Appréhender une personnalité aussi complexe que celle de Émile Tizanè, fut à mon avis un défi redoutable et j’imagine sans peine l’expression de surprise de Philippe Baudoin , à la vision des archives d’une teneur exceptionnelle qu’il vient de découvrir pour la rédaction de son live et précieusement conservées , dans la cave de l’un de ses fils. J’avais vaguement entendu parler de cet étrange « chasseur de fantômes » sans jamais vraiment m’y intéresser bien que, plus d’une fois, je fus intrigué par au moins deux de ses titres « L’hôte inconnu dans le crime sans cause » et « il n’y a pas de maisons hantées. Journal d’un enquêteur incrédule 1925 à 1933 ». Je ne connaissais pas cet auteur, je l’avais consciencieusement mis dans un coin de ma mémoire afin de pouvoir ultérieurement faire des recherches sur ce singulier personnage en apparence ,qui semblait dépenser toute son énergie sur des phénomènes que beaucoup d’autres avaient étudiés, sans savoir un seul instant qu’il fut l’un des tout premier à appréhender le phénomène des « Poltergeist » selon une méthodologie bien précise, frisant l’obsession et pour cause toute sa vie durant il essaya de convaincre sa hiérarchie de combattre ses entités comme des criminels : quoi de plus naturel pour un représentant des forces de l’ordre !
Ce qui frappe en premier le lecteur à la vision de l’ouvrage, de fort belle facture, c’est le titre : « Les forces de l’ordre invisible » et l’on pourrait presque se méprendre sur le sens réel d’un tel titre. Je dois avouer que ma première analyse du titre se concentra sur les forces de l’ordre en tant que garant de notre sécurité. Bien évidemment le dernier mot de « invisible » , sans l’accord, ne laisse planer aucun doute, mais avouez qu’il y a un jeu sur le double sens que peut revêtir une telle appellation, et c’est tant mieux, car il est alors possible de se concentrer sur les deux axes principaux de l’ouvrage : essayer quoi qu’il en coûte de faire respecter l’ordre et de lutter contre des forces invisibles.
Saluons également la maquette de l’ouvrage qui dans sa présentation et son contenu, reste moulé dans un style à l’ambiance un peu surannée, renforcé par des photos d’époque et une typographie de chapitres en adéquation avec toute l’étrangeté du livre. Il y a de plus dans cette couverture comme un hommage au « héros » de cet ouvrage, amateur de collages extraordinaires et dont le motif psychédélique en diable, nous lance comme un avertissement à toutes les hantises que nous allons y rencontrer. Je ne sais pas pourquoi, mais la couleur verte dominante, est aussi un rappel aux formes fantomatiques et ectoplasmiques qui vont jalonner l’ouvrage. Mais peu importe le sens que chacun va trouver à ce décorum, Philippe Baudoin nous conduit sur les traces d’un traqueur de spectres dont nous ne mesurions pas toute la complexité et l’ambiguïté. C’est un véritable travail de titan, que d’avoir compulsé autant de documents et d’en extraire sa substantifique moelle afin d’en faire profiter le lecteur dans un volumineux condensé qui nous permet un peu mieux de cerner sa personnalité. Voilà un homme fascinant qui, durant toute sa vie, faisant fi des quolibets et des entraves de sa hiérarchie, traqua sans relâche avec une méthodologie, pour ne pas dire maniaquerie, frôlant même la pathologie, les phénomènes de « petites hantises » qu’il répertoria, disséqua et analysa avec une rare pugnacité. En regard de son parcours, de ses croyances aux choses de l’invisible, de sa ferveur catholique et de son obsession pour l’ordre et la morale, on comprend mieux le sens de cette « croisade » qu’il s’était infligée, Minutieux, perspicace, méthodique et obstiné, lisant une multitude d’ouvrages sur le domaine, contactant sans relâche les plus grands spécialistes du moment, il va édifier certaines hypothèses non dénuées de sens affirmant pour exemple que dans la plupart des cas motivant enquête, il y a toujours un être vivant qui est le centre des phénomènes.
Mais eu delà de ce parcours édifiant qui pourra prêter de temps à autre à réflexion sur l’homme et ses motivations, il y a un travail de fond sur l’homme et son époque et sur son autre obsession, celle d’amasser une somme colossale de documents et dont Philippe Baudoin consacrera une large place en première partie en faisant une analyse fort passionnante sur la fonction d’archivage. Érudit sur son analyse et pertinent sur la finalité de cette curieuse manie, il nous ouvre les portes d’un univers que les collectionneurs ou les « collecteurs de documents » comme le dit si bien notre ami Joseph Altairac, comprendrons fort bien. Mais ce singulier personnage, laisse aussi transparaître un être tourmenté, contrarié par l’incompréhension de sa hiérarchie et de son manque de soutien, lui qui veut traquer ses « esprits » comme de vulgaires criminels et qu’il est indispensable de traiter en tant que tel. Pour lui, il y a trouble de l’ordre public, des biens et des personnes sont impliqués, c’est le devoir de la gendarmerie d’y mettre bon ordre.
La guerre vient alors jeter un voile trouble sur toute son activité et le chapitre consacré aux phénomènes occultes et aux sociétés secrètes pendant l’occupation allemande fut pour moi une découverte fort intéressante car je n’avais pas idée à quel point la France, pendant cette période, baignait dans une ambiance aussi mystique. Emile Tizanè fit-il preuve d’opportunisme pendant cette période ? pressé d’un côté par sa hiérarchie qui forçait ses troupes à une soumission totale et aveugle à l’occupant, mais d’un autre côté pouvant peut-être mieux assouvir sa soif de connaissance en la matière ( il fut un proche d’Alexis Carrel lui-même ami de Jacques Doriot pro-nazi notoire) période où il put de manière officielle conduire une enquête impliquant « des forces de l’ordre invisible » ? Son activité, bien qu’ayant été « lavé de toutes fautes » , reste là aussi assez trouble, comme le fut une grande partie des gendarmes à cette époque. Après la guerre, et ce, pendant des années, il va continuer son combat, accumulant preuves et témoignages, établissant une carte de « La France hantée », collaborera à de nombreuses revues spirites, fera la une de revues spécialisées, participera à des émissions télévisées……
Mais cette vie consacrée à cette recherche de la vérité et dont il tirera de nombreuses conclusions, que je vous laisse découvrir à la lecture de ce fort volume, ne sera pas sans conséquence, victime lui-même de phénomènes paranormaux dans sa propre maison, il consacrera ses dernières années en portant un intérêt sur le phénomène des OVNI ( il fut l’ami de Jimmy Guieu) le conduisant également à des événements troublants. Il va s’éteindre d’une maladie généralisée, laissant derrière lui bien des mystères et bien des affaires non classées que nous aurons peut-être un jour la chance de découvrir,
Fait étrange, comme l’a été toute sa vie, sa femme va découvrir quelque temps après sa mort dans le sous-main de son mari une feuille écrite ( comme sous écriture automatique) et signée « Mick » ( le surnom qu’elle donnait à son époux) :
« Je suis toujours dans cette maison, je te parle, tu ne réponds pas, je t’en prie, n’aie pas peur, ne me quitte pas »
Un final à l’image du personnage et du livre, que j’espère vous lirez comme moi avec avidité, l’histoire de « l’enquête d’un enquêteur intriguant », passionnant,,probablement un cas unique dans un organisme « officiel » et qui nous pousse à réflexion ou du moins envisager les phénomènes de petites voire de grandes hantises sous un jour et un angle nouveau.
Un bien bel ouvrage mené de main de maître !
« Les forces de l’ordre invisible , Émile Tizané un gendarme sur les territoires de la hantise » Editions de Philippe Baudoin .« Le murmure » 2016
Je me rappelle lorsque enfant, j’allais en vacances dans la maison de mes grand-parents paternel. Mon petit plaisir de lecture, était d’acheter dans la collection « Les beaux albums de la jeunesse joyeuse » les albums de « Bibi Fricotin » et des « Pieds Nickelés ». À cette époque, je ne connaissais pas René Pellos, mais j’avais une affection toute particulière pour son trait dynamique et la particularité qu’il avait à donner vie à des choses, inertes par nature, mais souvent affublées d’un visage, d’une grimace ou d’un clin d’œil. C’est bien plus tard que j’ai pris conscience du génie de ce dessinateur hors pair et que finalement, enfant, je n’avais pas trop des goûts de chiotte ! Déjà, en ce temps là, c’était leurs aventures fantastiques ou conjecturales qui me passionnaient le plus et je dois reconnaître que si à l’époque j’ai dévoré leur périple en « soupière volante », dans une « fusée interplanétaire » ou sur « Bêta 2 » j’étais loin d’imaginer dans ma petite cervelle de gamin que je les retrouverai 45 années plus tard sur ……Neptune !
Une fois de plus nous en avions rêvés, ou presque, et le Carnoplaste l’a fait ! Car il fallait avoir une sacrée bonne dose de dérision, d’humour et de connaissance des lieux pour romancer ce trio de personnage culte resté gravé dans toutes les mémoires et qui mieux que l’ami Cortégiani, grand spécialiste des BD et des choses anciennes, pouvait nous livrer une aventure aussi farfelue et incroyablement jouissive.
Suite à un casse qui tourne court, le préfet Boudini leur propose un deal : aller dans l’espace et plus particulièrement en direction de Neptune d’où fut envoyé un dernier message du capitaine Bob, agent spécial spatial : In y a de la thune sur Neptune ! Plus pour renflouer les caisses de l’état que pour porter secours à cette gloire nationale, nos trois malfrats n’ont pas d’autres choix que de s’embarquer dans cette aventure aux confins de notre système solaire, riche en rebondissement où la rencontre d’un rat mercenaire de l’espace, une reine anthropophage et une armée de Zlonkiens peu amicaux, ne seront qu’une infime partie des périls qu’ils vont devoir affronter. De cette burlesque épopée se dégage non seulement le respect de l’auteur pour cette triplette potache et farfelue, mais aussi un plaisir certain à donner au lecteur une bonne dose d’humour afin de faire fonctionner à plein régime nos zygomatiques parfois quelque peu atrophiés. Rarement dans cette série de l’histoire du système solaire, mis à part avec « Pluie de plomb sur Pluton » , un auteur n’avait à ce point utilisé le ton de la galéjade afin de réinventer notre propre folle histoire de l’espace et aboutir à un résultat aussi drôle que divertissant. Le fascicule de François, est à son image, truculent, fantaisiste,généreux et passionné et comme en plus il n’est pas avare en amitié, il nous arrose généreusement en clins d’œils divers et variés et n’hésite pas à utiliser le corpus carnoplastique, avec quelques références de fascicules ( dont le mien et j’en suis fort aise) et d’amis Savanturiers qui trouvent dans cette aventure une place de choix, bien légitime et qui leur sied à ravir : le sympathique Capitaine Bob, l’inventeur de la machine à voyager dans le temps ( dont je vous laisse découvrir le nom) la planète « Délirius » , gouvernée pat Lob et Druillet……ne sont que de petits avant-goûts de tout ce qui vous attend.
On sent dans cette histoire qu’il s’est amusé à l’écrire, qu’elle fut l’occasion de laisser libre cours à son sens affûté de la dérision et de nous apporter une nouvelle fois la preuve de son amour immodéré pour ses personnages un peu oubliés, mais qui continuent à briller avec ou sans thune dans le firmament de notre patrimoine culturel populaire. Ajoutez à cela des titres de chapitres où l’auteur nous gratifie de quelques jeux de mots bien placés et d’une SUPERBE couverture ( magnifiques couleurs de Bonaventure) et illustrations intérieures de Herlé et vous aurez entre les mains un de ces ovni de la littérature d’aventure populaire qui trouvera une place bien méritée au rayon de ses petites perles parodiques que tout Savanturier se doit de posséder.
« De la thune sur Neptune » 8eme fascicule de « L’histoire du système solaire en 1920 » Éditions du Carnoplaste.Texte de François Corteggianni , dessins de couverture et illustrations intérieures N&B de Herlé, couleurs de Bonavanture.
Présentation éditeur, dans son jus………..
V’LÀ QUE CAPITAINE BOB, AGENT SPÉCIAL SPATIAL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE, SE FAIT BOUFFER PAR L’AVALEUR D’ÉTOILES… MAIS LE BOUGRE A EU LE TEMPS D’ENVOYER UN MESSAGE. C’EST MADAME MARTICHON, FEMME DE MÉNAGE AU MINISTÈRE DE L’ESPACE, QUI LE RÉCEPTIONNE. L’HEURE EST GRAVE. SUR LE TOIT D’À CÔTÉ CROQUIGNOL, RIBOULDiNGUE et FILOCHARD TOMBENT À POINT NOMMÉ… AVOIR LE PRÉFET BOUDINI AUX BASQUES, ÇA AIDE À SE PORTER VOLONTAIRE ET V’LÀ NOS PIEDS NICKELÉS EN ROUTE POUR NEPTUNE. CHEZ LA REINE NAMOUMOU. ET LES ZLONKIENS QUI DEBARQUENT ! ET KARASCAL, LE RAT DE L’ESPACE, QUI S’EN MÊLE… AH, FAUT ÊTRE MOTIVÉ… HEUREUSEMENT QUE LE MESSAGE DE CAPITAINE BOB DISAIT CECI :
IL Y A DE LA THUNE SUR NEPTUNE… JE RÉPÈTE… IL Y A DE LA THUNE SUR NEPTUNE !
Journaliste pendant de longues années pour une revue consacrée à l’étrange, outre sa participation à la revue « Mystère » et son implication pour l’émission « L’odyssée de l’étrange », Eric Bony ne pouvait pas faire mieux que de se lancer dans le roman de fiction avec ce premier volume d’une héros que nous affectionnons tout particulièrement « Le journaliste de l’étrange »
Thomas Cazan est un habitué des Charlatans de toutes sortes et lorsqu’il y a quelques années, avec une bande de copains, il crée la revue « Enigm » l’époque se prêtait à tous ces articles à sensation, mais rédigés avec une rigueur et un professionnalisme qui aujourd’hui n’intéresse plus les nouveaux dirigeants. Autre temps, autres mœurs, on ne lui demande plus d’enquêter sur des phénomènes plausibles, concrets, vérifiables, mais sur des faits incroyables et tellement gros que non seulement cela sent l’arnaque à plein nez, mais en plus ébrèche fortement sa foi en son métier de journaliste. A présent son métier est devenu une véritable croisade et il n’a de cesse de démasquer les escrocs qui se prétendent investi d’une mission divine ou de pouvoirs extraordinaires, ce qui n’est pas au goût de son patron : il faut bien faire vivre le commerce et faire bouillir la marmite ! On lui somme de rentrer dans le rang en lui confiant le reportage de la dernière chance. Une exposition doit avoir lieu au petit palais et consacrée aux objets maudits. Son reportage se focalisera sur un bijou mystérieux ayant appartenu au célèbre bandit « Mandrin » et possédant la fâcheuse manie de tuer ses propriétaires. Lors de l’interview de son actuel possesseur, dans la chambre forte abritant l’objet rare, ce dernier est horriblement assassiné avec le garde assurant sa protection, le commissaire de l’exposition y est gravement blessé et notre journaliste, pris pour cible, est contraint de fuir. Poursuivit par le service de sécurité de l’exposition, pensant qu’il s’agit du voleur, il sera sauvé de justesse par la mystérieuse Marie, descendante de la famille de Mandrin qui elle aussi compte bien retrouver le fameux bijou. Celui-ci contient en effet un indice permettant d’accéder à un mystérieux trésor, convoité par toute une génération de chercheurs de trésors. Commence alors une course-poursuite effrénée, une course contre la montre dans laquelle s’engage la police persuadée que Cazan est le véritable coupable, Marie qui semble être trop serviable pour être honnête et une mystérieux groupe occulte ayant à sa tête Balbek un être cruel qui est persuadé que le véritable trésor n’est pas moins que le tombeau du diable. Le chemin de cette course effrénée va ainsi être jonché d’une multitude de cadavres, car nous apprenons au fil de l’histoire, des intentions peu louables de ce monstre assoiffé de sang à la tête d’une organisation aux ramifications tentaculaires et dont la seule forme d’expression est la torture et le massacre. Après bien des péripéties, Thomas Cazan découvre alors les enjeux de cette course au trésor qui, dans un final apocalyptique et totalement surprenant, nous révèle un des mystères le plus controversé du XXéme siècle.
Inutile de vous dire que ce livre au rythme effréné possède son lot de mystères et de crimes particulièrement violents et que l’on ne repose que contraint et forcé afin de reposer un peu ses yeux tellement l’écriture y est alerte avec un rythme qui ne supporte pas les temps morts. J’ai retrouvé ce même plaisir de lecture lorsque j’avais dévoré, sur les conseils d’un ami paléontologue « La griffe du diable » ( Teins tiens ! Bizarre là aussi, il est question de l’ange déchu), un roman qui présente des similitudes en terme d’action et de rebondissements ( une lecture indispensable) . On sent dans ce roman de presque 450 pages le vécu de l’auteur et sa profonde expérience dans le domaine de « l’occulte » conférant au personnage principal une solide texture et l’on imagine sans mal Éric Bony comme une sorte de clone fictif de ce journaliste de l’étrange qui d’entrée de jeu nous est fortement sympathique. Le roman est bourré de références au cinéma et aux séries télévisées et l’on devine ainsi l’écrivain grand fan du grand et petit écran ,prenant un malin plaisir à saupoudrer son histoire des incontournables classiques du genre. Il y a ensuite cette galerie de personnages assez pittoresques voir même terrifiant et si les méchants de l’histoire sont vraiment détestables à souhait, mais avec malgré tout un aspect fascinant et puisque surtout, que diable, ils pimentent l’histoire de leurs interventions radicales et sanglantes, les « gentils » attirent toute notre sympathie, car du chasseur de trésor tenant une fort belle librairie dans un cadre propice à notre imaginaire en passant par le rat de bibliothèque, enfoui dans une cave pratiquement oubliée des hommes et qui entasse depuis des décennies tous les faits étranges et surnaturels se déroulant sur notre bon vieux sol français, le lecteur grand fan de cette littérature ne pourra qu’y trouver son compte et s’identifier quelque peu à de si originales figures. Sans oublier nos deux héroïnes, figures archétypales de la femme fatale, fortes et redoutables à la fois, mais dont la seule devise sera le classique : « La fin justifie les moyens », et bien entendu, le flic qui se la joue décontracte et qui sous des apparences de ne pas trop y toucher est doué d’une grande perspicacité.Mais au delà de cette impressionnante galerie de personnage , il y a l’intrigue fort originale gravitant autour de la légende de Mandrin et que l’auteur vient associer à une affaire assez curieuse dont j’avais entendu parler pour la première fois grâce à mon ami Jean-Luc Rivera, grand amateur de mystères et de civilisation disparues : l’affaire Glozel
Glozel est un lieu-dit de la commune de Ferrières-sur-Sichon, dans le département de l’Allier, situé à une trentaine de kilomètres de Vichy. Il est devenu célèbre à partir de 1924, quand fut mis au jour un ensemble d’objets, attribués dans un premier temps à une époque préhistorique, mais dont l’ancienneté et parfois l’authenticité furent rapidement contestées. Les objets découverts sont des pierres taillées, des poteries, des ossements, des fragments de verre, et surtout des tablettes de céramique portant des inscriptions évoquant une écriture dans un alphabet souvent rapproché de l’alphabet phénicien. Ces vestiges sont à l’origine d’une vive controverse qui divisa une partie de la communauté scientifique. La découverte initiale est réalisée le 1er mars 1924 par Émile Fradin, alors âgé de 17 ans, et par son grand-père Claude Fradin en défrichant le champ Duranthon, surnommé plus tard « le Champ des Morts ». Le pied de l’une des vaches tirant la charrue s’enfonce dans une cavité. Les Fradin découvrent une fosse dont les parois sont revêtues de briques , le sol y est couvert de dalles d’argile. La fosse contient des ossements humains, des instruments en pierre ou en os et des fragments de céramique. En deux années, le gisement livre environ 3 000 vestiges très variés. La découverte de ce site remet en question bien des choses sur notre histoire entre autre il met en évidence, et d’après la datation de certaines pièces provenant du néolithique, de l’existence à cette époque d’un système d’écriture alors que, officiellement, celle-ci ne remonte qu’à l’époque des phéniciens
Je ne peux que vous encourager à faire de petites recherches sur le net et d’en apprendre plus sur cette incroyable histoire que tout Savanturier se doit de connaître et Eric Bony, grand spécialiste du genre ne pouvait laisser filer une si belle occasion d’échafauder une hypothèse assez séduisante pour faire un lien avec son histoire de bandit de grand chemin, de bijou maudit et de ce fameux « Tombeau du diable ». En ce sens, le tout premier chapitre se déroulant à l’époque Gallo-romaine est particulièrement réussi et mériterait à mon avis un autre ouvrage se déroulant à cette époque imprégnée de violence et de magie.
En homme aguerri des « dossiers brûlants » et un sens particulièrement développé de l’intrigue permettant de tenir son lecteur en haleine, par un subtil mélange des genres, il nous concocte une histoire menée tambour battant avec un final particulièrement réussi. Même si certains effets de style sont poussés à l’extrême en voulant légitimiser la cruauté des méchants de l’histoire le roman reste très plaisant à lire, débutant ainsi une série d’ouvrages très prometteuse ayant pour héros ce tout nouveau journaliste de l’étrange qui, pour notre plus grand plaisir n’a pas froid aux yeux et possède une certaine connaissance de tous ces phénomènes qui nous passionnent tant.
Nous ne pouvons que souhaiter une bonne chance à cet auteur plein de talent qui vient ainsi grossir le rang de ces détectives de l’occulte œuvrant dans le silence feutré de poussiéreuses bibliothèques afin de résoudre bon nombre « d’affaire non classées » mais avec cette classe et cette décontraction qui ne peuvent que susciter notre intérêt et toute notre sympathie
« Le tombeau du diable » de Eric Bony, Éditions City 2015, Couverture de Joanna Jankowska & Deborah Pendell
On a trop souvent attribué à la littérature dite de genre un statut négatif pour ne pas dire péjoratif alors imaginez lorsque celle-ci se trouve dans le domaine jeunesse et que vos « amis » horrifiés découvrent l’objet de vos coupables lectures. Il m’arrive souvent de m’abandonner à cette catégorie et je viens de m’apercevoir au final qu’elle occupait pas moins d’une rayonnage entier de ma bibliothèque. Je m’y abandonne souvent, car c’est une lecture rafraîchissante et reposante, non pas qu’elle soit plus « simpliste » , mais parce que souvent les idées y sont plus claires, le style plus léger, mais pas forcement moins intéressant, et les auteurs qui s’y adonnent restent souvent inventifs voir peut-être même plus pertinents dans leurs idées que les écrivains d’une littérature dite plus «Adulte». Invité chez des amis Savanturiers pour quelques jours, me voilà les bagages plus lourds de trois volumes qui ne manqueraient pas d’agrémenter les longues heures de voyages en train, moyen de locomotion d’ailleurs que j’affectionne tout particulièrement tant il me permet de me laisser aller à la rêverie en regardant la diversité des paysages défiler devant moi et surtout de me plonger avec délectation dans de longs moments de lecture.Devant moi , sur ma petite tablette, trois ouvrages posés :« Les 81 frères » de Romain d’Huissier », « La machine s’arrête » de E.M.Forster et de » Le dernier songe de Lord Scriven » de Éric Senabre. Et comme vous pouvez vous en douter, je vais évoquer ce dernier titre. J’avais déjà fort apprécié sa trilogie « Sublutétia » se déroulant dans le sous-sol Parisien habité par une bien étrange civilisation et je me suis donc précipité ( avec ce retard propre à la gigantesque pile de livres à lire) sur son dernier roman au titre assez intrigant.
« Bizarre, vous avez dit bizarre ? Il n’existe pas à ma connaissance d’ouvrages en français ayant relaté les aventures d’une détective parvenant à résoudre des meurtres en se plongeant dans un profond sommeil l’auteur a déjà donc fait preuve une grande d’originalité : Son rôle consiste à surveiller le sommeil de son nouveau patron après un rituel bien spécifique réclamant un don de chanteur afin de psalmodier un sort bien particulier. Le temps de sommeil doit être précis, sinon le dormeur risque d’y laisser sa vie ou sa raison. Une expérience assez troublante pour cet explorateur des songes puisqu’il visualise tout sous forme de symbole et qu’il lui faut par la suite tout interpréter de la façon la plus proche possible de la réalité. Commence alors une singulière aventure où les deux héros vont être plongés non pas dans une simple affaire de meurtre, mais dans une gigantesque machination pouvant mettre à mal les intérêts de l’empire britannique.
Ce que j’ai le plus apprécié dans ce roman, outre le style alerte qui se laisse lire d’une traire sans presque jamais reprendre son souffle, c’est l’atmosphère si particulière qui se dégage de cet univers légèrement feutré où évolue des personnages au caractère bien trempé. La relation entre Christopher et Banerjee est particulièrement savoureuse et l’on retrouve bien souvent cette « dualité » pourtant fort bien équilibrée entre d’une coté le journaliste qui est un homme d’action et ce singulier détective, imprégné de sagesse Hindoue qui, bien que profondément déterminé, temporise son associé/disciple. Grâce à son calme qui n’est pas du tout une forme de flegme toute britannique, il parvient bien souvent à se dépêtrer de situations parfois un peu délicates. Moi qui suis un passionné de détectives de l’occulte, j’ai trouvé dans ce roman ce doux parfum de l’étrange qu’il me plaît à respirer et j’ai trouvé qu’il flotte dans cette aventure un équilibre parfait entre action , mystère et enquête policière. : L’ombre du Sâr Dubnotal et des récits spirites du début du XXéme siècle plane sur ce roman d’une grande originalité. Une enquête qui d’ailleurs va même réussir à nous plonger dans une histoire qui frôle la science-fiction avec la découverte d’une curieuse machine que je vous laisse le soin de découvrir. Une enquête qui d’ailleurs va même réussir à nous plonger dans une histoire qui frôle la science-fiction avec la découverte d’une curieuse machine que je vous laisse le soin de découvrir. on s’attache au héros, on déteste les méchants, on rigole des figures caricaturales, bref il y en a pour tous les goûts !
Au final, un roman parfaitement équilibré qui se dévore sans une once d’ennui et l’on se met à espérer qu’Éric Senabre dont nous apprécions la plume alerte et imaginative nous régalera de prochaines aventures de ce détective hors pair, grand spécialiste de la migration des âmes et qui vient, de par sa stature si particulière et bigrement intéressante, rejoindre le panthéon des détectives de l’étrange dont nous avions perdu la trace depuis quelques années. Un sacré plaisir de lecture que je ne peux que vous recommander chaudement.
« Le dernier songe de Lord Scriven » de Eric Senabre édition Didier Jeunesse . Couverture de Taï-Mare Le Thanh
Je ne lis pas pour le plaisir de lire, mais pour le plaisir que va m’apporter la lecture, Il en est ainsi des ouvrages que l’on va vite oublier et peut-être même ne pas terminer et d’autres qui vous plongent dans cette délicieuse sensation de ravissement et dont les mots vous portent à chaque instant, vous poussent à tourner les pages avec une grande avidité, afin d’en savoir plus, toujours et encore plus. Le dernier roman de Stéphane Przybylski « Le marteau de Thor », entre dans cette catégorie d’ouvrages qu’il vous est impossible de lâcher, car il est écrit non seulement avec une grande clarté aux style fluide et plaisant, mais l’on sent derrière cet écrivain de science fiction, l’historien amoureux de sa spécialité qui arrive avec un langage d’une incroyable compréhension, à vous faire aimer l’histoire et plus particulièrement celle de la seconde guerre mondiale : alors imaginez pour une fan comme moi ! Tout comme le premier tome « Le château de million d’années » il concilie avec brio, histoire, espionnage, aventure science et fiction pour obtenir un cocktail explosif entre X-files, Indiana Jones et roman historique. J’avais pourtant lu son premier volume il y a presque un an, mais je me suis replongé dans ce « Marteau de Thor » comme si de rien n’était,faisant fi des mois écoulés, c’est pour vous dire à quel point cet auteur à de la classe, possédant cette particularité de parsemer son roman de petits rappels discrets qui vous replongent comme si de rien n’était au cœur de l’action. Usant avec une grande habileté de nombreux « Flash-back » permettant des ruptures dans le récit afin d’éviter des longueurs et une lassitude du lecteur, il trouve là un procédé narratif particulièrement brillant qui pousse le lecteur à ne jamais arrêter son avancée. Les personnages les plus détestables y sont fascinants, les héros, personnages souvent falots, viennent rompre l’idée que nous pouvions nous en faire, les espionnes pulpeuses et terriblement désirables, un univers de personnages pris dans la tourmente de l’histoire lors de l’un des épisodes les plus sombres de notre histoire et qui risque de le devenir encore plus face à de nouvelles découvertes. Tout ce beau monde évoluant dans un monde impitoyable où l’action ne laisse que peu de place au repos du lecteur.On voyage à travers le monde entier et l’on repose abasourdi cet incroyable voyage immobile d’une grande intensité et d’une grande richesse thématique.
Oui, cette œuvre fera date, car elle est brillante, bien construite et terriblement bien réfléchie et révèle tout le respect de son auteur pour les genres qu’il y aborde avec détermination et amusement. Car son œuvre laisse échapper de temps à autres quelques indices pour toute l’affection qui porte aux domaines qui nous intéressent et l’épilogue de ce deuxième volume, qui nous frustre, car nous avons envie de savoir, en est la preuve irréfutable et qui devrait à mon avis plaire à bien des Savanturiers et plus particulièrement ceux d’une certain type de revue américaine,
Coup de cœur et coup de chapeau, hâte, et même plus que hâte de lire la suite, car il s’agit là de l’une de ces œuvres qui vous pousse encore et toujours à lire toujours plus. Un roman qui me donne du baume au cœur, qui vous stimule et je ne peux que vous conseiller une chose : lisez-le, vous ne le regretterez pas, foi de Savanturier !
Un grand Bravo également à Aurélien Police pour cette nouvelle et magnifique couverture!
De nos jours dans les littératures de l’imaginaire, il y a ceux qui suivent un phénomène de mode et nous abreuvent de textes insipides, sans âme ni consistance et puis il y a ceux, que je compte fort heureusement parmi mes amis, qui eux par contre nous régalent de romans ou de nouvelles qui font la joie des lecteurs que nous sommes et qui entretiennent de leurs plumes fécondes et originales cet appétit de mets littéraires délicats et savoureux qu’il nous faut, sous une incontrôlable dépendance, absorber régulièrement et en grande quantité. D’ailleurs, puisque nous parlons cuisine, qui mieux qu’un Gascon, pourrait nous charmer par sa cuisine riche, savoureuse et nous offrir une table que nul amateur ne se verrait refuser ? Il est des domaines en littérature où l’on ne plaisante pas avec l’honneur, la bagarre et la bonne chère et si un auteur était en mesure de mélanger avec maestria ces trois ingrédients d’une aussi admirable façon, il ne pouvait s’appeler autrement que Jean-Luc Marcastel.
Vous dire que j’ai été enthousiasmé par le premier volume de sa série « Le Simulacre » est un doux euphémisme et je puis confesser sans nul doute que cette trilogie fera date dans ma mémoire de lecteur et…..de Gascon ! Inventer un univers original et cohérent n’est pas chose facile et l’auteur, par un incroyable tour de force de l’imaginaire, vient de nous créer un monde fort divertissant, foisonnant, haut en couleur et en mesure d’accrocher le lecteur de la première à la dernière ligne. Au travers de cette habile transposition du héros le plus célèbre du roman de cap et d’épée, d’Artagnan, de sa palette puissante et truculente , il ainsi réalise une œuvre qui ne laisse pas la place à l’ennuie mais en plus génère en nous cet état d’exaltation littéraire poussant le malheureux lecteur, victime de cette savoureuse addiction, de ne plus lâcher le livre ou alors bien à regret, non sans avoir asséné un coup d’estoc au pauvre fou ayant eut l’outrecuidance de nous interrompre. Je vous avais dit après la lecture de sa trilogie « Les enfants d’Erébus » , combien j’appréciai son écriture cinématographique, ayant un souci quasi-obsessionnel du détail où chaque mot trouve une place parfaite dans une action bien menée et un rythme qui jamais ne faiblit et s’il est une chose qui ne manque pas dans cette série plus que prometteuse c’est bien le sens du rythme, le souffle de l’aventure et cette dévorante envie de faire partager avec le lecteur son goût pour l’imaginaire.
On retrouve dans son écriture cette générosité et cette envie de faire plaisir, car le difficile métier d’écrivain, c’est de donner au lecteur cette jubilation, cette gourmande envie de se laisser emporter par le feu de l’action et de trouver, dans les différents personnages, ce parfait équilibre où chacun de nous parviendra un peu à se retrouver et tout y passe : le héros sympathique, le serviteur fidèle et paternel, la belle effrontée qui ne manque pas de courage, les sales trognes patibulaires, les menteurs, les voleurs et surtout cette figure ô combien fascinante sous les traits du repoussant « Ankou », le roi des souterrains ! Cet univers ainsi créé est exploité avec justesse et ce tour de force d’avoir mélangé une thématique Steampunk à l’époque des mousquetaires, est tout simplement géniale. Imaginez un XVIIe siècle où notre monde fut envahi par des envahisseurs célestes ayant des intentions de mort et de destruction, pour ne pas dire cannibales, et sauvé comme par miracle par des « Archanges » aux intentions assez ambiguës. Il en résulte une technologie complètement bouleversée où les chevaux deviennent métallique et se mettent à voler, où les gardes du cardinal sont des « Mécanomates » que le ciel de paris est traversé de « Libbellugence » et de maisons aériennes, que les gentilshommes, comble de l’élégance, achètent un peu de jeunesse en se faisant greffer des organes mécaniques, une terre enfin, où il est possible de créer des copies conforme de n’importe quel individu : des Simulacres ! Dans cet univers où cohabitent splendeur et décadence, riche d’un progrès qui n’efface pas les traces d’un monde accablé par les guerres et la misère, la belle Estelle se verra gratifiée d’une mission assez mystérieuse, transporter un singulier objet, un bijou renfermant de précieuses données et que de viles et terrifiantes créatures vont tenter de récupérer coûte que coûte. Va suivre une épopée pleine de rebondissements, de coups de théâtre, de folles poursuites et de duels à l’épée énergétique. Jean-Luc trouve dans cette œuvre, manière à exploiter tout son talent et son ingéniosité, emporter le lecteur dans une folle course-pousuite qui ne laisse aucune place aux temps morts et qui en outre construit son récit avec un sens de l’épique et du roman populaire avec tout le talent, la verve et le le savoir faire de ses vénérables prédécesseurs. À la lecture de cet étourdissant récit qu’il vous faudra absolument acquérir, nul doute que le jury qui lui attribuèrent le « Grand Prix de l’imaginaire 2015 » et le « Prix actu SF de l’Uchronie » ne s’y sont pas trompés et firent preuve d’une excellente marque de bon goût. Un auteur à lire et à découvrir et pour les malheureux qui n’auraient pas encore eu la chance d’en découvrir l’incroyable talent, vous savez ce qu’il vous reste à faire ! pour les autres, il vous faudra comme moi,découvrir la fin de cette palpitante trilogie ou d’attendre avec une impatience non feinte, la parution de sa prochaine saga se déroulant au centre de la terre et qui, selon certaines sources plus que fiables, est à la hauteur du reste de son œuvre.
Ajoutez à cela de magnifiques illustrations de Jean-Mathias Xavier qui, de son crayon avisé et inspiré réalise à chaque début de chapitre une magnifique planche parvenant à merveille à capter l’esprit de ce que tout Jean-Luc nous fait vivre dans cette étourdissante odyssée et vous aurez deux bonnes raisons d’acheter non seulement le volume , mais toute la trilogie
Bravo cher ami, ton talent est à la hauteur de ta disponibilité et de ta gentillesse, ce qui, pour un solide gaillard comme toi, est la preuve que force peut cohabiter avec sensibilité !
« Le Simulacre » ou la seconde vie de d’Artagnan de Jean-Luc Marcastel, Tome 1.Éditions du Matagot. Couverture et illustrations intérieures de Jean-Mathias Xavier
Pour commander l’ouvrage et consulter les autres volumes cliquez ici: http://www.matagot.com/spip.php?page=article&id_rubrique=294&produit=294&lang=fr
Je viens donc de terminer le cinquième volume des aventures de Andrew Singleton et James Trelawney et c’est avec regret que le livre a été refermé, tellement l’histoire m’a passionnée, me plongeant dans cet état de béatitude que nous autres lecteurs atteignons, à la lecture d’un excellent ouvrage. Je ne vous cache pas toute l’admiration que j’éprouve pour cet auteur talentueux et si parfois j’ai une prédisposition à un enthousiasme des plus enjoué, c’est parce qu’il existe fort heureusement des écrivains qui nous font réellement plaisir et qui ne boudent ni leur temps ni leur générosité afin de nous offrir des romans tout simplement parfait : Une générosité qui est un gage de respect vis-à-vis du lecteur et ça les amis, c’est une bénédiction.
Car le détective de l’occulte, est un genre particulier, répondant à certains critères que nous autres amateurs inconditionnels, recherchons avec une grande avidité. Un domaine où le maître mot est sans contexte l’originalité, en abordant une thématique peu ou prou utilisée. Avec Fabrice Bourland, chaque roman est une invite à autant d’univers fantastiques des plus innovants, avec cette précision conférant à la maniaquerie, attribuant à l’histoire une certaine authenticité qui n’est pas pour nous déplaire. Une minutie d’orfèvre dans la description des lieux, des personnages et de certaines technique utilisées à l’époque ( les descriptions des différentes formes d’embaumements sont un modèle du genre) qui rendent l’avancée de l’enquête encore plus trépidante avec la construction de chapitres forts remarquables qui au fur et à mesure, s’infiltrent en nous en déversant dans nos circonvolutions cérébrales,comme un produit indispensable dont nous ne pouvons nous passer : Les romans de l’auteur entraîneraient-ils une dépendance ?
Ainsi dans « Le serpent de feu » le héros va-t-il se retrouver à poursuivre une ombre inquiétante, dans une fumerie d’opium située dans une lugubre Chinatown,décrite avec une telle authenticité que l’on à l’impression d’en ressentir les effluves d’opiums. Tout y transpire, la crasse, la misère, la corruption et le vice. Ce Chapitre intitulé « Au paradis vert de Ji Hao » est un brillant exemple du talent de l’auteur, qui se déguste avec délectation me donnant ainsi l’impression de revivre les heures les plus glorieuses de « Fu-Manchu ».Tout comme cet autre chapitre, un de mes préférés, « « Aleister Crowley » où la rencontre Andrew Singleton avec cet édifiant personnage dans les deux sens du terme, grand maître d’une société secrète et dont les talents culinaires donnent lieu à des recettes d’une grande complexité à base de substances que la morale réprouve et qui ne manqueront pas de vous faire planer le cas échéant, pour le restant de la journée.
Une investigation fort troublante qui va conduire nos deux personnages, certainement les plus intéressants de cette nouvelle vague des détectives de l’occulte, à la poursuite d’un homme possédant un étrange pouvoir sur les morts. Un enquête initiatique où la toute nouvelle passion pour l’étude de la fameuse « Golden Dawn » (Aube dorée) va mener ces deux intrépides traqueurs de mystères, aux frontières de la mort. Car dans ce roman, dont le développement et la minutie exemplaire ne peuvent que forcer l’admiration, l’auteur ne se livre pas au simple exercice d’une éventuelle invasion de « morts-vivants » comme pourrait le laisser supposer le résumé de l’éditeur, mais d’une plongée ténébreuse dans les mystères des sociétés secrètes dont le but ultime n’est autre que de se rapprocher au plus près des arcanes des sciences ésotériques, au risque parfois de se brûler les ailes et d’y laisser la vie. Et comme pour apporter une touche supplémentaire « Le serpent de feu » baigne dans une ambiance d’avant guerre sur fond de couronnement du roi George VI rappelant au plus cinéphiles d’entre nous, le fameux film deTom Hooper « Le discours d’un roi », et des références au cinéma, il y en aura bien d’autres. Décidemment Fabrice Bourland ne nous laisse aucun répit.
Un roman foisonnant ,riche et inventif qui ne fait que renforcer toute l’attention particulière accordée à un auteur dont j’attends à chaque fois avec une impatience de plus en plus grandissante le prochain roman.Je m’étais un peu plus longuement étendu sur les qualités intrinsèques de cet auteur lors d’un antérieur coup de coeur et la lecture de cette cinquième aventure ne fait que confirmer quelques chose que je savais déjà
Allez juste une petite critique, la couverture assez banale et qui ne met pas en valeur cet excellent roman, peut-être aurions nous aimé quelques chose de plus…fantastique? Mais comme le dit le proverbe « Qu’importe le flacon… »
A consommer sans modération toujours chez le même éditeur, les autres aventures de ce duo de choc :D
- « Le fantôme de Baker Street » N° 4090.
- « Les portes du sommeil » N°4091.
- « La dernière enquête du chevalier Dupin » N° 4207
- « Le diable du Crystal Palace » N° 4260
« U-Chroniques » Anthologie de nouvelles. Editions ImaJn’ère « Sous la cape ».2012.293 pages
Il existe des mots qui furent pendant longtemps perdus dans cette « Terra Incognita » de la langue Française, seulement connus des rares initiées ou de ces intrépides explorateurs qui n’hésitaient pas à braver des territoires hostiles et barbares. Le terme « Uchronie » fait partie de l’un d’eux et il m’arrive souvent par jeux, de le placer dans une conversation et je suis toujours stupéfait de voir les réactions d’interrogations que ce petit mot suscite sur le visage de mes interlocuteurs. Mais loin de moi de faire un reproche de quelque nature que ce soit, car il rentre dans cette catégorie des mots étranges, pas facile à placer dans une conversation, tout comme le mot « Dystopie » d’ailleurs, si ce n’est entre gens de bonne compagnie ayant quelques accointances pour les littératures science fictionnelles….. Je me rappelle de ce petit frisson que fit naître en moi cette notion d’altération du temps. Comme il doit être fascinant de pouvoir ainsi jouer avec le cour de l’histoire et de pouvoir se déplacer dans un passé figé à jamais et de pouvoir en modifier la structure immuable. La notion de temps a toujours fascinée les écrivains de l’imaginaire et cette fonction « uchronique » fut toujours étroitement liée avec celle de voyages dans le temps, car le souci majeur de ces téméraires voyageurs temporels fut de bien prendre garde de ne pas modifier ne serait-ce que le moindre« battement d’aile d’un papillon ». Mon premier texte marquant dans le genre, et qui garde encore après plusieurs années le même impact, fut le roman de Poul Anderson « La patrouille du temps », cette unité spéciale composée d’hommes du futur et chargés de lutter contre les altérations de l’histoire qui pourraient perturber le cours normal des choses. Le ton venait d’être donné et l’ouverture de la porte de ces « brigades spéciales » allaient fleurir dans la littérature : car on ne joue pas ainsi avec les paradoxes temporels !
Dans le futur, la machine à voyager dans le temps est devenue un moyen de locomotion relativement fréquent et quelques petits « plaisantins » s’efforcérent de vouloir modifier certains événements qu’ils jugérent un peu trop conventionnels. Cette idée d’une « police du temps », fit son chemin, car depuis Enrique Gaspard y Rimbau et son « Anacronopéte » en passant par H.G.Wells et sa « Machine à voyager dans le temps » et Octave Belliard avec un « Aventure d’une explorateur qui explora dans le temps » les règles ont bien changées et le fait de pouvoir ainsi à sa guise se déplacer sur cette ligne temporelle, vient modifier terriblement notre vision de l’histoire et modifier une chronologie des plus ordonnée
Qui n’a pas rêvé à un moment ou un autre, de rencontrer un personnage célèbre ? Certainement un écrivain afin de lui faire dédicacer une ou l’intégralité de ses œuvres…Qui n’a pas espéré à un moment de son existence éliminer un criminel de guerre, réduire à néant une invention ou une découverte pouvant nuire au développement des plus serein de notre humanité ? Qui n’a pas rêvé de changer le cours d’une vie morne et sans saveur ?
En règle générale, une uchronie va se jouer sur deux tableaux : L’histoire nous apprend qu’à la suite d’un événement inattendue et/ou imprévisible le cours de notre histoire a subitement changé de direction, par une phénomène naturel ou accidentel. A ce niveau toute notre histoire a été réécrite depuis l’événement causal et nous évoluons dans un contexte certes parallèle à notre propre réalité mais dont aucun élément « scientifique » n’est venu perturber le bon déroulement. Le narrateur nous place dans un contexte où notre planète a évoluée en fonction de cet événement. Mais il y a également le cas d’une machine nous donnant la possibilité d’arpenter notre passé, auquel cas l’auteur s’efforcera de placer un élément pouvant influencer notre futur et de créer une autre réalité possible. Les possibilités sont alors infinies, créant une multitude de mondes divergents qu’il nous sera possible d’emprunter à volonté…une véritable pagaille : Mais que fait la police…temporelle ?
C’est un concept qui existe depuis longtemps dans la littérature conjecturale mais qui n’avait jamais été source d’une étude assez fouillée. Au départ, c’est l’anticipation militaire qui s’en est donnée à cœur joie avec des romans où l’histoire fut complètement bouleversée par des batailles dont l’issu ne fut pas ce à quoi l’on s’attendait : « Si les Allemands avaient gagnés la guerre » par exemple qui reste une des thématiques la plus utilisée ( usée jusqu’à la trogne pourrait-on dire) Si, Si Si……avec des « Si », nous pourrions mettre Paris en bouteille dit le vieil adage et c’est ce que vont s’efforcer de faire nos admirables écrivains : Réinventer notre histoire à partir d’un élément décisif, ce petit rien qui en une fraction de seconde peut tout faire basculer.
Depuis il y a eu l’ouvrage incontournable de Eric B.Henriet et sa formidable « Histoire revisitée » (Editions Encrage collection « Interface » 2004), un gros pavé passant en revue toutes ces altérations modifiant de la plus incroyable des façons nos manuels d’histoires. Bien avant cela il y eut la précieuse anthologie dirigée par André-François Ruaud « Passés recomposés» ( Editions Nestiveqnen. 2003 )qui sur douze textes d’écrivains de talents nous proposa une vision du monde quelque peu perturbée par de minuscules changements à l’échelle cosmique mais qui eurent des conséquences déterminante sur le destin de l’humanité.
Deuxième anthologie consacrée à ce genre plein de surprises et objet de ce billet aujourd’hui : « U.Chroniques » aux éditions ImaJn’ère « sous la cape ».
Un volume de 293 pages accueillant 16 nouvelles pour autant d’écrivains, sous une couverture des plus belle, justifiant à elle seule l’achat de ce merveilleux petit volume des plus réjouissant.
Si vous avez des amis ayant quelques réticences avec la terminologie du mot « Uchronie » je vous conseille de lui faire lire la préface de Julien Heylbroeck. Une préface qui en fait pourrait être une nouvelle si…seigneur voilà que moi aussi je me mets à « Uchroniquer » néologisme qui, dans le cas présent n’est pas un gros mot, mais un état dans lequel vous plonge une lecture trop répétitive de ce genre de fariboles de l’imaginaire. La préface vous disais-je, est des plus savoureuse et afin de poser les bases de cette thématique, j’ai effectué sa lecture en présence de ma charmante épouse qui est profane dans le domaine et dont la réaction fut des plus enjouée : Arriver sur deux pages à définir un univers aussi complexe en vous faisant marrer, voilà une exploit qui relève de heu !…l’utopie ?
Seize nouvelles réalisées par de talentueux écrivains dont certains sont connus des milieux spécialisés, d’autre moins mais toutes témoignent d’une imagination et d’une rare sensibilité sur un concept qui peut paraître assez banal, mais demande toutefois une certaine maîtrise du langage, tout comme de l’histoire d’ailleurs, celle avec un grand « H ». Le recueil se divise en différentes « parties », où l’histoire est altérée de nombreuses façons, témoignant de sensibilités différentes et d’approches originales et innovantes. Ne me demandez pas un inventaire complet de chacune d’elles, il y en a pour tous les goûts et chaque auteur, qu’il soit chevronné ou faisant preuve d’une plume relativement récente, apporte à cette anthologie tout le charme et le plaisir de lecture propre à des gens passionnés de littératures de l’imaginaire. Car voyez vous dans cette « U-chroniques » au titre on ne peut plus approprié, tous nous prennent par la main et nous conduisent dans ces univers qui, par un formidable « effet domino », nous confrontent à une leçon d’histoire des plus instructive et des plus audacieuse. Bon je ne voulais pas faire le détail, alors tant pis je vais tout de même les citer toutes….
D’une histoire pleine de nostalgie au parfum de révolution (« L’été insensé » de Roland C.Wagner) , de poésie toute militaire (« Le vol et la nuit » de Romual Herbreteau), de plaisir charnel (« Dobby 1er Maître du monde » de Sylvie Jeanne Bretaud ) de religion ( « Mourir à Montségur » de Philippe Ward ) de cosmogonie ( « L’expérience astrale de Mike Mana » de Batista & Batistuta), de voyageur temporel facétieux ( « Diem perdidi »de Julien Heylbroeck), d’une plongée dans les comics (« Dark Night » de Artikel Unbekannt), d’une uchronie délirante qui vous mange presque le cerveau «( « Oups..they did it Again » de Robert Darvel )d’Uchronautes anarchistes ( « Uchronis » de Jérome V), d’un artiste qui va se révéler pour le bien de l’humanité (« Arte 88 » de Jean-Hugues Villacampa), d’une agence spécialisé dans les anomalies temporelles (« Formax et les Aleximores » de Pierre Laurendeau) de la revanche d’un Corse mégalo (« Détails d’importance » de Léa Silva ), de la revanche des hommes préhistoriques ( « I have a dream » de Romain d’huissier ) et de celle des dinosaures ( « Un millionième de seconde » de Patrice Very) et terminer sur une histoire de chamanisme indien ( « La deuxième bataille de Brandywine » de Arnaud Guidet), vous voyez que dans ce copieux volume tout est fait pour vous apporter plaisir, réflexion, amusement et triturage de méninges…dans le bon sens cela va sans dire. Le volume se termine par un émouvant témoignage dont je vous laisse la surprise
Chaque texte est accompagné d’une superbe composition N& B de Fransico Varon (concluant heureusement la nouvelle) que je vous déconseille de regarder avant d’entamer l’histoire (j’ai souvent cette sale manie en ce qui me concerne) car elle vous donne parfois un indice précieux sur le contenu ou la chute des plus inattendue.
« Alors, alors ! » me direz vous, quelle nouvelle as-tu préférée ? Toute je vous répondrais car elles possèdent un charme particulier constituant toute leur identité et le talent de l’auteur. Mais bon en ce qui me concerne, j’ai bien sûr un petit faible pour deux ou trois d’entre elles, mais dans le cas présent mon avis importe peu, car parler de préférence, serait tout simplement subjectif et je laisse donc à chacun le plaisir de découvrir celle ou celles qui conviendront le mieux à ses attentes et sa sensibilité du moment.
En regard de cette anthologie des plus enthousiasmante, je crois que l’unique constat à faire, est cet immense potentiel dont bénéficie l’imaginaire Français. Il existe une ligne temporelle qui s’étire ainsi sans jamais se briser, une génération d’auteurs laissant place à une toute nouvelle. Rien de plus logique me direz vous, certes mais lorsque cette ligne faite de talents aussi différents, ne trouve dans sa continuité aucun obstacle ne pouvant en interrompre son magnifique tracé, il ne fait aucun doute que nos bibliothèque continueront à se remplir d’écrivains de talent qui procureront aux lecteurs délicats que nous sommes, de savoureux repas de livres aromatiques et aux goûts puissants.
Seul petit point noir au tableau, la fragilité de la fine pellicule transparente qui recouvre le livre. Elle à tendance à s’enlever trop facilement au risque d’abîmer la superbe illustration. Mais je pinaille, voilà ce que c’est que d’être un indécrottable maniaque…
Foncez vous dis-je, Vous ne le regretterez pas !
Qui n’a pas rêvé étant gamin d’être un implacable pirate, de naviguer sur les eaux chaudes et clémentes des caraïbes, à la recherche de fabuleux trésors ? Personnellement, et comme beaucoup de jeunes aventuriers, j’ai effectué mes premières armes avec « L’île aux trésors » et je garde de cette lecture le doux souvenir d’une vie de flibuste trépidante et exaltante. Mais être un écumeur des mers est tout autre chose, car si avec nos yeux d’enfants nous nous laissâmes bercer par le doux tangage de ces fascinants navires, la réalité est bien loin de cette vision idyllique et idéalisée. C’est un petit peu à l’image du chevalier pour lequel nous nous forçons à croire qu’il personnifie la pureté de l’âme et la noblesse des sentiments. Une épée reste une épée et un pavillon frappé d’une tête de mort un symbole d’âpreté des cœurs et de sécheresse des sentiments
Laurent Whale dans son roman « Les pilleurs d’âmes » nous plonge dans une réalité des plus concrète en nous livrant, sur fond d’intrigue conjecturale, un récit flamboyant et haut en couleurs où le fracas des armes et l’odeur de la poudre sont des constantes incontournables. Pour faire simple, un homme venu du futur, chargé de réguler les paradoxes temporel et surtout certains recrutements intempestifs, se trouve aux prises avec un monde cruel et impitoyable. Sa mission est de repérer un « recruteur » venu également du futur, personnage dont la mission est de ramener dans son monde des êtres suffisamment vils et redoutables, capables d’assumer avec toute la bestialité qui les caractérise, certains corps armés de notre lointain avenir. A croire que la civilisation recouvre de son vernis tenace les réflexes primitifs qui sommeillent en nous. L’histoire est suffisamment riche en hommes barbares et sanguinaires pour qu’il soit ainsi possible de venir « faire son marché » et piocher les mauvaises graines qui pullulent dans le fertile terreau de l’humanité.
A bord d’un engin des plus singulier, avec qui il fait véritablement corps et pour qui il entretient une relation « fusionnelle » (une idées des plus passionnantes)Yoran le héros de cette histoire va prendre l’identité de Yoran Le Goff, en ces temps barbares cela passe mieux inaperçu, et se faire enrôler sur « La Providence » un des navires du terrible capitaine Jean-David Nau dit L’Olonnais. Un sacré lascar celui là, de la graine de brigand comme il s’en faisait à l’époque et dont le courage et la roublardise n’ont d’équivalent que sa férocité et son goût prononcé pour le massacre. Yoran quand à lui est un aventurier dans l’âme et se transfert d’identité n’est pas pour lui déplaire, bien au contraire, il voit dans cette mission une raison supplémentaire de parfaire son éducation « physique » dans un univers où la force musculaire est un atout majeur, un homme en fait qui aime à relever les défis. Sa délicate mission sera de repérer et de neutraliser le recruteur avant qu’il n’accomplisse sa redoutable besogne. Le seul problème c’est qu’il va lui être très difficile de repérer un individu qui, comme lui, vient de revêtir les attributs des ces terribles gibiers de potence.
Disons le tout de suite, le roman est le prétexte pour l’auteur de nous faire voyager avec ravissement à une époque où des individus sans foi ni loi, parcouraient les océans du globe non seulement à la recherche de quelques butins mais aussi afin d’assouvir leur soif de violence et de sang. Une époque des plus sanguinaires où la crasse et les tueries étaient de mise, où seul le sabre d’abordage tirait un trait final à toutes discussions. Il nous fait alors vivre un épisode mémorable de cette période, avec un sens de la description tout à fait incroyable et nous décrit certaines scènes de batailles avec un tel réalisme, que nous avons presque l’impression de sentir l’odeur de la sueur et de la poudre. Pour un peu je poursuivais la lecture avec une bouteille de rhum à mes cotés.
Il y a deux temps forts dans le roman, celui où les pirates livrent bataille à la flotte espagnole, un petit bijou de bataille maritime « à l’ancienne » et bien évidemment l’attaque du port de la Havane, qui reste une merveille de stratégie mais surtout un témoin de la sauvagerie humaine. Par ses admirables descriptions, il nous immerge complètement dans une époque barbare et hors du commun dont il est préférable d’en apprécier toutes les saveurs bien confortablement assis dans un fauteuil : Ils ne rigolaient pas beaucoup à l’époque !
Le récit est à ce point maîtrisé que, loin d’être une spécialiste de cette époque fascinante et implacable, j’ai parfois eu l’impression d’en être un des acteurs. Un monde régit par ses règles, ses codes, une époque que finalement le héros arrive à comprendre et presque à aimer en raison de cet état d’exaltation que parfois elle lui procure. Un travail bien documenté et qui vous donne envie de relire tous vos classiques car la France, c’est aussi le pays de la flibuste.
J’ai de plus vraiment éprouvé une certaine empathie avec les deux personnages principaux, car outre Yoran, l’aventure ne pouvait être parfaite sans l’adjonction de son double du passé, son frère d’arme. Ainsi Maximilien « Bras-de-fer » sera t-il le compagnon idéal et incontournable, celui sur qui l’on peut compter et qui ne vous laisse jamais tomber quoiqu’il arrive. Cet attachement pour ces deux héros provient sans aucun doute de cette aisance d’écriture où, dans un style parfait, limpide, parfois très visuel, l’auteur parvient à nous faire passer un maximum d’informations, sans alourdir la narration du récit. Il en découle des scènes captivantes et des passages jouissifs à souhait où la complicité parfaite des deux lascars est un atout supplémentaire au déroulement du récit.
Le final est à la fois simple mais diablement ingénieux et lorsque les informations se recoupent et que nous est dévoilé la clef de la mission, nous replongeons, formule ô combien adéquate, dans un univers conjectural qui trouve sa place la plus naturellement au monde et vient s’imbriquer dans un contexte temporel qui finalement trouve une place légitime. Les 237 pages du roman se laissent dévorer avec un plaisir évident et cela le m’étonnerait pas que Laurent Whale, Savanturiers dans l’âme et passionnant raconteur d’histoire, ait trouvé dans quelques fantastiques brocantes la clef lui permettant de voyager à bord d’une de ces magnifiques machines temporelles si bavarde mais si attachante et de venir nous faire profiter par un habile jeux d’écriture, après une virée au XVII eme siècle, d’une escapade aussi stimulante
Voilà un roman qui se laisse lire sans ennui, on le prend et on ne le lâche plus, c’est intelligent, captivant et nous donne cette douce et agréable impression de ne pas avoir fait un achat inutile.J’ai même eu par moment l’impression de lire une de ces scènes sanglantes et épique dont R.E.Howard avait l secret.Croyez moi, par les temps qui courent, c’est déjà une excellente chose. Un prix Rosny Ainé 2011 bien mérité !
Dernier petit coup de chapeau pour Eric Scala, l’illustrateur de cette magnifique couverture qui mélange avec perfection les deux thématiques du roman. Du bon boulot qui nous prouve que certains vaisseaux maritimes ou autres, peuvent voler.
« Aujourd’hui vivants, demain morts, que nous importe d’amasser ou de ménager, nous ne comptons que sur le jour que nous vivons et jamais sur celui que nous allons vivre ».
Alexandre-Olivier Exquemelin.
« Les pilleurs d’âmes » deLaurent Whale. Ad AStra éditions. Collection « Ad-ventures ».2010
Alors que l’on pensait la littérature fantastique chose morte et éculée, ayant utilisée toutes les pistes et explorée, le moindre recoin de ses sinueuses circonvolutions fantasmagoriques, il est parfois des ouvrages qui nous surprennent encore par leur originalité et leur sens aigue d’une ambiance des plus réussie.
Je viens donc de terminer l’ouvrage de Frédéric Merchadou, « Ange Maudit » publié aux éditions « Malpertuis ». Vous connaissez toute l’affection que je possède pour ce dynamique éditeur qui nous prouve une fois de plus par ses choix et ses goûts sûrs et précieux, la qualité de ses publications. Une garantie de lectures enchanteresses.
Je ne connaissais pas l’auteur, rencontré lors du festival zone franche et je dois dire que mon premier contact avec ce personnage charmant et enthousiaste, fut pour moi assez révélateur et participa grandement à faire l’acquisition de son ouvrage dont j’avais du coin de l’œil, apprécié la superbe couverture.
Mais faut-il préciser que l’un des arguments de vente pour un éditeur, est de savoir attirer le regard du lecteur ? Pour l’occasion, je pense que c’est un coup de maître et toute l’atmosphère bizarre et spectrale du roman est parfaitement mise en valeur dans la magnifique composition de Philippe Jozelon. Toute l’essence même du roman est ainsi retranscrite d’une manière percutante et envoûtante. A mon humble avis, une des plus belles illustrations de la collection.
Il y avait donc dés le départ une forte aura positive et je ne doutais pas un seul instant des qualités intrinsèques d’une œuvre qui, d’après le résumé figurant au second plat de couverture, venait renouer avec cette forme narrative si chère à nos auteurs de cette fin du 19eme.
L’attente fut à la hauteur de mes espérances et le livre fut donc dévoré avec la même délectation que les savoureuses histoires d’un Joseph Shéridan le Fanu d’un Shirley Jackson ou d’un Montague Rhodes James….c’est tout dire ! Je me rappelle de cette ambiance si particulière de ces auteurs qui, à chaque lecture, me faisaient agréablement frissonner, pas forcement de peur, mais du plaisir sans cesse renouvelé de me plonger dans un univers ou le mystère et l’horreur flottent comme une présence tenace, impalpable et monstrueuse.
C’est une de ces histoires maudites où la peur de mourir est plus forte que tout .L’âme d’une femme ayant pactisée avec un démon, utilise son pouvoir afin de se réincarner dans le corps de ses victimes en utilisant un portrait comme « porte » afin de procéder au transfert. De générations en générations elle bénéficie ainsi d’une vie éternelle dont le prix à payer sera la brièveté d’occupation du corps lui servant de réceptacle. A ses cotés, un enfant démon à la présence obsédante et au regard aveugle, qui ne devra lui aussi sa survie que par cette énergie vitale qui circule dans les veines de son hôte et dont il s’abreuve goulûment lors de leurs rites infernaux….. « Car la vie est dans le sang » et cette engeance infernale ne trouve sa pérennité que dans le précieux breuvage qu’elle absorbe, du fanatisme de ces adorateurs et dans la peur quelle inspire aux autres. Un jour pourtant, tout va basculer ou presque, lorsque Mathias Yequel va répondre à une annonce et s’engage sur la route qui le conduira au manoir d’Herberay. Jeune peintre Parisien, ayant trop abandonné son corps et son esprit aux rêves acides d’une absinthe dont il ne peut se défaire, il pense que se séjour forcé, loin de tout mais surtout loin de la fée verte, pourront ainsi sauver son âme d’une peu reluisante fin. Il est loin de se douter que cette sinistre maison renferme bien des secrets et qu’il va se jeter tel le frêle papillon, dans l’immense toile d’araignée tissée par la maîtresse des lieux et dont les appétits insatiables et infernaux, lui réservent un sort bien pire que la mort.
Avec une telle aisance d’écriture et cette qualité propre aux talentueux raconteurs d’histoires, nul n’est besoin de faire des comparaisons. Ils possèdent leurs styles propres, ce « petit rien » faisant la différence mais dont la subtilité met en exergue toute les qualités d’un roman, sa marque de fabrique, son originalité. Lorsque Frédéric Merchadou vous entraîne dans sa descente aux enfers, vous savez qu’elle vous conduira à une mort certaine, mais avec cette étrange sensation procurée par l’anisé breuvage qui, l’espace d’un instant, provoque une euphorie passagère et comme par une sombre fatalité, vous fait accepter l’inéluctable. Le texte est insidieux, accroche votre main de la façon la plus anodine qui soit et vous fait visiter un univers où le beau est en parfaite adéquation avec le monstrueux. Il se passe quelque chose et vous savez que dans l’ombre de cette demeure au funeste passé, se trame un acte odieux dont il est impossible d’en évaluer l’effroyable teneur.
L’auteur distille son récit au compte goutte, à l’image de cette eau fraîche et désaltérante qui vient se répandre sur ce simple morceau de sucre. Elle vous enveloppe et se répand dans le moindre petit cristal, pour finir sa course au fond du verre, se mélangeant à la précieuse substance dans une union parfaite. Le résultat est aussi trouble que notre frêle existence, aussi enivrante et terrible à la fois de cette perception de l’impermanence de notre vie. C’est une expérience qui laisse le lecteur avec une sensation bizarre, comme s’il venait d’assister en spectateur au déroulement d’un drame affreux, mais se refusant à toute intervention par crainte d’éventuelles représailles. L’ambiance de ce roman agit sur vous comme une malédiction et dans un style impeccable, vous captive, vous fascine et vous envoûte. Nul doute que ce style narratif employé par d’autres, au talent des plus douteux, vous plongerait dans un désopilant ennui.
Avec « Ange maudit » il y a une sorte d’empathie qui se crée avec les personnages et l’utilisation de la première personne, ne fait que renforcer cette impression de vivre cette singulière aventure comme si l’auteur voulait nous y faire participer de manière plus directe.
Les pages défilent alors à une vitesse folle, le langage est précieux et agréable et la description de cet univers des plus singuliers revêt alors un caractère des plus étrange. Un univers coincé entre une maison maudite, dont les pièces, décrites avec force détails, sont à l’image de pores gigantesques, qui transpirent la peur et nous inspirent un malaise profond. De la chambre du grenier qui reste son seul et unique frêle refuge en passant par la cave qui recèle une bien étrange collection, cette thématique de la maison « vivante » est une des plus intéressante qui soit et Frédéric Merchadou joue ainsi avec aisance avec cet acteur hors norme, lui conférant un caractère « humain ». De cet univers relativement clos dont les limites ne dépassent pas la frontière du village, tout nous laisse supposer qu’une effroyable malédiction pèse et dans ce microcosme en dehors du temps,une fois rentré à l’intérieur, il vous est impossible d’en ressortir. Les habitants du cru semblent redouter l’ombre menaçante de la spectrale demeure, on chuchote, on tremble à l’évocation de son nom, mais par un terrible destin, sont étrangement liés aux choses abominables qui s’y déroulent.
Seul le « docteur », un vieil alcoolique au cerveau complètement détruit par la propre absinthe qu’il distille, osera se mettre en travers de ses funestes dessins. Bien mal lui en pris! La visite de sa maison donne d’ailleurs l’occasion à l’auteur de nous livrer un passage des plus extraordinaire. Car son domaine est à l’image de cette zone maudite dans laquelle il évolue. Un univers oublié de dieu où règne le désordre et le chaos, un enchevêtrement de broussailles et de végétaux en décomposition que seuls les serpents semblent vouloir investir.
Car de ces redoutables reptiles, il en sera souvent question et comme pour vouloir donner une plus grande aura corrompue et méphitique, cet animal que l’on exècre imprimera de ses ondulations redoutées les nombreuses pages de ce roman.
Fort heureusement un peu de « légèreté » va venir s’immiscer dans cette sombre aventure et comme pour vouloir adoucir une trame à l’atmosphère pesante, une histoire d’amour viendra ici rompre le destin funeste de ce candide peintre à l’esprit torturé. Un amour impossible que notre héroïne est seule à partager, souffrant de l’incompréhension de cet artiste aux sentiments refoulés qui à aucun moment ne percevra le trouble incommensurable qu’il attise en elle. A trop vouloir sublimer son art et rester aveugle aux avances insistantes de ce cœur passionné, c’est la sauvegarde de son âme qu’il met ainsi en péril. En refusant une âme au cœur pur il deviendra l’acteur passif de la continuité des exactions de ce terrible démon.
Dans un final apocalyptique où toute la tension de ce drame cauchemardesque trouve sa catharsis lors d’un cérémonial que vous ne serez pas prêt d’oublier, l’auteur nous plonge dans une horreur sans nom , usant avec brio de son savoir faire et de son originalité.
Ce roman est une pure merveille d’horreur Victorienne, un habile exercice de style, un joyau taillé avec finesse et habileté, se lisant avec un plaisir croissant sans qu’il vous soit possible de le lâcher avant la dernière page. En renouant avec une tradition littéraire qui trouva l’expression de la maturité ultime dans le roman de Oscar Wilde « Le portrait de Dorian Gray » pour la thématique du tableau maléfique et celui de Shirley Jackson « Nous avons toujours habité le château » pour celle de la maison maudite, Frédéric Merchadou nous livre une œuvre puissante et originale qui ne pourra que combler d’aise les amateurs de littérature fantastique, attachés à une écriture fine, délicate et témoignant d’un amour profond pour le genre et d’un respect exceptionnel pour les lecteurs qui l’affectionne.
Un réel et très grand plaisir de lecture qui me pousse à faire l’acquisition de son tout premier roman « Damné pour damné » éditions du Rocher
« Ange maudit » de Frédéric Merchadou.Editions Malpertuis, Collection »Absinthes,éthers,opiums ».2012