astronef »

 

 

Le Roman Scientifique Français: Une Source D'inspiration ! dans en feuilletant les revues laforcemystrieuselagrandepanne dans en feuilletant les revues

 

 

 



« La Cité Des Tortures » René Thévenin à L’honneur Dans Le N°19 Du « Visage Vert »

Je viens enfin de commencer l’excellent dernier numéro de la non moins passionnante revue « Le visage vert ».Placé sous le signe des inédits de la revue « Le journal des voyages » je dois avouer que je ne fus pas déçu par le premier texte « La cité des tortures » rédigé par un habitué de la conjecture ancienne et que certains de nos membres connaissent depuis déjà depuis de longues années : René Thévenin. Ce texte publié du N° 518 (4 Novembre 1906) au N° 521  (25 Novembre 1906) est une pure merveille de cruauté et de sadisme, comme l’auteur nous avait peu habitué à ce jour. Placé sous le signe du « péril jaune », les deux héros vont découvrir une bien mystérieuse cité souterraine, habitée par de redoutables et cruels asiatiques, dont le rêve de suprématie sur l’empire occidental, vont les conduire à commettre sur leurs victimes des supplices d’un « rare raffinement ». Une longue nouvelle profondément xénophobe (les chinois peuplant cet empire caché sont comparés à « des rats grouillants ») et qui laisse peu de place au « politiquement correct », contexte de l’époque oblige…. Le texte est d’une rare violence pour l’époque et l’auteur nous plonge dans cette sorte d’enfer à échelle humaine où les deux protagonistes vont découvrir bien des atrocités.

Mais je ne voudrais pas vous en dire plus afin d’éviter de vous en révéler plus qu’il n’en faut. Il ne vous reste plus qu’une chose à faire, vous précipiter vers cet indispensable N° 19 avec en prime une fort passionnante étude comme il se doit de Michel Meurger  et intitulé « Célestes ou infernaux ». Il nous retrace la genèse de cette peur phobique des populations asiatiques et plus particulièrement chinoises qui, de la fin du XIXéme siècle à la première moitié du XXéme, n’a cessée de nourrir non seulement nos peurs les plus profondes mais également notre fascination quelques peu morbide au travers d’œuvres essentielles, fruits d’écrivains qui n’hésitèrent pas d’user et parfois même d’abuser d’une imagination quelque peu cauchemardesque. Michel Meurger fera à la suite par un habile rapprochement entre les caïmans illustrant la couverture et l’énigme cryptozoologique que constitue le dragon et le serpent de mer, un lien avec ce bien curieux animal indissociable au roman d’aventure et mettant en avant les mystères de l’orient.

Une excellente nouvelle au final qui en dépit des particularités décrites un peu plus haut, reste encore parfaitement lisible de nos jours, constituant avec « Le triangle rouge » de  Fernand Noat 1902) et « Mystère ville » de William Cobb (1904) une des œuvres les plus originales de cette revue .

Une raison supplémentaire pour mettre en ligne d’ici peu un article paru dans la revue « Je sais tout » du 15 Mars 1905 (N°2) et intitulée« Le péril jaune ». Tout un programme !

 

Sommaire du N°19 du « Visage vert »:

 

- « La cité des tortures » Longue nouvelle de René Thévenin.( Illustrée par Conrad)

- « Célestes ou infernaux » articles de Michel Meurger faisant suite à la précédente nouvelle.

- « L’oiseau gris » Nouvelle de Harry de Windt.

- « Un bestiaire de la cruauté » articles de Michel Meurger faisant suite à la précédente nouvelle.

- « La vérité toute la vérité, rien que la vérité » Nouvelle de Rhoda Broughton.

- « Le voyage » de Ernst Raupach.

« En Cimaise : Jacques Leclerc » passionnant article par François Ducos sur ce peintre- illustrateur complètement oublié de nos jours mais qui réalisa pourtant de magnifiques couvertures pour des collections diverses et variées ( Policiers, amour, drame, aventure, érotique…)

- « Le joyau du Nord »  Nouvelle de H.V.Chao.

- « Curieux assassinat du professeur Gusmaër » Nouvelle de Théophile Bergerat

 

Une fois de plus un numéro incontournable pour la qualité de ses nouvelles et la pertinence de ses thématiques. Merci à toute l’équipe!

 

 

 

 Superbe couverture de Conrad qui illustre une des nombreuses scène épouvantable de cette « Cité des tortures » la bien nommée!

levisagevert dans en feuilletant les revues

 

 

 



« La Littérature Fantastique & Terrible » De Gaston Deschamps

 » Le chien des Baskerville » Une scène de Conan Doyle, un des chefs-d’œuvre du genre fantastique moderne: L’apparition du chien effrayant dont vla vision terrorise une famille depuis des siècles.

Avec cet article provenant de la revue « Je sais tout » N°8 Septembre 1905, Gaston Deschamps nous livre ici ses impressions sur un genre qui peine encore en France à trouver ses marques et une dénomination bien précise. L’auteur n’est pas un spécialiste du genre, bien que scientifique de formation puisqu’il  exerce le métier d’archéologue, et il va donc nous donner ici un petit aperçu de ses lectures « terribles » dont la dénomination de « Fantastique » sera utilisée faute d’une autre terminologie adéquate. Classification un peu expéditive mais en regard du contenu assez justifiée pour l’époque puisque effectivement elle génère l’épouvante. Car il nous parle bien ici d’une littérature qui suscite la peur et l’effroi et il ne considère pas ces « dérives » littéraires comme le produit d’une science voulant coûte que coûte repousser les limites du possible mais comme des visions cauchemardesques provenant d’un esprit imaginatif. Il conserve une vision paradoxalement assez cartésienne de cette littérature, le prétexte n’est pas scientifique mais purement fantasque puisqu’elle fait partie intégrante de notre héritage collectif, nourri par les légendes et notre appréhension viscérale pour l’inconnu. Une vision qui peut parfaitement s’appliquer pour « Le chien des Baskerville » ou « Au fond de la mer » mais il en  est  tout autrement pour des textes comme « L’île du Dr Moreau », « L’homme invisible » et dans une certaine mesure « La guerre des mondes » et « Les premiers hommes dans la lune ». L’auteur va d’ailleurs échafauder de bien timides hypothèses sur le devenir de la conquête spatiale et du voyage dans les autres planètes.

IL est également curieux que le choix de l’auteur se soit porté uniquement sur des auteurs Anglais, mais il faut reconnaître que Wells avait une forte et solide réputation et que la qualité de ses textes ne fait aucun doute et qui plus est, l’ensemble de ces textes essentiels étaient déjà disponibles chez divers éditeurs, ce qui n’était pas le cas pour Conan Doyle dont l’œuvre « fantastique » fut écrite bien après cette période. Les textes Français existant à cette période n’étaient pas encore (re) reconnu pour bénéficier ainsi d’une certaine forme de reconnaissance, mis à part peut-être la production de Rosny Aîné et bien évidement de Jules Verne qui sera également cité ici de façon fort timide.

 Il est enfin à noter que les magnifiques compositions de Henri Lanos ne font que renforcer tout l’intérêt des amateurs du genre pour cette « Littérature fantastique et terrible »

 

 

La littérature Fantastique et Terrible

De tous temps, des écrivains ont cherché à communiquer dans leurs oeuvres le frisson de la terreur et du mystère. Mais cette tendance a pris, ces dernières années, dans les pays anglo-saxons, sous la double influence du grand écrivain Edgar Poe et du grand vulgarisateur français Jules Verne, une extension considérable. L’éminent critique Gaston Deschamps a bien voulu exposer ici un pittoresque aperçu des œuvres et des idées les plus étranges et les plus typiques qu’a suscités cette orientation nouvelle de la littérature.

 

Lorsqu’on voyage dans l’île de Java, et qu’après avoir mangé des huîtres cuites au vin blanc et des confi­tures de gingembre, à l’ombre des muscadiers, des kolas et des ca­caos dans les merveilleux jardins de Buitenzorg, on va voir les idoles des temples bouddhiques, on est surpris par le caractère véritablement effrayant que prend, dans cet étrange pays, la manifestation plastique de l’idée reli­gieuse. Les dieux ventrus de ce panthéon difforme sont, presque tous, des croque- mitaines ou des pères fouettards. Ce sont d’affreux bonshommes, coiffés de mitres en forme de pagodes, et pourvus, presque tous, d’une quadruple tête aux yeux exorbités. Ils ont des langues de feu dont le dard fourchu a l’air de menacer et de narguer les multitudes effarées. Leurs abdomens sont proéminents et agressifs, leurs mâchoires sont grimaçantes ; leurs dents sont extraordinairement canines. C’est India et son gourdin écarlate, Broena et ses ongles griffus, et toutes sortes d’idoles effrayantes qu’inventa le bizarre génie des Hindous, en quête d’épouvante et en frénésie de laideur.

L’humanité, même en dehors des pays jaunes, éprouve, apparemment, le besoin d’être terri­fiée.

C’est pourquoi, il y a toute une littérature destinée à nous procurer des sensations horrifiques. Cette littérature s’est particulièrement enrichie, dans ces dernières années, par l’importante contribution qu’y ont apportée les romanciers anglais.

 

En plein mystère et en plein effroi. Le type du policier Sherlock Holmes.

Le docteur Conan Doyle, par exemple, est un maître inventeur en fait de terreur. On ne saurait lire dix pages du roman intitulé « Le Chien des Baskerville », sans frissonner d’inquié­tude. Ah! le terrible chien, que ce chien-fan­tôme !

La famille Baskerville est une des plus riches et des plus considérées du Devonshire. La mort tragique de sir Charles Baskerville a causé récemment, dans ce comté, une émotion profonde. Sir Charles était un esprit supérieur, très pénétrant, à la fois spéculatif et pratique. La courtoisie de ses manières, la chevale­resque générosité de son cœur lui avaient concilié l’affection et le respect de tous. Au moment où il mourut, il était désigné comme le candidat probable du parti libéral aux pro­chaines élections de Mid-Devon.

Sir Charles Baskerville, lorsqu’il habitait sa résidence champêtre de Baskerville Hall, avait coutume de se promener, chaque soir, dans la fameuse allée des Ifs, qui est une des principales attractions de cette maison sei­gneuriale. Un soir de printemps (c’était exac­tement le 4 mai) sir Charles partit pour sa promenade habituelle. Il fumait un cigare que son valet de chambre, un nommé Barrymore, a vu longtemps luire dans le clair obscur de l’allée des Ifs. Il avait manifesté le dessein de partir, le lendemain, pour Londres, et même, il avait recommandé à Barrymore de bien pré­parer ses bagages.

On ne le vit pas revenir. A minuit, Barry­more, ayant constaté que la porte du château était encore ouverte, alluma une lanterne et se mit à la recherche de son maître. Le sol de l’allée des Ifs avait été détrempé, dans la journée, par des averses. La trace des pas de sir Charles était imprimée dans la terre mouillée. On suivit ces empreintes jusqu’à une barrière qui, vers le milieu de la bordure des ifs, s’ouvre sur la lande. Une série d’em­preintes plus profondes démontrait que sir Charles Baskerville avait stationné quelque temps en cet endroit. Il avait dû reprendre sa marche, car on ne retrouva son cadavre que beaucoup plus loin…

 

Tels sont les faits extraordinaires que le docteur James Mortimer, médecin dans le Devonshire, vient raconter au célèbre Sher­lock Holmes, qui est le héros favori du roman­cier Conan Doyle, et qui excelle, par simple plaisir d’amateur, dans les investigations de police.

Sherlock Holmes a une manière de procé­der qui n’appartient qu’a lui, et qui aboutit presque toujours à des résultats merveilleux. Et il n’aime que les enquêtes qui ont quelque chose de bizarre et de fantastique. Il travaille par amour de l’art et non point pour gagner de l’argent.

Sherlock Holmes prêta une oreille attentive au témoignage du docteur Mortimer, qui résuma sa déposition en ces termes effrayants :

« Sir Charles était étendu, la face contre terre, les bras en croix, les doigts crispés dans le sol et les traits convulsés sous l’em­pire d’une violente émotion, que j’aurais à peine osé certifier son identité. Le corps ne portait aucune blessure… Mais la déposition de Barrymore est incomplète. Il a dit qu’au­près du cadavre il n’existait nulle trace de pas… Il n’en avait pas vu… Elles ne m’ont pas échappé, à moi… nettes et fraîches… à quelque distance du lieu de la scène!…

- Des empreintes de pas?

- Oui, des empreintes de pas.

- D’homme ou de femme?

- Monsieur Holmes, j’ai reconnu l’em­preinte d’une patte de chien gigantesque!

C’est sur cette donnée effarante, que Sher­lock Holmes s’engage, avec son flegme habi­tuel, dans la plus dramatique des enquêtes. Il apprend, d’abord, que les paysans du Devon­shire se racontent, entre eux, le soir, à la veillée, une histoire à faire dresser les che­veux sur, la tête des personnes chauves.

Sachez qu’au temps de la grande Révolution d’Angleterre, le sire Hugo de Baskerville était un des plus terribles gentilshommes de la Grande-Bretagne. Franc païen, il faisait de sa vie deux parts, dont il passait l’une à ne rien faire, l’autre à mal faire. En son manoir de Baskerville, sinistrement éclairé par l’illumi­nation des orgies nocturnes, et toujours retentissant de cris et de blasphèmes, il buvait des boissons défendues, il chantait des chan­sons sacrilèges, en compagnie de deux ou trois seigneurs, dignes de mener avec lui cette vie infernale.

Or, par une sombre nuit, Hugo de Basker­ville, dans la plus haute chambre de son don­jon, se réjouissait d’une façon diabolique, avec les compagnons habituels de ses exé­crables divertissements. Ayant accompli, ce jour-là, la plus mauvaise action de sa vie, il était très content de lui-même. Il avait enlevé, dans une ferme voisine, la fille d’un honnête cultivateur, et il avait enfermé sa prisonnière dans une tourelle verrouillée et cadenassée, où la pauvre captive pleurait, sanglotait, fris­sonnait, en entendant les horribles échos de l’orgie voisine. Lorsque le sire de Baskerville, ayant suffisamment bu, mangé, vociféré avec ses affreux camarades, remonta dans la tou­relle, il poussa une épouvantable imprécation. La prisonnière était partie. Elle s’était sauvée par une étroite fenêtre; et s’accrochant tant bien que mal aux lierres qui tapissaient le château maudit, elle avait pu descendre jus­qu’à terre, et s’enfuir à travers la lande. Alors une idée véritablement satanique s’offrit à l’imagination de Baskerville et des ivrognes qui l’accompagnaient. « Par tous les monstres de l’enfer! s’écria-t-il, je jure de rattraper ma proie… Sinon, je fais le serment de me donner au diable, corps et âme… » Et l’on vit une chasse fantastique, vertigineuse, démo­niaque, se déchaîner, sous la clarté morne de la lune, à travers les campagnes hallucinées. Les chevaux galopaient, les chiens aboyaient, les chasseurs faisaient entendre les plus épou­vantables clameurs. Hugo, sur un cheval forcené, courait avec frénésie. Ses compagnons l’ayant perdu de vue, interrogèrent un berger qui errait sur la lande, et qui, enveloppé par la clarté lunaire, ressemblait à un revenant…

- Ah! répondit ce berger, j’ai vu l’infortunée jeune fille, poursuivie par la meute du sire Hugo. Mais j’ai vu aussi un grand chien noir galoper en silence derrière le sire de Baskerville; et je prie le ciel de ne jamais voir sur mes talons, un mâtin de cette taille, et endenté aussi terriblement !…

Les cavaliers, en écoutant ce récit, senti­rent que leur sang se figeait dans leurs veines! Et quelle ne fut pas leur angoisse, lorsque, plus loin, ayant mis pied à terre, ils virent, au fond d’un ravin, la jeune fugitive, morte de peur, et à côté d’elle, le sire de Basker­ville, terrassé par un énorme chien noir, qui le tenait à la gorge. Ce chien, au moment où les cavaliers s’arrêtèrent, glacés d’horreur, tourna vers eux une gueule si rouge et des yeux si ardents, que l’un d’eux mourut sur la place, et que les autres restèrent fous jusqu’à la fin de leurs jours.

On conçoit, dès lors, l’émotion avec laquelle le bon docteur Mortimer raconta à Sherlock Holmes, l’observation qu’il a faite d’une trace de « chien gigantesque », à l’endroit où l’on trouva le cadavre convulsé de sir Charles…

 

L’art, on pourrait presque dire le procédé, du romancier Conan Doyle, consiste à ramener aux proportions d’un fait divers, aisément intelligible, les données horrifiques, qui sont les prémisses de ses récits. On trem­ble, on frémit, on s’effare. Et puis, on finit par comprendre, ce qui est la meilleure manière de se rassurer.

L’enquête de Sherlock Holmes aboutit à des résultats positifs. La légende du « chien des Baskerville » s’explique, comme toutes les légendes, par la faculté d’agrandissement et de transfiguration qui caractérise l’imagination populaire. Quant au chien effrayant qui, plu­sieurs siècles après la fin tragique du sire Hugo, fut cause de la mort imprévue de sir Charles, il existait effectivement. On l’enten­dait, fort distinctement, hurler tous les soirs sur la lande. Les paysans affirmaient qu’il lançait du feu par la gueule et par les yeux. Cet animal était un grand chien, enduit d’une préparation phosphorescente par un certain Stapleton, naturaliste très savant et non moins méchant, dont le château était situé tout près du château des Baskerville. A la vue de ce chien phosphorescent, sir Charles, qui était atteint d’une affection cardiaque, était mort, tout simplement de la rupture d’un anévrisme.

 

lanos2 dans en feuilletant les revues

 » Une création littéraire fantastique: Les bras d’un Martien » : Les Martiens sont munis d’énormes tentacules extensibles qui peuvent pénétrer par une porte simplement entrebâillée et fouiller les coins les plus reculés avec leurs colossales mains.

 

Le créateur le plus fécond du fantas­tique et de l’invraisemblable : Wells

L’art de H.-G. Wells, romancier, prophète et réformateur, l’auteur de « La Guerre des Mondes » et de « L’Ile du docteur Moreau », s’exerce moins dans le domaine de l’horrifique et de l’effrayant, que dans les régions illimitées du surnaturel, du fantastique, du possible et de l’impossible.  « La Guerre des Monde »s est l’invraisemblable tableau d’une lutte cosmique, qui met aux prises les habi­tants de la planète Mars et les habitants de la terre. L’imagination du conteur s’est donné carrière, vertigineusement, dans l’évocation de ces Martiens qui descendent chez nous, par une belle nuit d’été, dans un cylindre, comme firent autrefois les Grecs chez les Troyens, dans un cheval de bois. La figure d’un Martien est telle qu’on ne saurait en affronter l’aspect sans être pétrifié de stupé­faction. Représentez-vous une sorte de masse ronde, avec deux grands yeux sombres, qui regardent fixement. Les Martiens n’ont pas de nez. Leur bouche a la forme d’un V. Ils n’ont point de lèvres, et leur bouche hideuse laisse échapper sans cesse une sorte de salive. D’ailleurs, ni front, ni menton. Et, à la place des organes de préhension que nous appelons des bras, un simple jeu de tentacules, pareils aux visqueuses et redoutables nodosités des pieuvres. Sur quels documents plastiques ou graphiques se fonde Wells, pour nous donner ce portrait abracadabrant d’un habitant de la planète Mars, c’est ce que nous ne saurons jamais, attendu que l’auteur de la Guerre des Mondes ne fortifie, évidemment, par aucune preuve l’audace de ses allégations. Mais tel est le mouvement du récit, tel en est l’enchaî­nement logique, que malgré l’étrangeté de ces données initiales, on s’habitue, peu à peu, aux surprenantes péripéties de la Guerre des Mondes. Les Martiens, dans leur lutte contre les Terriens, disposent d’une artillerie d’au­tant plus redoutable, qu’elle est à peu près invisible, ils projettent sur leurs ennemis, au moyen d’un miroir parabolique, une chaleur intense. Au contact du rayon des Martiens, tout ce qui est combustible s’enflamme, le plomb coule comme de l’eau, le fer s’amollit, le verre craque et fond, l’eau se change immé­diatement en vapeur.

On voit, par cet exemple, comment l’auteur de « La Guerre des Mondes », de  « La Machines à explorer le temps », des « Premiers hommes dans la Lune », de « l’Ile du docteur Moreau » et de « Place aux Géants » ! sait adapter aux inventions de sa fertile fantaisie les infinies possibilités de la science moderne. Un jour viendra, peut-être, où les fusils perfectionnés et les canons mo­dèles dont les hommes se servent pour s’entretuer paraîtront aussi surannés que les arcs et les flèches des Iroquois et des Topinambous, en comparaison des engins que découvrira, dans l’avenir, l’infernal génie de la destruction mutuelle. Peut-être, alors, disposera-t-on d’une puissance de liquéfaction, de torréfaction ou de pulvérisation qui feront considérer les atroces carnages de la guerre moderne comme de simples jeux d’enfants. Les armées belligérantes seront alors « fou­droyées » sans métaphore, et littéralement « réduites en poudre ».

D’autre part, Wells aime à reposer sa pensée sur des perspectives plus pacifiantes. S’il prévoit des rapports hostiles entre la Terre et la planète Mars, il prophétise aussi des relations amicales entre les Terriens et les habitants de la Lune. Dans quelques siècles, s’il faut en croire notre prophète, une ascen­sion dans la Lune sera une excursion recom­mandée par les agences Cook des temps nou­veaux. Wells, en sa jeunesse laborieuse et obscure, a été professeur de sciences dans une de ces « cramming shops » de Londres, qui sont, en outre-Manche, à peu près l’équivalent de nos « boîtes à bachot ». A force d’entasser des notions scientifiques dans les crânes, souvent rétifs, des candidats confiés à ses soins, il s’avisa, comme notre Jules Verne, de tirer parti des innombrables ressources que la chimie, la physique et, en général toutes les sciences de la nature offrent à l’imagination inventive des romanciers. Les hypothèses de Wells dépassent en hardiesse la plupart des hypothèses, pourtant si audacieuses, où se déployait si brillamment, la verve narrative de Jules Verne. Un voyage dans la Lune lui semble tout naturel, à condition toutefois que la science découvre une substance exempte des lois de la gravitation. Une sphère creuse, formée de cette substance, s’éloignera indéfi­niment dans l’espace : il suffira aux gens cu­rieux de s’installer dans cette sphère comme dans un ballon, et de donner l’ordre : « Lâchez tout! » Les voyageurs, placés dans cette sphère, pourront, grâce à un système d’ouver­tures, disposées dans les parois de leur maison flottante, utiliser tantôt l’attraction solaire et tantôt l’attraction terrestre ou l’attraction lunaire.

Et voilà comment, aux environs du tren­tième siècle peut-être, les petits écoliers de la Terre pourront aller passer leurs vacances dans la Lune.

Les récits extra-terrestres où s’espace, avec une visible complaisance, l’imagination fer­tile de Wells, donnent une ample satisfaction à l’instinct qui, de plus en plus, poussera l’homme à s’absenter de sa planète. Actuelle­ment, en effet, il est presque pénible de penser que les lois de la pesanteur et les con­ditions de l’atmosphère nous attachent par les pieds et nous retiennent par le nez à la surface de notre terre solide et parfumée.

 

L‘invraisemblable réalisé : les hommes changés en bêtes.

Du moins, l’île du docteur Moreau nous ramène sur la planète terrestre. Cette île mystérieuse est située très loin, dans l’Océan Pacifique, parmi des récifs de coraux.

Ce docteur avait dû quitter Londres à la suite de l’émotion qu’avait soulevée la fuite scanda­leuse d’un chien, écorché vif par son scalpel, et qui s’était mis à courir, en cet état, à travers les rues de la Cité. L’effrayant vivisecteur, seul au milieu de l’Océan Pacifique, avec le complice habituel de ses écorchements, peut se livrer, désormais, sans la moindre diffi­culté à l’art d’estropier, de mutiler des pauvres bêtes. Du fond de ces perspectives lointaines, il n’y a pas de danger que le hur­lement des quadrupèdes ou des quadrumanes suppliciés par le docteur Moreau soit entendu dans les bureaux de la Société protectrice des animaux.

Le hasard veut qu’un navigateur anglais, mi­raculeusement échappé au naufrage de la Dame Altière, aborde dans l’île du doc­teur Moreau.

Le premier être vivant qui se présente à ses yeux est une bête fantastique, qui a la tête d’un hom­me et les quatre pattes d’un ani­mal. Cet être sin­gulier était vêtu d’une sorte d’ha­billement som­maire en coton­nade bleue. Et, plus loin, en se promenant à tra­vers l’île mysté­rieuse, le voya­geur effaré ren­contre ainsi de singulières créa­tures, demi-hom­mes, demi-bêtes, tellement extra­ordinaires, qu’il croit être, à cha­que instant, le jouet d’une hal­lucination. Ce sont des hom­mes-singes, des hommes-chiens, des hommes-léo­pards, des hom­mes-loups, des hommes-ours.

Tous ces mons­tres ont été créés par les savantes combinaisons du docteur Moreau, dont le rêve con­siste à vouloir condenser en quelques semai­nes ou en quel­ques mois les lentes étapes de l’évolution.

Mais cette métamorphose n’est qu’une transformation bien précaire. Les instincts, dès qu’ils sont réveillés par la vue du sang ou par l’attrait d’une proie, se réveillent, et la brute à peine humanisée devient encore plus brutale qu’auparavant, Moreau est tué par une de ses « créatures », qui, subitement rede­venue féroce et Carnivore, s’est échappée du laboratoire. Alors, on assiste à une scène effroyable : tous les habitants de l’île sont précipités, par une lamentable rechute, dans une épouvantable animalité. Et les monstres s’entredétruisent dans une sarabande de tuerie mutuelle.

Wells est un grand évocateur qui cherche, non plus dans la réalité, mais dans le domaine de l’hypothèse, ces sources de terreur, dont le genre humain, dit Aristote, a besoin, pour s’affranchir de la tyrannie des passions.

 

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« Au fond de la mer «  : Enfermé dans une boule, le héros de Wells voit passer devant lui les êtres étranges qui peuplent les grandes profondeurs.

 

L‘aliment des dieux : une éclosion monstre de géants.

Sans quitter jamais complètement la réalité, y plongeant toujours par quelque racine, son œuvré cherche à s’emparer du plus possible d’inconnu pour en alimenter des récits, pour en créer les rouages effarants d’un drame in­soupçonné.

Voici qu’il imagine un savant, un savant à l’âme très simple et au caractère très mo­deste, et qui porte dans son cerveau la for­mule d’une effrayante découverte. Quelle découverte? Celle d’une substance dont les propriétés nutritives sont telles, que les créa­tures vivantes qui en absorbent, même une quantité minime, grandissent, grandissent jusqu’à dépasser l’énormité vertigineuse des plus hauts monuments.

Le savant expérimente d’abord le fantas­tique aliment — qu’il a baptisé du nom d’héraklèophorbia, sur ses propres enfants… Mais, calamité effroyable, quelques parcelles de la substance se répandent dans le monde qui, bientôt, de-ci, de-là, se peuple d’abeilles gigan­tesques comme des aigles, de rats plus grands et plus terribles que les grands fauves… Et bientôt, tout à coup, on voit poindre et s’éle­ver des hommes géants.

Que va-il se passer? L’humanité chétive et malingre va-t-elle céder la place aux géants? Nous assistons à la lutte désespérée de l’hu­manité normale contre cet encombrement d’êtres démesurés, éclos du génie d’un petit savant. Mais la résistance n’est pas possible, et c’est par la défaite de l’ancien et infime élé­ment humain que se termine « Place aux Géants ! »

Dans la Machine à explorer le temps, Wells part d’une hypothèse extrêmement curieuse, dont la hardiesse n’est pas sans beauté. Pour­quoi, se demande son héros, n’arriverait-on pas à se déplacer dans le temps comme on se déplace dans l’étendue, pourquoi ne parvien­drait-on pas à s’élancer, en avant ou en arrière, dans le cours des âges, à circuler plus ou moins vite, à son gré, parmi les siècles, comme on le fait sur une route ou sur une plaine? Vertigineuse supposition qui affolerait moins un homme de science qu’un simple mortel, car l’homme de science nous dira, avec le sérieux imperturbable de la logique et de la vérité, que si l’on arrivait à se déplacer dans l’espace plus vite que la lumière, on rattraperait dans leur fuite immense, à travers l’éther, les vibrations lumineuses, et on aurait l’impression quelque peu fantastique de revoir le passé… Quant à l’exploration de l’avenir, évidemment, la conception est plus téméraire, mais il est plus qu’intéressant d’y avoir pensé, et il n’est point si aisé de parcourir même avec l’imagination, le champ illimité de l’hypothèse!

Quoi qu’il en soit, le héros de Wells a résolu le problème, et, chevauchant sa miraculeuse et scientifique machine, il se précipite à la décou­verte du monde futur.

Il franchit une étape formidable : deux mil­lions de siècles. Comme bien on pense, ce voyageur, en avant de deux millions de siècles sur son époque, voit du nouveau. Le climat s’est modifié à la surface de la terre, et la température est d’une douceur exquise. Une végétation merveilleuse croît au milieu des ruines colossales d’une architecture étrange.

L’explorateur est accueilli par de petits êtres imberbes et efféminés, vêtus d’étoffes précieuses. Ce sont les Eloïs, résidu mille fois millénaire de l’humanité dégénérée par l’excès de civilisation à haute dose. Que font ces petits êtres? Ils passent leurs journées à jouer, et celui qui vient au milieu d’eux, du fin fond des âges, ne peut s’expliquer comment ils tis­sent leurs vêtements et se procurent leur nourriture.

La nuit, les Eloïs dorment en groupe, dans les grands monuments aux ruines prodi­gieuses, autour desquels ils vivent comme d’insouciantes fourmis, mais leurs petites figures donnent tous les signes d’une grande terreur aux approches de l’obscurité. Cepen­dant, l’explorateur du temps n’a encore vu au­cun animal, ni aucun être, à part la petite foule glabre et drôlement monstrueuse des Eloïs.

Un jour qu’il s’est éloigné de sa machine a parcourir la durée, celle-ci lui est mystérieu­sement enlevée, sans qu’il puisse se rendre compte par qui et comment. Les Eloïs sont totalement incapables d’un acte de ce genre… Il y aurait donc, dans ce monde colossalement vieilli, une autre race malfaisante, celle-là, et le malheureux va alors se trouver obligé de rester a l’époque fantastique où il se trouve, sans pouvoir faire dans l’abîme des temps passés, la plongée libératrice qui le ramènerait parmi les siens? Il s’acharne à la recherche de sa machine. Il pressent qu’elle est cachée dans une sorte de souterrain où l’on accède par un puits profond. Résolument, il y pénètre, et fait connaissance avec les Morlocks, second débris de l’humanité, êtres répugnants, blanchâtres, mous et flasques. Ils vivent dans l’obscurité, sont éblouis et aveuglés par la lumière, et l’explorateur n’arrive à s’échapper de leurs griffes qu’en usant ses dernières allumettes.

Or, ce sont les Morlocks qui entretiennent les Eloïs, les habillent, les nourrissent. Mais dans quel but ? Et devant des tas de viande informe qu’il aperçoit dans les pénombres de la caverne, l’homme d’aujourd’hui pressent le mystère de l’humanité future; les Morlocks sont les pourvoyeurs des Eloïs, mais ces der­niers ne sont qu’un bétail humain et ne vivent sans soucis ni préoccupations que pour finir misérablement comme viande de boucherie.

L’explorateur arrive à reconquérir sa ma­chine et bondit de nouveau dans le futur. Il assiste au déclin du monde et retourne, harassé, dans son époque.

Les effroyables dangers qu’il a courus ne l’ont point découragé, et il repart de nouveau, pour ne jamais reparaître, englouti par le temps.

Dans L’Homme Invisible Wells place en plein milieu de l’époque actuelle de la vie d’aujourd’hui, une de ces hypothèses qui, pour ne point confiner à l’horrible, n’en est pas moins profondément terrifiante. Je sup­pose qu’un homme a pu arriver, au moyen d’un procédé secret, à se rendre si totalement, si parfaitement transparent qu’il devient invi­sible à tous les yeux, sans pour cela perdre sa matérialité. On ne le voit pas, mais on le touche. On imagine ce que cette donnée offre de ressources à un écrivain qui cherche à sus­citer à chaque page le petit frisson delà peur…

Imperceptible, mais réel, l’homme erre dans Londres, terrifiant ceux qu’il rencontre par de soudaines révélations de sa personne qui ne se manifeste qu’au contact direct.

Pour vivre, il est réduit à voler sa nourri­ture, il parvient à se procurer des vêtements, une perruque, un masque, et désormais, revêtu d’une enveloppe visible, il réside quelque temps dans une petite auberge de province. Un accident fait découvrir que, sous le masque, il y a en apparence le vide, et alors, angoissante et folle, commence la chasse à l’homme invisible mais non impalpable. Après avoir déjoué les poursuites et réussi à se ca­cher durant plusieurs jours, il est frappé par la pioche d’un terrassier, meurt, et par suite de la décomposition du sang, redevient vi­sible.

Mais il a commencé par expérimenter son invention sur un chiffon et sur un gros chat. Il y a donc, encore quelque part, un matou énorme qui rôde et qu’on ne peut voir, Il est peut-être là, à côté de vous… N’est-ce pas lui qui vient de vous frôler la main… là? Ce souffle… N’avez-vous jamais entendu miauler le chat invisible? Et c’est vraiment là une obsession acharnée.

En plus de ses œuvres principales, Wells a publié nombre de nouvelles, parmi lesquelles il faut citer celles parues sous le titre : « Les Pirates de la mer. » En outre, dans une nou­velle intitulée « Dans l’abîme, » il nous fait assister à la descente d’un homme dans les profondeurs incalculables de l’Océan Pacifique. Enfermé dans une sphère, il trouve un – ville sous-marine, dont les habitants sont des sortes d’hommes auxquels une conformation spéciale permet de vivre au fond des eaux. Faut-il encore citer la « Chambre rouge », « l’Etoile » et tant d’autres contes d’une horreur si particulière. Et il est admirable que toutes ces histoires puissent être si pareille­ment terrifiantes tout en étant si diverses.»

 

Gaston Deschamps

 
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« Les martiens sur la terre » : N’atteint-elle pas aux bornes du fantastique et du terrible, cette vision d’êtres informes tombés de la planète mars pour ravager la terre.

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« Le voyage dans la lune » : Après avoir montré l’invasion des habitants des planètes, Wells nous transporte dans la lune où un homme, à l’aide d’une formidable machine qu’il s’est fait construire, est arrivé: dans ce paysage lunaire, il rencontre d’étranges habitants qui lui font subir d’atroces et de barbares tortures.



Parution Du N° 15 De la Revue « Quinzinzinzili »

Le numéro 15 de la revue « Quinzinzinzili » vient de paraître et fidèle à son entreprise d’exhaustivité concernant les écrits de Régis Messac, elle nous propose pour cette livraison automnale quelques textes inédits.

Pour introduire cet « Univers Messacquien » un hommage est rendu à un compagnon d’infortune de Régis Messac, Raymond Brulé. Un témoignage bouleversant sur les conditions de captivité de ces « Nacht und Nebel » (Nuit et brouillard) dans le camp de Natzweiler plus connu sous le nom de Struthof. Les privations, les humiliations, nul ne peut ignorer les brimades que connurent ces « prisonniers politiques » et toute la haine qu’ils suscitèrent de la part de leurs geôliers. Face à tant de haine et de folie, Raymond Brulé succombera à ce régime impitoyable, suivit de quelques mois par la disparition de Régis Messac et de tant d’autres.

Vient ensuite une petite « Radioscopie de Tardi » et de son implication dans la parution du Volume « ô dingos, ô châteaux » en collaboration avec Jean-Patrick Manchette.

Petit panorama de deux œuvres phares de Régis Messac « Le miroir flexible » et « La cité des asphyxiés » réédités pour notre plus grand plaisir aux éditions Ex Nihilo. Inutile de vous préciser toute le plus grand bien que nous pensons de ces deux textes et surtout d’insister sur les qualités du second avec la diversité de ses thématiques et la justesse des problématiques qu’il soulève.

Nous passons ensuite sur la suite de la passionnante analyse de l’étude consacrée au « Détective novel », cette fois sous l’angle de l’accueil par la critique.

Dernier gros dossier, celui consacré au « Voyage au bout de la nuit » de Louis Ferdinand Céline. Un texte rare de Régis Messac et de son approche de ce célèbre roman, agrémenté d’illustrations de Jacques Tardi. Cet avis éclairé sera suivi d’une spécialiste, Nathalie Crom, qui nous apportera sa propre opinion sur la vison de l’analyse faite par Messac.

Pour terminer, et il eut été inconcevable pour cette revue de ne pas y consacrer une petite place, ce N° 13 se termine par la rubrique « De quelques utopies », et c’est avec sa plume toujours aussi féconde et son sens de l’analyse toujours bien senti, que Messac nous présente deux textes peu connu et assez rares (du moins pour le commun des mortels) : « Le superfemme » de Henri Lambert et « Le péripatéticien » de Jean Desthieux. Ces deux textes viennent une nouvelle fois compléter cette sorte de dictionnaire des œuvres conjecturales inconnues, qui fut entamé dés le premier numéros et que nous souhaitons voir encore se poursuivre pendant fort longtemps.

Au final, une numéro une fois de plus éclectique et passionnant, un outil indispensable à l’amateur éclairé aussi bien qu’au jeune curieux désireux d’approfondir ses connaissances sur un sujet passionnant et infini, genre pour lequel Régis Messac consacra toute sa vie et son énergie et c’est en cela une preuve suffisante pour lui témoigner toute notre respect et notre admiration.

Parution Du N° 15 De la Revue



« Irons-Nous Passer Un Jour Nos Vacances Sur La Lune ? »

Avant de découvrir la seconde partie de la passionnante nouvelle de Régis Vombal, voici un petit intermède scientifique qui, j’en suis certain, ravira nos lecteurs. Encore une théorie des plus distrayante qui use de raccourcis aussi amusants qu’invraisemblables…..l’ombre de la Cavorite et de la Répulsite  n’est pas loin!

Article paru dans la revue « Nos loisirs » N° 36. 7 septembre 1913

Nous irons peut-être un jour passer nos vacances dans la lune

Les rêves de Jules Verne et de Wells, à la veille de se réaliser. Vénus, Mars, la lune et autres mondes à la portée des voyageurs blasés sur les beautés de notre petite planète, voilà ce que verra sans doute la génération de demain.

Nous avons accoutumé de nous émerveiller sur nos propres progrès et il faut avouer que les découvertes scientifiques, surtout depuis un quart de siècle, nous y autorisent. Mais vous rencontrerez communément des pessimistes qui croient que le génie humain a fourni le maximum de son effort.

Ces gens-là ne croyaient pas à l’automobile : « De sales machines, puantes et geignantes qui s’arrêtent tous les cent mètres, quand elles ne tuent pas les passants. » Leur confiance dans l’aéroplane n’était pas plus grande et aujourd’hui encore quand on leur demande ce qu’ils pensent des progrès réalisés, ils vous disent froidement :

– Bon, c’est entendu, les autos marchent bien, les aéroplanes peuvent devenir pratiques, la télégraphie sans fil élargit chaque jour son champ d’action, etc., etc., mais l’époque des grandes inventions est terminée. Que voulez-vous découvrir maintenant?

- Les hommes ont conquis des territoires sauvages, inconnus, sous un soleil de feu ou dans les neiges éternelles, répond l’astronome Krauss Nield, ils iront maintenant conquérir d’autres mondes, en plein ciel et l’œuvre qu’ils ont accomplie jusqu’ici n’est qu’une petite chose infime comparée à celle qui s’offrira à eux.

M. Krauss Nield n’est pas le premier venu. La théorie qu’il expose mérite donc de retenir l’attention. Membre de la « Royal Astronomical Society d’Angleterre », il dirigea en 1905, la mission scientifique installée à Burgos, eu Espagne, pour étudier l’éclipsé de soleil, comme il avait étudié celle de 1900 au cap Matifou en Algérie.

Le moyen préconisé par ce savant pour franchir les immenses espaces éthérés qui nous séparent des autres planètes est l’utilisation d’un gaz : le coronium. Ce gaz est tellement plus léger que l’air qu’un petit ballon d’enfant gonflé avec, suffirait à enlever un éléphant. C’est dire tout de suite le parti qu’on en pourrait tirer en l’appliquant à l’aérostation.

Qu’est-ce donc que le coronium?

Ce gaz se trouve autour du soleil, lui constituant une sorte d’enveloppe que l’on peut seulement observer au moment des éclipses. M. Krauss Nield a pu photographier cette espèce d’auréole à l’aide de plaques spéciales.

La grosse difficulté du problème consiste à se procurer du coronium. L’astronome espère que l’on y réussira un jour, car il doit en exister aussi dans l’atmosphère terrestre. Il s’agira de l’isoler pour pouvoir en tirer parti. Quand ce sera fait – et les découvertes scientifiques de ces dernières années permettent de croire que ce n’est nullement irréalisable – un voyage dans la lune ou à Vénus deviendra sans doute possible.

Le savant et ceux de ses amis qui s’intéressent à la question ont déjà défini dans ses grandes lignes, l’appareil qui permettra d’accomplir cette randonnée gigantesque.

C’est la réalisation de l’ingénieux rêve de Wells: Les premiers hommes dans la lune.

La machine volante construite en acier et d’une solidité exceptionnelle affectera la forme d’un poisson. Les voyageurs placés à l’intérieur et qui emporteront une réserve d’air liquéfié suffisante pour rester longtemps hors de notre atmosphère respirable, pourront actionner et diriger facilement la machine, laquelle ne différera pas sensiblement d’un aéroplane actuel.

A l’extérieur seront disposés de petits réservoirs contenant le gaz précieux et construits de telle sorte qu’ils pourront résister à toutes les pressions extérieures ou intérieures. La question du poids est totalement négligeable puisque le coronium ne pourrait entraîner à une vitesse fantastique un appareil extrêmement lourd. En raison même de la tendance qu’aura celui-ci à s’élever, il sera nécessaire de l’ancrer au sol avant son départ par un système offrant toutes les garanties de sécurité et qui reste à inventer.

Disons enfin que la puissance du coronium est telle que les explorateurs du ciel n’auraient pas à craindre de voir leur engin s’arrêter une fois franchie la couche d’air qui entoure notre planète. Leur randonnée continuerait dans l’éther.

Qui sait, si plus tard, nos descendants n’utiliseront pas l’engin de M. Krauss Nield pour émigrer en masse vers d’autres mondes ?…La terre se refroidit lentement et c’est peut-être dans les autres planètes comme Vénus qu’ira se perpétuer la race des petits hommes modifiée par les siècles.

Combien nous apparaîtront ridicules alors les guerres meurtrières que nous nous livrons pour nous disputer entre peuples quelques kilomètres carrés de territoire…

Les colonies des grands Etats seront des mondes éparpillés dans le ciel.

Et peut-être l’appareil de l’astronome Nield nous permettra-t-il aussi d’entrer enfin en relations avec les habitants de la planète Mars qui, depuis si longtemps – à ce que l’on croit –multiplient leurs signaux pour attirer notre attention.

On se plaît à attribuer à ces habitants de la planète voisine une civilisation plus développée que la nôtre. Quelles surprises ne nous révélerait pas un voyage chez eux !…

Mais cela c’est encore le rêve. Attendons sans trop de scepticisme que la science nous le transforme en réalité.

 

 

 nosloisirs dans en feuilletant les revues



« Le Boudoir Des Gorgones » N° 22 Vient De Paraître

Fidèle à son habitude , le « Boudoir des Gorgones » nous livre avec ce numéro 22 un exemplaire exceptionnel où, pour la deuxième fois, l’anticipation ancienne est à l’honneur.

Rien que des nouvelles inédites ou introuvables, alors n’hésitez pas, foncez…il n’y en aura pas pour tout le monde

Sommaire :

Dans les griffes de Sthéno:

«Prométhéa» de Jean Cotard (1932), un étonnante nouvelle de science-fiction mettant en scène… Dieu lui-même.

* «Jean Cotard» par P. Gontier.

«L’Inventeur» de Pierre Thibault (1911), récit d’anticipation souriante contenant de vraies idées conjecturales.

* «Pierre Thibault» par P. Gontier -

-« Fin de siècle- Obsession » de Godefroy (1892), une histoire en image qui ironise sur le modernisme fin-de-siècle, friand d’inventions domestiques.

* «Godefroy» par P. Gontier.

«Colonisons l’Europe !» d’Albert Robida (1904), illustration en images du fameux péril jaune, et notamment des conséquences de la colonisation de l’Europe par le Japon sur la vie quotidienne des nouveaux colonisés.

«Octave Béliard»(seconde partie) par Philippe Gontier, suite de l’étude bio-bibliographique consacrée à l’immortel auteur des Petits hommes de la pinède, inventeur du concept de terraformation.

Dans l’ombre d’Euryalé

«Le Chercheur de merveilleux» (les faits-divers insolites dans la presse).

- «Last but not least» (notes de lecture).

A commander à l’adresse suivante : « Le boudoir des Gorgones »

 



Le Boudoir Des Gorgones N° 21 Vient De Paraître

« Le Boudoir des Gorgones », le célèbre revue de Philippe Gontier, n°21 vient de paraitre au sommaire:

Dans les griffes de Sthéno :

  – «Le Squelette» (Le Prêtre désossé) (1868) de Gabriel Marc. «Notice sur Gabriel Marc» par Noëlle Benhamou.

  – «Comment mourut Jacques Codelle» (1910) de R. d’Ast.

  – «Si c’était vrai…» (1917) de Henry Frichet. «Notice sur Henry Frichet» par Philippe Gontier. 

  – «Les maîtres de la littérature fantastique et de science-fiction francophone : Octave Béliard, entre science et merveilleux» (1ère partie) par Philippe Gontier.

Dans l’ombre d’Euryalé :

- «Le Chercheur de merveilleux» (revue de presse de l’étrange).

- «Last but not least» (notes de lecture) par Philippe Gontier.

Inutile de vous préciser que cette revue, qui hélas avait fait une pause de plusieurs mois, est essentielle pour ne pas dire vitale à tout amateur de vieux textes de fantastique et d’anticipation ancienne qui se respecte. Et pour cause, il va puiser dans cette réserve formidable des anciennes revues, qui publièrent des textes le plus souvent inédits, oubliés de tous. Une revue de qualité où le lecteur n’est jamais déçu des trésors qu’il va y découvrir.

Attention petits tirages il risque donc de ne pas y en avoir pour tout le monde, certains numéros sont d’ailleurs déjà puisé. Pour commander c’est ICI

 

Le Boudoir Des Gorgones N° 21 Vient De Paraître dans en feuilletant les revues leboudoirdesgorgones



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