Le thème de la peinture reprenant vie ou de personnages projetés dans un tableau vivant est en général un sujet essentiellement abordé en littérature fantastique et nous citerons pour exemple des textes aussi fameux que ceux de Hoffman « Le peintre de l’église des Jésuites » récit publié dans les Contes Nocturnes en 1817, « Le chef d’œuvre inconnu » de Honoré de Balzac (1832),« Le portrait » de Nicolas Gogol (1840) « Le portrait ovale » de Edgar Allan Poe (1842), , « Le portrait de Dorian Gray » de Oscar Wilde (1890), « Le portrait du mal » De Graham Masterton( 1985). Bien souvent il s’agira de spectres ou de fantômes et donc n’impliquant aucune utilisation de machines ou d’inventions révolutionnaires. De toute évidence le propos fut des plus utilisé dans les littératures de l’imaginaire et la quantité des textes existant nous prouve la fascination qu’un telle thématique exerçait sur les auteurs.
Dans le domaine de l’anticipation ancienne comme celle beaucoup plus récente d’ailleurs, rares sont les auteurs ayant utilisés cette thématique Dans le précieux « Bulletin des amateurs d’anticipation ancienne et de littérature fantastique » Philippe Gontier admirable érudit et rédacteur de l’excellent « Boudoir des Gorgones » nous cite « La fameuse machine à peindre » de Franz Von Stuck dont l’auteur nous fit une description et une fort belle caricature dans la revue Munichoise « Fliegende Blätter » en 1888. Illustration et texte qu’il vous sera possible d’apprécier à la fin de cet article
Mais cette « machine à peindre » connu une antériorité puisqu’en se référant toujours au même bulletin, il est possible de relever dans son numéro 4 (Octobre 1990) un petit article de Guy Costes nous rapportant la couverture du « Journal amusant » (N° 598,15 Juin 1867) sur lequel il est possible d’admirer une couverture d’Albert Robida et intitulé « L’exposition !!! ». Détail des plus « amusant » il est possible d’apercevoir dans le coin inférieur gauche une curieuse machine à peindre.
Selon les sources de notre ami grand spécialiste entre autre des « Terres creuses » cette thématique sera également traitée par Carsten Raven dans un dessin publié dans le « Pêle-mêle » N°39 du 25 Septembre 1904 et intitulé « Toujours le progrés »
Par contre, il n’est pas fait état d’une autre invention, toujours du génial Robida et que l’on retrouve dans une de ses œuvres phares : « Le XXemé siècle ». En effet dans le chapitre 4 et intitulé « Photopeintres et ingénieurs », agrémenté d’un planche des plus évocatrice « « Les photopeintres au Louvre »,l’auteur nous livre un descriptif non pas à proprement parler d’une « machine » à reproduire les toiles, mais d’un ingénieux système photographique reproduisant à l’identique une toile réputée. Voici la description qui nous en est faite :
« Les progrès de la science ont permis de supprimer à peu près complètement l’usage de la palette et du pinceau. Sauf quelques retardataires obstinés, les peintres ou plutôt les photopeintres collaborant avec la lumière électrique ou solaire ; ils obtiennent ainsi presque instantanément de véritables merveilles en photopeinture sur toile, carton, bois ou peau d’âne ; des reproductions fidèles, soit de tableaux célèbres, soit de modèles vivants habilement groupés. Grâce à cette rapidité d’exécution, une toile comme les Noces de Cana dont l’original, entre parenthèses, a dû demander un temps prodigieux à Paolo Caliari dit Véronèse, reproduite en grandeur de modèle, peut être livrée au public pour la faible somme de 99 Francs 95. »
Voici donc une invention qui permettre à tout un chacun de posséder chez lui un tableau réalisé par les signatures les plus prestigieuses. En popularisant de la sorte l’accès à une culture universelle, les riches devront se payer le luxe de nouvelles manies de collectionneurs pouvant échapper à la marche inexorable de la science. Mais Robida était un grand idéaliste dont la satyre voulait mettre un point final à cette bourgeoisie voulant affirmer sa différence et montrer sa « supériorité » culturelle et intellectuelle par la force et le pouvoir de l’argent.
Avant de fermer provisoirement ce chapitre sur la « Machine à peindre » Jean de Quirielle produisit également un roman qu’il est intéressant de mentionner. Roman que j’avais analysé dans les pages de ce blog. En effet « La Joconde retrouvée » est également un de ces rares exemples qui, contrairement à la thématique évoquée jusqu’à présent, va agir en sens inverse, à savoir de rendre vivant par un moyen scientifique, le personnage d’un tableau « emprisonné » dans une toile. Curieux roman pour une non moins curieuse méthode dont les tenants et les aboutissants, même s’ils déçoivent quelque peu, ne manqueront pas d’intriguer le lecteur des plus curieux.
« La machine à peindre » de Franz Von Stuck
« Le brevet d’une invention de toute importance a été déposé dernièrement. Il s’agit de rien moins qu’une machine à peindre. L’inventeur en est un peintre qui a souhaité garder l’anonymat pour se protéger des représailles de ses confrères. La machine permet de produire en un temps record des peintures de tous genres et de tous styles. Les clients pressés peuvent même attendre l’oeuvre demandée sur place. Pour commander une toile, il suffit d’indiquer le sujet choisi et le maître par qui l’on souhaite le voir traiter. Les portraits peuvent être commandés par courrier, par télégraphe ou par téléphone. L’appareil peut fournir des galeries complètes de maîtres anciens et modernes. Des conditions peuvent ainsi être consenties en cas d’achats par douzaines. Le propriétaire de cette machine est un marchand d’art qui en a acheté les droits à l’inventeur pour cent marks.
La machine à peindre est commandée par un excellent critique d’art, mieux placé que quiconque pour savoir de quoi se compose un bon tableau, ce que les peintres doivent peindre et comment. Les innovations sont exclues systématiquement, ce qui supprime les motifs de perplexité tant chez les critiques que chez le public. Celui-ci n’a plus à craindre de surprise ou de gêne : il sait par avance comment il doit réagir devant les oeuvres. Les marchands d’art ne pourront plus se plaindre de la pénurie de tableaux. Quant aux peintres, ils sont désormais superflus, si ce n’est pour apposer leur signature sur les productions de la machine. Face à cette révolution, nous ne pouvons que conseiller aux peintres de se reconvertir dans la sculpture. A ce jour, on n’a pas encore inventé de machine à sculpter. »
La machine de Franz Von Stuck La Machine à Photopeinture de Albert Robida
Cette rubrique est adressée plus pour le néophyte en la matière, que pour le connaisseur aguerri. En effet vous trouverez entre ses lignes quelques titres qui vous permettront de faire vos « premiers pas » dans un genre, malheureusement trop peu connu dans notre pays, mais qui pourtant est d’une importance capitale concernant la genèse des grands thèmes fondateurs de la SF.
Il est curieux de constater à quel point le jeune public se passionne pour ce genre totalement hybride et que l’on nomme « Steampunk » qui, avec son look fin 19éme et toute sa technologie « rétro-futuriste », ne manque pas d’évoquer les œuvres d’un grand nombre d’écrivains de la belle époque. Pourtant cette attirance pour un univers quelque peu désuet et rétro ne semble pas vouloir se diriger vers tout un genre qui pourtant fut assez prospère entre la fin du XIXéme et une bonne moitié du XXéme En « surfant » un peu sur la toile, je me rends compte que bien souvent, certains noms sont évoqués comme Jules Verne, un incontournable en la matière, mais aussi de Robida, Maurice Renard ou certains précurseurs de la littérature dite « Martienne ». Je pense qu’il est utile alors de donner quelques références de base afin de se retrouver un peu dans cette production, autant immense que généreuse, et qui j’en suis certain, charmera tout un potentiel de lecteur avide de lectures surprenantes.
Même si la découverte des œuvres citées dans ces ouvrages, relève souvent d’un véritable travail d’archéologue et d’une grande part de chance, il n’en reste pas moins une source de plaisir et de bonheur sans cesse renouvelée par la satisfaction de tomber peut-être sur « LE » texte rarissime. La vieille SF est un genre qu’il nous faut promouvoir et développer car elle est non seulement le témoin des peurs, des appréhensions, des espoirs et de l’imaginaire de toute une époque, mais elle est aussi partie intégrante de notre patrimoine culturel. Arrêtons nos préjugés et ouvrons notre esprit à une « littérature différente » car totalement libérée de ses contraintes de style et ouverte aux possibilités infinies de notre imaginaire. J’aime reprendre cette phrase qui est en outre le titre d’un ouvrage de Jules Romain « Gloire à nos illustres pionniers »
Les ouvrages répertoriés ci-dessous vous seront utiles pour un travail de défrichage, ils pourront être dans certains cas des guides précieux pour les nouveaux explorateurs de l’imaginaire ancien, dans l’attente de « l’œuvre magistrale » où seront répertoriés tout, ou presque, les romans et nouvelles conjecturales qu’il vous sera possible de dénicher dans bibliothèques, caves et greniers. Les volumes qui suivent dans cette liste peuvent être encore trouvé dans des fourchettes de prix assez convenables :
- « Les mondes imaginaires et les mondes réels, revue critique des théories humaines scientifiques et romanesques, anciennes et modernes sur les habitants des astres ». De Camille Flammarion.
Un copieux volume de 400 pages (en fait le volume fait 577 pages mais c’est la deuxième partie qui commence page 169 qui nous intéresse plus particulièrement). L’auteur y aborde tout de même pratiquement une cinquantaine de romans et nouvelles des origines à nos jours et traitant de voyages extraordinaires tant terrestres que sur d’autres planètes et de la rencontre avec maintes contrées et populations étranges et fabuleuses. Nous aurons ainsi le plaisir d’y rencontrer : « L’homme dans la lune » de Godwin, « Le monde dans la lune » de Wilkins, « Voyage dans la lune, Histoire des états et empires du soleil » de Cyrano de Bergerac, « Le voyage extatique céleste » du père Athanase Kircher, « Nouvelles de la lune » de Mercier, « Voyage de Milord Céton dans les sept planètes » de Lambert et de Kant, « Les hommes volants » de Rétif de la Bretonne etc….Des romans phares mais rarissimes pour une grande partie. Un ouvrage unique en son genre et indispensable plaçant de ce fait Camille Flammarion comme un précurseur du genre.
- Librairie Académique Didier et Cie, Libraires-Editeurs.1870.
- « Micromégas » de Régis Messac.
« Avec Micromégas, écrit en 1935, Régis Messac se consacre à l’étude des œuvres littéraires traitant de l’homme en face du très grand et du très petit, de l’homme qui change de dimensions sans cesser d’être un être humain. De Platon aux magazines anglais de la première moitié du xxe siècle, de Lamartine à Jules Lermina, aucun aspect de la question n’est abordé sans être mis en relation avec le développement de la science et l’évolution des théories scientifiques. À travers son étude, Messac nous révèle la cohorte d’idées fausses qu’emmagasine ou que véhicule le roman scientifique, notamment à propos du changement d’échelle qui bouleverse la structure des lois physiques. Cette littérature n’est en fait que de pure fantaisie. Notre organisation est liée à nos dimensions ; il ne peut y avoir d’homme de la taille d’une fourmi ni de fourmi de la taille d’un homme. Messac, cependant, fait une distinction entre deux catégories d’auteurs : ceux qui laissent se développer leur imagination au gré de la science, et ceux qui, comme Rabelais, Swift, Voltaire ou Wells utilisent le genre comme un artifice qui leur permet d’exposer des idées hardies. Comme la plupart des travaux de Messac, cette histoire d’un genre littéraire est aussi captivante que les meilleurs ouvrages de littérature scientifique. »
Un ouvrage indispensable qui répertorie la totalité des références disponibles dans ce domaine jusqu’à la date d’écriture de cette étude.
- Parution initiale en 1936 sur « Les presses de la laborieuse » réédité en 2008 par les éditions Ex Nihilio.
- « Les automates dans les œuvres d’imagination » de Alfred Chapuis .
Comme il se doit, ce citoyen Suisse c’est fait une spécialité de l’horlogerie et des automates et il consacra sa vie à l’écriture de nombreux ouvrages sur le sujet. Avec cet ouvrage, d’une aide très précieuse pour le chercheur avertit, il nous dresse un inventaire des automates des origines à nos jours dans le domaine de l’imaginaire. Livres, Théâtre,cinéma,radio,musique,tout y passe et tout notre plaisir ne fait qu’augmenter à la lecture des chapitres VII à XII (pages 99 à 261) très riches en renseignements utiles sur l’anticipation ancienne.
- Neuchatel Editions du Griffon 1947
- « La littérature Française d’imagination Scientifique » de Jean-Jacques Bridenne.
Connu en France pour ces nombreuses participations à la revue « Fiction » où il rédigea quelques articles de référence dans le domaine qui nous intéresse (Théo Varlet, Camille Flammarion, Paul D’Ivoi etc.….) il est l’auteur en outre de cet ouvrage phare, qui mélange de façon très habile, les ouvrages « littéraires » et ceux du domaine beaucoup plus « populaire ». Bourré de références très utiles pour le curieux qui désire approfondir ses connaissances dans le domaine, l’ouvrage se lit sans ennui comme un roman. Pas mal de titres répertoriés, des dates, mais pas de références d’éditeurs. Ce volume devenant de plus en plus rare dans son édition originale fût réédité par les éditions « Antarès » en 1983.
- Édition Gustave Dassonville 1950.
A Suivre…..
Avant de commencer ce petit dossier, je voudrais faire amende honorable auprès de Pierre Versins qui réalisa déjà en 1972 pour le compte de la collection « Ailleurs et demain classique » un travail identique. Lorsque j’ai découvert la nouvelle que vous allez lire par la suite, j’avais dans l’idée de préparer cette étude en ayant complètement occulté celle de Versins. Il faut dire que j’avais dévoré dans son édition originale le roman de Marc Wersinger « La chute dans le néant » en ayant oublié l’édition de chez Robert Laffont, rangée depuis fort longtemps sur une étagère inaccessible. C’est en faisant des recherches sur les publications et les rééditions des ouvrages qui composent la bibliographie, que j’ai redécouvert la préface de notre célèbre encyclopédiste. Les références furent précieuses, j’ai un peu modifié sa bibliographie et rajouté quelques petites choses et supprimé certaines. Probablement que ce modeste travail n’est pas exempt d’oublis, il permettra cependant de refaire un petit point sur cette thématique et de découvrir une nouvelle inédite tout à fait amusante.
Venez, plongeons dans le micro-monde de nos ancêtres!
Toujours plus petits
Dans sa quête sans fin de toujours vouloir repousser les limites du possible, l’homme de science fut de tout temps confronté à des situations qui forcément dépassaient le simple aspect technique, pour tomber dans l’épineux débat du problème éthique. Peut-on effectivement modifier l’homme dans le but de faire avancer la science en faisant cas des problèmes de morale ou de conscience. Doit-on changer sa structure, ses capacités alors que dame nature l’a programmé suivant une logique de l’évolution et qu’il serait condamnable et préjudiciable de le doter de capacités non prévues dans son code génétique? Vaste sujet qui suscite de nos jours de nombreuses polémiques et dont je ne voudrais pas ici enflammer le débat.
Le romancier lui, ne se pose pas se genre de question et nous pouvons même affirmer que son esprit se trouve bien souvent dénué de tout sans moral et ce d’ailleurs pour notre plus grand plaisir, et taille allégrement tel un « sculpteur de chair humaine » dans la substance moléculaire de ses sujets, sans se poser une seule fois l’épineux problème, propre à tout bonne conscience scientifique, du respect de l’individu. Comme nous l’avions vu lors d’un précédent billet consacré au « savant fou », ce dernier est bien souvent un être vil qui ne sert que ses propres intérêts. Soit il vaudra prouver au monde son génie et sera capable des pires atrocités, toujours au nom de la respectueuse marche du progrès, soit par vengeance en créant le « super homme », instrument de sa vengeance contre une humanité indigne de sa brillante cervelle.
Pourtant , dans le cas qui retient aujourd’hui toute notre attention, l’expérience réalisée, sera d’une manière générale l’objet du hasard ou bien le résultat d’une expérience voulue et donc parfaitement assumée. Ainsi avant d’arriver au cas qui nous intéresse plus spécialement, l’homme sera sans cesse « modifié » et profondément mutilé au plus profond de sa chair, remodelé, transformé, deviendra plus fort, plus intelligent (« Tréponème » de Marc La Marche), immortel « (« L’immortel » de Régis.Vombal, nouvelle qui sera accessible bientôt sur les pages de ce blog), doté du pouvoir de visionner l’avenir (« L’œil du purgatoire » de Jacques Spitz) et même invisible (« L’homme invisible » de H.G.Wells »). Essayons alors de faire un peu le tour du genre en s’arrêtant quelque peu sur les œuvres les plus significatives.
La question nous brûle les lèvres : Mais quel pourrait être le roman où, pour la première fois, nous avons relevé un cas de miniaturisation de l’être humain ?
C’est vers Jonathan Swift qu’il faudra se tourner mais ici le cas est bien particulier, car s’il devient Géant à Lilliput (et là nous avons affaire à une civilisation de créatures minuscules) il deviendra par la suite minuscule à Broddingnag. Faut-il le classer dans le premier cas recensé en regard de cette transformation toute « naturelle » ( et comme pour reprendre le vieil adage : Au pays des aveugles les borgnes sont rois ») Quoiqu’il en soit, le personnage sera contraint aux mêmes vicissitudes des créatures insignifiantes, relatives aux êtres de petites tailles en luttant contre un monde devenu hostile. Il faudra également mettre de coté la sublime nouvelle de Fitz-James O’brien « La lentille de diamant » (1858 pour l’édition originale) qui raconte l’amour fou d’un homme pour une femme vivant dans le microcosme d’une goutte d’au et qu’il ne pourra bien évidemment jamais atteindre. L’auteur préférant rester dans le conte « merveilleux » interdisant ainsi toute possibilité scientifique d’accéder à ce monde mystérieux.
Par la suite, c’est un Français qui va s’illustrer en enrichissant la thématique d’un véritable cas de réduction de taille « scientifique » d’un être humain, même si le final laisse planer certains doutes. En effet dans son roman « Toujours plus petits », malheureusement complètement oublié de nos jours, André Bleunard ouvre la voie à la thématique. Le Professeur Al-Harick, adepte des sciences exactes contacte le Professeur Collioure de la société Hyperpsychique de Perpignan, pour lui faire part de sa toute nouvelle invention : Une machine capable de réduire de taille, humains et objets. La machine est une cloche gigantesque reliée à un complexe appareil par deux câbles d’une curieuse composition. L’expérience va réussir et les trois aventuriers vont ainsi vivre une bien curieuse aventure dans un monde ayant atteint des dimensions gigantesques et peuplé d’une fauve redoutable : Ici le moindre petit insecte prend une taille de dinosaure. Ils mesurent en effet le millième de leur taille initiale. L’auteur nous raconte avec précision toutes les modifications de la perception de notre monde que cela peut entraîner avec une telle réduction de notre volume. Un roman fondateur qui ne manque pas, même actuellement, de saveur, car parfaitement bien maîtrisé tant sur le plan scientifique que narratif (les affrontements avec les divers insectes ne manquent pas de charme et l’exploration de la goutte d’eau avec un scaphandre un régal).
Nous aborderons très rapidement un roman hélas inachevé de Mark Twain (1835-1910) « Trois mille ans chez les microbes » ( «Three Thousand Years Among the Microbes » 1905). À la suite d’une expérience qui tourne de manière inattendue, le narrateur, nommé B.b. bkshp en « microbique », est transformé en germe du choléra et se retrouve dans le corps d’un vieil ivrogne vagabond qui devient son univers. Il raconte 3000 ans de sa vie, à quoi s’ajoutent des notes rédigées 7000 ans plus tard. Mais où est le rêve et ou se trouve la réalité, et si toutes choses étaient inversées ?
En 1918 Waldemar Kaempffert dans sa nouvelle « The Diminishing Draft », aborde le sujet avec un certain brio. Un savant découvre les propriétés extraordinaires du « Baroturpinol », un germicide qui non content de vous réduire de taille, permet également de vous maintenir dans un état de vie suspendue. Son effet se trouvant immédiatement annulé dans une suspension saline. Notre homme est amoureux de son assistante, c’est réciproque, pais pas au goût de sa femme. A la suite d’une maladresse, la jeune maladroite absorbe la substance et se retrouve ainsi transformée en statue vivante. Objet d’adoration, le savant peut ainsi transporter de la manière la plus discrète l’adorable petite créature. Mais l’épouse du savant découvrant le mystérieux manége brisera un jour cette représentation tant haïe, brisant par la même occasion un amour si parfait. Cette nouvelle va en 1957 inspirer un réalisateur Français, Pierre Kast qui va en faire un film « Un amour de poche » avec Jean Marais et Geneviève Page.
Il faudra ensuite franchir un océan pour retrouver un génial chimiste inventant une « pilule à rapetisser ». C’est ce que va faire Ray Cummings en 1919 dans son désormais célèbre « The girl in a golden atom » (« La fille dans l’atome d’or » pour la traduction Française). Le scientifique va découvrir dans son microscope un étrange monde où réside une délicieuse créature dont il va tomber éperdument amoureux. Voulant la rejoindre il invente donc cette substance qui va lui permettre de rapetisser afin de rejoindre ce microcosme et vivre de trépidantes aventures au cœur de l’atome. L’ouvrage eut un tel succès qu’il connu deux suites (1920 et 1921).
Retournons en France dés à présent pour voir arriver quelques ouvrages dont les auteurs vont allégrement s’approprier la thématique et nous enthousiasmer avec de célèbres voyages dans le « macro monde ». Commençons par un chef d’œuvre et l’ouvrage phare de l’auteur : Octave Béliard .Avec son « Les petits hommes dans la pinède » (1927) nous avons l’exemple d’un roman original et qui pose le problème de l’homme face à sa création. Une fois n’est pas coutume un embryologiste tombe amoureux d’une créature minuscule, une femme, qu’il vient de « créer » avec bon nombre de ses semblables. Ils vont rapidement devenir autonomes, se reproduire, passer de « l’age de pierre » à une ère beaucoup plus technologique (leur évolution est hyper accéléré). Viendra l’heure où cette civilisation se retournera contre son créateur, son dieu, car la folie des hommes semble être contagieuse et le seul moyen de stopper net une domination totale, est l’embrasement de cette pinède où ils se sont développés.
Un an plus tard, la France va se distinguer avec cet ouvrage peu connu de Auguste Galopin (père de Arnould) qui va nous proposer avec son « Excursions du petit poucet dans le corps humain et dans les animaux » une sorte de « voyage fantastique » où le moyen utilisé sera des plus classique car devant être facilement « accepté » pour un jeune public. Mais donnons la parole au héros :
« J’ai donc été assez privilégié de la « bonne fée » pour qu’elle m’accorde les vertus qui étaient en son pouvoir : le don d’être impalpable, insaisissable, invisible, de pouvoir traverser les pores et la peau de tous les tissus des animaux et des végétaux ».
L’auteur ne s’embarrasse pas d’explications scientifiques en passant la main au bon vieux « merveilleux » et son cortège de fées et de sorcières. L’ouvrage est abondamment illustré et constitue un « cour d’anatomie en s’amusant ».
Toujours la même année le brillant et génial Maurice Renard fort d’un bon nombre de thématiques à son programme va nous enrichir d’un original « Homme chez les microbes » : Un homme trop grand pour se marier consulte son ami le Dr Pons qui va lui permettre de rapetisser de quelques centimètres. Seulement voilà, le processus ne semble pas vouloir s’arrêter et le malheureux poursuit sa chute vers infiniment petit. Il va atteindre ainsi un état microscopique après avoir affronté les épreuves d’usage : Frelon, araignée, bactérie…Il va cependant réapparaître quelques mois plus tard, vieilli et raconter son incroyable aventure dans un monde « intra-atomique » où il passera 65 ans de son existence. Ce sont les savants de cet étrange monde qui vont lui permettre de revenir à sa taille normale.
Un an plus tard,Charles Magué qui dans le premier volume de sa célèbre trilogie « Les survivants de l’Atlantide » (1929), va nous conduire dans un monde étrange ou le minimalisme sera également e rigueur. Echappés à un terrible Typhon les passagers d’un avion s’abîment dans l’océan. Ils trouvent leur salut sur une mystérieuse île qu’ils baptisent « île noire » constitué par une immense barrière circulaire. A l’intérieur de celle-ci, ils découvrent une bien étrange civilisation : Micropolis. Sa population, descendant des Atlantes à la taille minuscule, fut ainsi rapetissée par les savants pour une raison d’espace vital. Résultat de différentes manipulations génétiques et de la prise d’une substance adéquate, ils purent ainsi perpétrer leur race, préservée du monde extérieur, cette particularité fut ensuite héréditaire et transmise de générations en générations. D’autres étranges aventures attendent nos aventuriers sur cette île extraordinaire (bientôt sur le blog vous aurez un résumé de la totalité des trois volumes que constitue cette trilogie).
En 1938 un autre écrivain Français Jacques Spitz, exemplaire quand à sa production dans le domaine qui nous intéresse, nous livre un roman extraordinaire pour l’originalité de sa thématique. Le Docteur Flohr, découvre que l’atome peut être « élastique » et par un procédé de son invention parvient à devenir gigantesque. Par la suite son expérience ira beaucoup plus « loin » en l’occurrence beaucoup plus bas puisque avec le soutient de l’armée il va obtenir des volontaires humains et obtenir ainsi une armée miniature. L’illustre savant possède une théorie assez surprenante sur la nourriture et ses propriétés lorsque celle-ci est soumise à une réduction de taille.
Des êtres de petites tailles, on en retrouve dans le roman d’Abraham Merritt « Brûle sorcière brûle » mais ici les créatures sont le produit de la magie et non de la science. Le roman inspirera le superbe film de Tod Browning « Les poupées du diable » en 1933, bien que l’idée du film se base plus sur une hypothèse plus scientifique. IL nous faut également faire une petite entorse au règlement et citer pour l’occasion un cas très célèbre de réduction de taille qui fut abordé dans la bande dessinée. En effet Willam Ritt et Clarence Gray vont créer un célèbre personnage dont « Le voyage dans une pièce de monnaie » reste des plus fameux. Brick Bradford qui deviendra en France « Luc Bradefer ». Le Pr Kopak trouve un nouvel élément de la table de classifacation de Mendéléieff le N° 85 qu’il baptise « Kopakium » qui a la propriété d’émettre un rayonnement capable de rapetisser les objets. Le professeur fabrique un générateur à élément 85 qui va permettre à son ami Brick, Kala, Beryl Salisbury et lui-même de se réduire à une taille infiniment petite et de pouvoir explorer le monde subatomique d’un système atomique d’un atome de cuivre d’une pièce de monnaie de bronze. Cette aventure se fera au moyen d’un véhicule de forme sphérique. Dans cet univers de l’infiniment petit, l’on a l’impression de se retrouver dans une galaxie avec ses planètes, ses civilisations étranges, tout un univers transposé dans des proportions subatomiques. Un classique du genre, au scénario brillant où il ne manque à mon avis que le trait de génie d’un Alex Raymond.
En 1939, c’est une histoire plus légère qui nous est proposée par Philippe Sonet S.J. et sa « Révolte chez le petit peuple » : Une visite chez le professeur Barclay et voilà notre petit Tom qui actionne malencontreusement une curieuse machine. Sous l’effet de ses curieuses radiations il va se retrouver avec une taille minuscule et explorer tout un monde merveilleux à la rencontre de sympathique insectes. Accompagné de délicieuses petites illustrations ce roman est une version pour les enfants de « L’homme qui rétrécit ».
Georges Gamow sera également de la partie avec son célébre personnage M.Tomkins. IL participera effectivement à l’édification du genre avec son « M.Tomkins explore l’atome » (1942 pour l’édition originale) et « M.Tomkins s’explore lui-même » (1952).En effet comme on n’est jamais mieux servi que par soi même et qui plus est dans le monde des rêves (c’est moins dangereux) : «Notre Héros de la curiosité scientifique, ayant entraîné sa femme dans un rêve particulièrement fantastique où tous deux faillirent se désintégrer, a du se garder de la physique comme de la peste. Mais la curiosité n’est jamais punie, et le voici maintenant se passionnant pour les problèmes de la vie. Injecté, au cours d’un cauchemar, comme un corps étranger à travers son organisme, y découvre les mystères de sa physiologie et de son hérédité, et le mécanisme de son cerveau »
Un autre classique, moins connu que celui de Matheson mais tout aussi important est « La chute dans le néant »Marc Wersinger de (1947). Robert Murier un scientifique hors pair va se rendre compte qu’à la suite d’une expérience, son corps ne va cesser de rapetisser pour finalement plonger dans une chute vertigineuse dans ce « néant » insondable dans lequel nul être humain n’a jamais osé et pu s’aventurer. Son voyage nous est décrit d’une façon méthodique et scientifique où la peur de l’inconnu va laisser place à l’émerveillement pour laisser place à une forme de poésie des plus surréaliste. Effectivement, là où le roman de Matheson quelques années plus tard va gagner en teneur plus romanesque, voir même épique, l’ouvrage de Wersinger lui nous donne une teneur plus scientifique, plus exacte et méthodique en nous décrivant d’une manière précise les différentes phases de ce voyage abyssal. Un classique méconnu d’une grande teneur dramatique.
Le futur auteur attitré des éditions fleuve noir « Anticipations », Jimmy Guieu entamera les hostilités au tout début de la collection avec « Les pionniers de l’atome ». En effet tout commence par un simple porte-clés comportant une pointe effilée. Un occultiste Hindou va s’apercevoir que sous cette banale apparence, se cache un moyen de passage entre notre univers et un monde microscopique. Le héros de l’histoire va découvrir que cette « porte » est le résultat d’une erreur scientifique dans un monde ou deux factions opposées se livrent une guerre sans mercie. Toujours chez le même éditeur c’est ensuite au tour d’un des meilleurs écrivains de la collection Stephen Wull et son « Retour à « 0″» d’innover et cette fois,en matière de chirurgie : « Le professeur Kam, un médecin réputé, découvre que Jâ Benal, un atomiste de renom est atteint d’une maladie lunaire incurable, la trichocystie. Il décide alors d’utiliser l’enmicrobainie, une découverte toute récente de son collègue le professeur Terol qui permet de réduire à une taille microscopique aussi bien du matériel que des hommes. Les deux scientifiques miniaturisent alors cinq équipes d’intervention formées d’étudiants en médecine qu’ils injectent dans les tissus du malade. Les équipes affrontent à l’arme blanche les dangereux virus et réussissent finalement à déclencher une réaction défensive naturelle des globules blancs contre la maladie. » Idée qui sera reprise par Richard Fleischer dans son mémorable « Le voyage fantastique » (1966) avec le regretté Donald Pleasance, film qui sera adapté en roman par Isaac Asimov.
Terminons enfin par ce classique de la littérature « microscopique » rendu célèbre par le film de Jack Arnold, « L’homme qui rétrécit » de Richard Matheson (1956) où nous assistons aux affres d’un homme condamné à rapetisser de jour en jour et dont une curieuse destiné le conduira dans la cave de la maison où il devra affronter bien des dangers avec entre autre le célèbre combat avec une araignée « gigantesque ». Face à ce terrible destin, le héros Scott Carey, va devoir accepter sa nouvelle condition et assumer sa nouvelle place dans un univers si familier mais pourtant si différent et hostile. Contrairement à d’autres ouvrage, et notamment celui de Wersinger, nous ne connaîtrons pas le détail de ses péripéties dans l’infiniment petit, l’auteur se bornant à nous donner un descriptif plus « conventionnel » et le roman de Matheson gagne en intensité épique, ce qu’il va perdre en dimension psychologique. Pourtant malgré un aspect plus sensationnel, voulant donner en cela à son roman un coté aventure, le final n’est pas dénué d’une certaine réflexion avec un homme qui face à cette nouvelle condition, accepte le sort qu’il lui est dévolu en se considérant faire partie d’un « tout » unique, dans lequel il a également sa place et un rôle à jouer.
Pour conclure, beaucoup déplorerons dans ce petit panorama l’absence de certaines oeuvres cinématographiques ( Dr Cyclop……) ou de BD ( les petits hommes….) mais je voulais me limiter au cadre purement littéraire et ne proposer dans cette liste que les titres emblématiques de ces différentes catégories.
Bibliographie sélective
- « Les voyages de Gulliver » de Jonathan Swift. Edition en deux volumes chez Jacques Guérin.1727. Existe de très nombreuses rééditions.
- « Toujours plus petits » de André Bleunard. Dans « La science illustrée ». Du N° 287(27 Mai 1893) au N° 313(25 Novembre 1893).
- « The great Dark » de Mark Twain. (1905). Roman inachevé. Traduction Française chez Librio
- « Aventures du dernier Gulliver » de Perriton Maxwell. Dans la revue « Nos loisirs » N°4 (4éme année) 24 Janvier 1909.
- « The diminishing Draft » de Waldemar Kaempffert. Dans la revue « All-story magazine » du 9 Février 1918.
- « The girl in the golden atom » de Ray Cumming. Dans la revue « All-story magazine » du 15 Mars 1919. Traduction Française dans l’anthologie de Jacques Sadoul « Les meilleurs récits de Famous Fantastic Mysteries » Éditions j’ai lu N° 731.1977.
- « People in the golden atom » de Ray Cummings. Dans la revue « All-story magazine » 24 Janvier 28 Février 1920.
- « Les petits hommes dans la pinède » de Octave Béliard. Parution en pré-original en 1927 dans « L’association médicale ». En volume chez « La nouvelle société d’édition ».1928.
- « Excursions du petit poucet dans le corps humain et dans les animaux » du Dr Auguste Galopin. Éditions Albin Michel.1928.
- « Petite jungle » de Maurice Morel. Éditions Armand Colin « Bibliothèque du petit Français ».1928.
- « Un homme chez les microbes » de Maurice Renard. Éditions Crès.1928.
- « Out of the subuniverse » de R.F.Starzl. Dans la revue « Amazing stories » été 1928. Traduction Française dans l’anthologie de Jacques Sadoul « Les meilleurs récits de Amazing Stories période 1926/1932 » Editions j’ai lu N° 551.1974.
- « Princess in the golden atom » de Ray Cummings. Dans la revue « Argosy » 14 Septembre au 19 Octobre 1929.
- « Les survivants de l’Atlantide » de Charles Magué. Editions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures » N°252.1929.
- « Into the green prism » de A.Hyatt Verrill. Dans la revue « Amazing stories » de Mars à Avril 1929.
- « La cuve aux monstres » de Charles Magué. Editions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures » N°332.1930.
- « The eternal man revives » de D.D.Sharp. Dans la revue « Wonder Stories Quaterly » été 1930.
- « L’archipel des demi-dieux » de Charles Magué. . Editions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures » N°379.1931.
- « Voyons nous le monde tel qu’il est » quatrième article d’une série de neuf réalisé par René Thévenin : Un univers où les lois de la physique ne semblent plus respectées. Il y sera question d’un homme de taille réduite partant à la découverte d’une monde qui diffère en raison de ses proportions réduites « Sciences et Voyages » N°652, 25 Février 1932. - « Brûle sorcière, Brule ! » de Abraham Meritt. Dans la revue « Argosy » du 22 Octobre au 26 Novembre 1932. Traduction Française dans la collection « Chef d’œuvre de la science-fiction et du fantastique » N°15.1976. Puis éditions Marabout N°710 (1980), Nouvelle Editions Oswald N° 11 (1984)
- «The man who fought a fly » de Leslie F.Stone. Dans la revue « Amazing stories » de Octobre 1932.
- « The green man of Graypec » de Festus Pragnell. Dans la revue « Wonder stories » de Juillet à Septembre 1935. Traduction Française « Kilsona monde atomique » Editions Hachette « Le rayon fantastique » N°33.1955.
- « He Who Shrank » de Henry Hass. Dans la revue « Amazing stories » de Aout 1936.
- « Luc Bradford dans la pièce de monnaie » de William Ritt & Clarence Gray.Paru dans les périodiques « Hurrah ! » (du N°1 à N°334) dans « Robinson » (du N° 23 à 279), « Le journal de Mickey » (du N° 80 à 85), « Donald » (du N° 14 à 313). Paru en volume aux éditions SERG en 1975
- « L’homme élastique » de Jacques Spitz. Editions Gallimard. Collection « Les romans fantastiques de Jacques Spitz » ,1938.Rééditions Marabout série « Science-fiction » N° 483. 1974.Réédition dans le recueil « Joyeuse apocalypse » Éditions Bragelonne « Les trésors de la SF ».2009
- « La révolte chez le petit peuple » de Philip Sonet S.J. Roitelet aux éditions Durandal.1939. - « Mr Tompkins explores the atom » de Georges Gamow University Press, 1942. Traduction Française « Mr Tompkins explore l’atome » Editions Dunod.1954.
- « Neobiknovennie priklioutchenia Karika i vali » de Ian Larry.Traduction Française « les aventures extraordinaires de Karik et Valia » Editions Nagel.1946.
- « La chue dans le néant » de Marc Wersinger. Dans la revue « Le Figaro » de Mars à Mai 1947. En volume, éditions « Le Pré-aux-clercs » 1947.Réédition chez Robert Laffont collection « « Ailleurs et demain classique» ».1972. Réédition aux éditons de « « L’arbre vengeur» » en 2010
- « Les pionniers de l’espérance » de Roger Lecureux et Raymond Poïvet. « Le jardin fantastique » en volume Librairie vaillant collection « Images et aventures ».1968.
- « Mr Tompkins s’explore lui-même » Georges Gamow University Press, 1942. Traduction Française « Mr Tompkins s’explore lui même » Editions Dunod.1955.
- « Les pionniers de l’atome » de Jimmy Guieu. Editons Fleuve Noir « Anticipation » N° 5.1952.
- « Ma petite femme » de Louis Velle. Editions Calman levy collection « Labiche » 1953.
- « L’homme qui rétrécit » (« The Shrinking man »)de Richard Matheson .Editions Fawcett 1956. Traduction Française éditions Denoël collection « Présence du futur » N°18.1957.
- « Retour à «0» » de Stephen Wull. Editons fleuve noir collection « Anticipation » N° 72.1956.
- « Le voyage fantastique » ( « Fantastic Voyage »)de Isaac Asimov. Editions Bantam 1966. Traduction Française éditions Albin Michel collection « Super Fiction » N° 13.1981.
- « Asunrath » de Marie-Thérèse Brosses. Editions Le terrain vague.1967
Pour les passionnés de cette thématique, il existe en dehors de la préface de Versins dans la réédition du roman « La chute dans le néant » éditions Robert Laffont collection « Ailleurs et demain classique », 1972, un autre ouvrage faisant figure de précurseur. Il s’agit de l’ouvrage de Régis Messac « Micromégas », imprimerie « La laborieuse »1936. Fort heureusement cette étude rarissime fut rééditée en 2009 aux éditions Ex Nihilo et nous apporte une foule de renseignements très utiles pour un approfondissement du sujet.
La nouvelle inédite que vous allez à présent découvrir est extraite de la revue « Nos loisirs » du 24 Janvier 1909. Elle illustre à merveille la thématique que nous venons d’évoquer et même si l’explication rationnelle qui nous est donné à la fin risque d’un peu décevoir, le texte n’en reste pas moins une fort belle réussite, un effroyable cauchemar des plus spectaculaire.
Le docteur secoua d’un air pensif sa mèche de cheveux blancs comme neige, et sa figure, soudainement grave, s’allongea. C’était un chérubin de soixante-trois ans, tout rose, tout rond, avec un rire qui montait de son cœur comme un glouglou. Il suait la santé par tous les pores, et il offrait à ses clients la vivante incarnation de l’optimisme, l’essence de la bonne humeur.
On ne pouvait pas rester longtemps malade quand il vous soignait ; en trente années de pratique journalière, il n’avait pas eu dix malades dont la guérison fût au delà de ses méthodes curatives. Mais, cette fois, une certaine gravité assombrissait sa vieille face et l’inquiétude perçait clans son regard. Evidemment, il me croyait endormi, comme j’aurais dû l’être, après l’examen fatigant qu’il venait de me faire subir.
De mon poste d’observation, sous les couvertures, je voyais et j’entendais tout ce qui se passait autour de moi, à mon sujet : j’en voyais et j’en entendais trop, hélas ! Pour ma tranquillité d’esprit. Je flairais le danger dans l’attitude exceptionnellement réservée du médecin.
- Un cas difficile ! disait-il à ma femme,
- Est-ce vraiment si sérieux ? Murmura ma femme en tremblant.
- Pas si sérieux que nous ne le remettions sur ses quilles, j’espère, d’ici une semaine ou deux. Mais — il appuyait fâcheusement sur le mot — il faut qu’il passe par une opération, et tout de suite.
Immédiatement, je perdis toute envie de guérir. Rien ne comptait plus après une pareille sentence. Si les morticoles devaient m’ouvrir comme une boîte de conserves et jouer à cache-tampon avec mes intérieurs, pendant que je serais étendu sans force et sans défense, ce n’était sûrement plus la peine de vivre !
Mon angoisse morale fut aussi cruelle que mes souffrances physiques lorsque, après une nuit de fièvre et de rêves fantastiques, je m’éveillai le lendemain pour constater que tout était prêt, qu’on allait me transporter à l’hôpital, c’est à dire au billot, au hachoir, et m’y découper.
Le voyage fut un cauchemar. Enfin, je me trouvai, gisant parmi tout un attirail de scies, de couteaux, de pinces, de tire-bouchons, sur une table qui ne ressemblait pas mal au chevalet de torture de l’ancien temps Mais les victimes, alors, étaient moins innocentes que moi. Le groupe des jeunes docteurs qui entouraient ma carcasse paraissait tout à fait joyeux. Ils n’attachaient pas du tout à la circonstance présente autant d’importance que moi.
- Ça se fait en deux temps et trois mouvements, dit un de mes assassins, le sourire aux lèvres. Il avait une barbe blonde, des lunettes, et il ajusta sur mon visage je ne sais quoi en forme de cône, j’aspirai de l’éther. Il n’y avait pas moyen d’y échapper. Je me sentis glisser hors du monde, hors de la vie, et la terrible chute n’en finissait pas. De plus en plus vite, je filais sur l’interminable pente de la mort. Je tâchais de résister. J’essayais de m’accrocher aux parois. En vain j’incrustais mes doigts, je piquais mes talons dans la surface implacablement unie qui me supportait…
Mes efforts étaient inutiles. Les voix de l’entourage devinrent confuses et lointaines. J’éprouvai une vague sensation de douleur, mais je la surmontai en riant, car j’eus subitement conscience que ce n’était pas ma douleur, mais la douleur d’un autre !… par exemple, de l’assassin blond qui s’intitulait chirurgien, ou du garçon de salle qui gardait la porte, ou du grand escogriffe en uniforme qui circulait dans le corridor, ou de l’infirmière au bonnet blanc, aux yeux mauves. La douleur avait son siège dans mon flanc, sans aucun doute, mais c’était un autre qui la sentait. C’était une énorme farce, et je savais que j’étais seul dans le vaste univers à la goûter ou même à la comprendre.
Alors, le désir de quitter l’incommode posture où j’étais retenu sur la table d’opération s’empara de moi tyranniquement. Je savais bien qu’il fallait me tenir tranquille ; mais il me sembla que j’étais isolé au milieu d’un nuage de vapeur blanche, et je n’eus pas plus de peine à surgir du chevalet que je n’en aurais eu à me lever d’une chaise.
J’étendis mes membres pour assurer le jeu de mes articulations et je m’élançai sur ce que je prenais pour le sol de la chambre. Ce fut une étrange impression d’arriver subitement à l’extrémité du plancher, de regarder par-dessus le bord et de mesurer une chute à pic de cinquante pieds au moins jusqu’à l’étage inférieur. Ma raison ne me rendait pas un compte satisfaisant de la situation, je percevais seulement un énorme visage humain, couvert de barbe blonde, qui m’observait derrière une immensité de blancheur, à travers un brouillard impénétrable. Je voulus écarter cette hallucination ; elle persista. Alors je perdis complètement la raison, et je fis un plongeon dans l’espace, par-dessus le rebord du plancher…
Etes- vous jamais tombé d’une grande hauteur ? Je pense que non ; ce n’est pas un amusement très commun. Mais si cela vous est arrivé, vous connaissez la sensation de passer comme une flèche à travers un tube d’air qui semble se solidifier, qui vous étreint, qui grince à vos oreilles à mesure que son étreinte se resserre. Vous vous demandiez quand vous arriveriez au fond de l’horrible tube. Au moment où la question se formula dans mon esprit, je sentis le rude choc de mon corps entrant en contact avec le sol, et je ne m’expliquai pas qu’il en restât des morceaux. Que dis-je ? A ma grande stupeur, je me trouvais intact, j’avais frappé sur un monceau de matière molle, quelque chose comme une montagne de linge. Je me débattis, je me dégageai des plis, je finis par atteindre le plancher.
Je ne sais comment j’eus l’idée, ni comment je fus conduit à vérifier que je n’avais plus mes proportions normales. Je m’étais réduit à un diminutif d’homme incroyablement petit. Je me trouvais justement près de la canne d’un des inspecteurs de l’hôpital, que je reconnus au bois particulier dont elle était faite. Elle me dominait maintenant comme une tour Eiffel. Elle me servit à mesurer ma taille, qui dépassait à peine: le bout ferré. Certes, je n’avais jamais caressé de folles illusions au sujet de mon importance dans le monde. Toute la race humaine n’est qu’une troupe de fourmis rampant autour d’une espèce de cochonnet que nous appelons la terre. Mais il est humiliant de se trouver soudain ramené aux dimensions d’une sauterelle, sans posséder le puissant mécanisme moteur de cet animal. J’appelai à moi toute ma philosophie pour envisager la situation ; je me consolai en pensant qu’il y avait des créatures encore plus petites que moi, bien vivantes, et mêmes utiles. Sur quoi, je me hasardai à chercher aventure.
Tous les objets prenaient un aspect nouveau et curieux ; les plus communs m’apparaissaient comme des phénomènes gigantesques. Un coffre à médecine fut pour moi comme une grande maison d’architecture excentrique ; un tas de poussière dans le coin de la vaste pièce grouillait d’une multitude d’êtres animés qui, j’en suis sûr, échappent à la vue d’un homme normal.
Un privilège me réconciliait avec ma singulière position : la faculté d’aller sans obstacle partout où il me plaisait. Je me tins un moment à l’ombre d’une cuvette de porcelaine, et je contemplai le passage de plusieurs paires de jambes démesurées. C’était pour moi une sensation bizarre de voir un pied monstrueux et une jambe enveloppée d’un pantalon s’élever en l’air, se précipiter sur le sol avec le fracas d’une montagne qui croule, et l’autre jambe répéter le même exercice. Un bruit de tonnerre retentissait à mes oreilles de Lilliputien. Ma curiosité faillit me coûter la vie.
Je m’étais risqué hors de l’abri que m’avait offert un pied de chaise pour passer sous une table assez éloignée, quand un homme s’avança du bout de la chambre dans ma direction, marchant à grandes enjambées. J’eus beau courir, les pieds du monstre, approchaient, et je ne savais pas où me fourrer. En une seconde, l’ombre d’un énorme pied me couvrit, et l’air déplacé me fouetta le visage. Instinctivement, je me laissai tomber à terre et je m’y aplatis. La masse de cuir s’abattit juste sur moi. Si je ne fus pas pulvérisé, c’est parce que le talon et la semelle touchèrent le sol respectivement devant et derrière moi : je me recroquevillai sous l’arche tutélaire qui marque le creux du pied.
Le danger passé, j’eus à peine recouvré mes esprits, que je m’enhardis plus encore à tenter de nouveaux exploits. J’entrepris de grimper après un pied de table qui se dressait sur mon chemin comme un tronc d’arbre fabuleux. Je ne sais comment j’atteignis le sommet; cependant, je l’atteignis. Le bois de la table était beaucoup plus rugueux pour moi qu’il n’apparaissait probablement aux yeux du vulgaire. Je me rappelle que, plusieurs minutes, je restai dangereusement suspendu au rebord de la table comme au bord d’une montagne à pic. Une fois hissé sur le plateau, ma curiosité me conduisit vers un objet vaste et noir, que je reconnus à la fin pour un » chapeau melon » posé sens dessus dessous. Je gravis les flancs recourbés du melon, m’a- grippant des pieds et des mains aux aspérités du feutre, et j’arrivai sur la bordure. Je rampai avec circonspection et jetai un coup d’œil dans l’abîme : c’était comme l’ouverture d’un cratère, un gouffre béant de ténèbres. A m’y laisser choir, je me fusse rompu les os. Je m’empressai de battre en retraite et de reprendre pied solidement sur le plateau.
Quelques pas plus loin, je me trouvai en présence d’un gros corps couvert d’excroissances jaunes et brillantes comme des boutons de cuivre. Un examen attentif me permit de reconnaître une orange ! A quelque distance de là, je remarquai une coupe à Champagne, imposante comme le Palais de Cristal ; je me demandai s’il serait possible d’en escalader les parois glissantes. Aussitôt pensé, aussitôt essayé. J’ôte mon veston et je m’escrime, j’avance, je retombe, je ne me décourage point ; enfin me voilà à califourchon sur le bord arrondi. Par hasard, le verre était plein d’eau ; il me faisait l’effet d’un lac plutôt bourbeux. Tout à coup, paf ! Je dégringole dans ce marécage. Je suppose que j’avais été précipité par un coup d’air provenant d’une porte ouverte brusquement. Sans perdre mon sang-froid, je tirai ma coupe et, bien qu’il ne fût pas commode de trouver une prise solide sur le verre mouillé, j’arrivai à sortir de ce qui aurait pu être pour moi un sépulcre aquatique ! J’étais comme un rat trempé.
Puisqu’il était écrit que j’échapperais à tout péril ce jour-là, fut-ce de l’épaisseur d’un cheveu, je résolus d’affronter les rencontres les plus hasardeuses et les plus surprenantes pour ma nouvelle manière de voir. Ayant aperçu, dans un coin de la table, » une masse de matière sombre, dont une extrémité s’avançait dans l’espace et dégageait du feu avec de la fumée, j’y courus directement.
Le bout opposé à celui qui brûlait paraissait avoir été saturé d’eau, mordu, haché, au point de tomber en pulpe et en débris. La chose était de forme cylindrique et, lorsque j’y fus juché, je m’aperçus qu’il s’en échappait une odeur acre. Par-dessus l’extrémité enflammée, je plongeai mes regards dans un amas croulant de cendres chaudes, d’où s’élevaient des vapeurs asphyxiantes. Je reconnus aussitôt le parfum ! C’était un cigare et, je dois le dire, pas fameux. Je me rappelai que je l’avais déposé moi-même sur le bord de la table en me livrant aux mains du chirurgien. La fumée en était si rance et si nauséabonde que je décidai, si la providence me permettait jamais de grandir et de reprendre ma place parmi les hommes, de renoncer au tabac, ou de changer de fournisseur.
M’étant reposé, je me laissai glisser de la table, je me faufilai par la porte ouverte et par un long- corridor dans une autre pièce. Je me heurtai aux pilastres laborieusement sculptés d’un piano droit, et j’y grimpai sans difficulté. Dans le clavier aux larges touches, les noires ressemblaient à des bateaux à l’ancre sur une mer d’ivoire. En sautant avec force, je pus produire des sons qui retentirent au loin dans les ténèbres de la caisse. Pendant que je m’amusai ainsi, j’entendis un frou-frou de jupes et je me réfugiai derrière le couvercle relevé, d’où je pus contempler la redoutable et gigantesque musicienne. Elle s’assit et plaqua de vibrants accords dont j’eus le tympan presque fendu. C’était comme un roulement continu de tonnerre, mêlé aux cris variés d’une douzaine de sirènes. Je sentis que ces terribles vibrations me tueraient si je ne me mettais en sûreté immédiatement, et je pris ma course tête baissée vers l’extrémité du clavier. Je m’attendais aux clameurs aiguës de la belle artiste ; mais elle était si absorbée par son inspiration qu’elle ne me vit pas.
J’arrivai sur le tapis tout: échevelé, palpitant, et je sortis dans le hall. En me glissant le long des murs, j’atteignis la porte d’entrée de l’hôpital que la négligence du gardien avait laissée ouverte. Quelques- minutes affreuses encore, et je me trouvai au grand air. Je dégringolai le perron de marche en marche jusque sur le trottoir. Comme je restais en contemplation devant la taille prodigieuse des pavés, avant de traverser la chaussée, voilà qu’un ouragan déchaîné je ne sais d’où me soulève de terre, puis me précipite de tout mon long sur les dalles. J’eus à peine le temps d’apercevoir deux énormes roues, cerclées de caoutchouc, tournant avec une rapidité fulgurante, et je compris que j’avais été enveloppé dans le tourbillon d’air poussiéreux d’une automobile. Assurément, la rue n’était pas faite pour moi, si je tenais à ma faible étincelle de vie ; je m’engouffrai dans un petit restaurant.
La faim me tourmentait cruellement ; le parfum des mets fut délicieux à mes narines. L’endroit était pourtant fort sale. Un gros homme était attablé près de la porte ; il mangeait je ne sais quoi de mou avec une cuiller, les yeux à demi clos de contentement. Gravissant jusque sur sa table, j’atteignis le bord de son assiette et je me penchai pour avaler une parcelle de la bouillie dont il se gorgeait ; mais mon pied glissa et je plongeai la tête la première dans cette équivoque purée. A ce moment même, le dîneur affamé passait sa cuiller sous mon corps ; je me sentis emporté en l’air ; je ne savais pas encore ce qui m’arrivait, quand la large bouche du bonhomme s’ouvrit toute grande devant moi. Son haleine brûlante m’enveloppait, ses dents s’avançaient comme des crocs : j’allais pousser une clameur de détresse et d’agonie, lorsque…
– Dans quelques jours, disait le chirurgien à barbe blonde, il sera solide comme un écu de six livres. Excellente opération, et si facile ! Mettez-le au lit, et qu’il se tienne en repos. Le chloroforme lui laissera peut-être un mal de tête, mais pour le reste, il est remis à neuf.
Je vis le visage de ma femme incliné vers moi, tout brillant de joie.
– Oh ! Bob, s’écria-t-elle, avec un léger sanglot dans la voix, je suis si contente que ça soit fini !
– Et moi, donc ! Répondis-je dans un souffle.
Avant les débuts de la célèbre collection « à la tête de mort » au Fleuve noir, qui abritera en son sein toute une famille « d’Angoisseurs », la seule et unique collection Française faisant une très large place au fantastique « populaire » (et ce dans le sens le plus large du terme), il y eut quelques petites tentatives de collections spécialisées dans les œuvres « d’angoisses ».
C’est ainsi que les éditions Jacquier à Lyon, entamèrent une collection « La loupe » série épouvante qui de 1952 à 1953 publia cinq romans dont quatre attribués à un certain Frédéric Charles allias Frédéric Dard. Ouvrages comme vous pouvez vous en douter assez difficile à trouver de nos jours:
– « La maison de l’horreur » de F.Charles.1952
- « L’horrible Mr Smith » de F.Charles.1952
– « La momie du professeur Synistre » de Jan A.Rey. 1952.
– « N’ouvrez pas ce cercueil » de F.Charles.1953.
- « La main morte » de F.Charles. 1953.
Pierre Turpin dans un article paru dans « Le chercheur des publications d’autrefois » (N° 16, 4 éme trimestre 1976) émet l’hypothèse que le N° 3 « La momie du Pr Synistre » serait de la plume de Jean Ray. Les trois premiers romans de F.Charles seront réédités dans la collection « Super Poche » éditions Fleuve Noir en 1993, ouvrage qui rééditera un autre de ses roman « L’agence S.O.S » tout aussi introuvable.
Après cet essai qui fut relativement court, annonçant ainsi les prémisses d’une vague de collections consacrées à la littérature de l’épouvante, les éditions « E.D.I.C.A » » sortiront à leur tour une éphémère et brève série « Épouvante » puisqu’elle ne connu qu’un seul et unique exemplaire. Spécialisée dans la littérature « Légère » elle proposait à l’époque des volumes « gais et légers » sous le label « Série Audacieuse » ou de charmantes créatures n’hésitaient pas, sous de forts belles couvertures, à exposer leurs corps de rêve. Au total 8 ouvrages virent le jour dans cette collection de 1953 à 1954. Toujours de 1953 à 1954 elle proposa la collection « Bibliothèque Noire » avec 7 titres de parus et enfin la collection « Mauvais œil » avec 5 titres dont deux qui se passent de commentaires : « Massacre à l’anisette » et « Journal d’une chambre de femme »…tout un programme ! Pour terminer il faut rajouter à leur actif la publication de la célèbre et rarissime revue « Science-fiction Magazine » qui, bien que ne comprenant que quatre numéros, demeure très difficile à réunir.
- « La double vie de Milord Spencer » de DAN Rochester. Éditions E.D.I.C.A. collection, « Épouvante »
Après cette minimaliste collection , c’est au tour des éditions de L’arabesque avec sa collection « Frayeurs » de lancer le défi. Surtout célèbre pour avoir pour la première fois traduit un roman de A.Merrit dans une version massacrée, elle publia en outre un ensemble de bons auteurs dans le domaine du fantastique, auteurs que nous retrouverons par la suite dans de nombreuses collections populaires qui éditèrent entre autre des textes conjecturaux. A ma connaissance, les éditions de « L’arabesque » publièrent deux autres romans fantastiques de Maurice Limat: « Le masque de chair » collection « Parme » 1956 et « Mercédes prêtresse vaudou » collection « Charme et exotisme » 1956 Le premier et le second numéro de cette collection fut publié aux éditions du Simplon pour passer ensuite aux éditions de l’arabesque et l’on constatera avec plaisir que si les magnifiques couvertures furent réalisées par Aslan, « Le docteur Maudit » fut quand à lui illustré par le grand Michel Gourdon. Le deuxième de couverture était accompagné d’un résumé du roman et malgré une certaine qualité cette collection ne connue malheureusement que cinq volumes. A croire qu’une malédiction devait poursuivre cette louable entreprise, en disparaissant aussi vite qu’elles était venue.
- « Docteur maudit » de A.Merrit.1954
- « Jennifer filleule du diable » de R.M.Letendre. 1954.
- « La révolte des spectres » de Maurice Limat.1954.
- « La folie rouge » de Yves Derméze. 1954
- « Le carnaval des épouvantes » de Max André Dazergues.1955.
Au total, forte de ces quelques tentatives avortées, en passant par Paris et Lyon, notre genre loin de s’époumoner, tente un ultime baroud d’honneur et c’est au tour de Nice et des éditions de « La corne d’or » série « Épouvante » de se focaliser sur une collection spécialisée dans « L’angoisse ». Cette fois-ci avec un palmarès de 7 volumes (un record jusqu’à présent) cette collection est également d’un extrême rareté en raison de la fragilité de ses couvertures, dont les couleurs ont la fâcheuse manie de s’effacer et de se rayer avec le temps. Il est en effet pratiquement impossible de rencontrer un exemplaire en parfait état.
- « L’inhumaine création du professeur Lynk » de R.G.Méra.1954.
- « La lune de la hurle aux loups » de F.J.Certon.1954.
- « La mort aux vifs » de R.G.Méra.1954.
- « Le cycle épouvantable » de R.Egasel.1954.
- « Le monstre immortel » de J.D.Kerruish.1954.
- « Le château de l’horreur » de F.Blanchere.1955.
- « Chauffeurs des morts » de R.Egasel.1955.
Une nouvelle fois, l’échec est cuisant et la tentative sera très rapidement abandonnée (7 titres en un an). Suivront deux autres collections à la carrière tout aussi éphémère :
- Collection « Police », 7 titres. - Collection « Trafic » 14 titres.
Parallèlement aux trois collections citées plus haut paraîtront deux autres collections (entre 1952 et 1956) :
- « Le commissaire Renaudin ».
- Collection « Espionnage ». Avec un total de 52 volumes.
Pour en revenir à la collection épouvante, deux ouvrages de la collection forment un « cycle » : « Le cycle épouvantable » et « Chauffeur des morts » de R.Egasel. En effet on y trouve l’histoire d’un parachutiste qui se retrouve dans un village de lépreux à la frontière du Cambodge. Il sera victime d’une malédiction dont il ne sera délivré que lorsqu’il aura retrouvé la dépouille sacrée d’une divinité.
Suite et fin de cette lente agonie avec une toute dernière collection que l’on peut classer dans les ancêtres de la collection à tête de mort, la Collection « L’étrange » des éditions Robert Laffont qui totalise à son tour un record de quatre titres :
- « La belle de Montferrare » de J.Morvan. 1956.
- « La bête de l’apocalypse » de Raoul de Warren.
- « Le grand secret » de P.Toussaint.1956.
- « Cap au nord » de O.Nemi.1956.
Lorsqu’en 1954, paru le premier numéro de la collection « Angoisse » qui pouvait prévoir qu’un demi-siècle plus tard cette collection serait mythique et l’intégrale de ses 261 titres, une des collections (avec les « fusées ») la plus recherchée par les amateurs du Genre. Tous les volumes illustrés par le talentueux Michel Gourdon, encore lui, apportent encore plus de valeur à cette fabuleuse série. Créatures monstrueuses, magie, envoûtements, figurines et objets maléfiques, elles sera également le théâtre des redoutables exactions de la sublime Mme Atomos, du retour de la créature de Frankenstein, nous livrera les aventures les plus fameuses de mon détective préféré, Teddy Verano de Maurice Limat et de son pendant féminin Rosamond Lew de Dominique Arly, un sculpteur de chair humaine y fera également office, inspirant le thème d’un des plus beau film fantastique Français « Les yeux sans visage » du très regretté Georges Franju.….Toutes les thématiques ou presque de la littérature fantastique vont y passer, osant même s’aventurer sur les territoires parfois limites de l’anticipation. Une légende venait de naître et cette littérature à l’époque jugée comme « malsaine, inutile et grossière » fait aujourd’hui figure de référence et demeure sans contexte l’objet de recherche de nombreux amateurs du genres, nostalgiques et collectionneurs.
Populaire quand tu nous tiens !
Chapitre Cinq: Les Autres
La dernière catégorie est une véritable musée des atrocités, où insectes de toutes sortes vont se côtoyer «dans le respect de leurs différences»…..non pas vraiment ! Hélas, à l’inverse de la série « Babylon 5 », ceux-ci ne possèdent pas une once de complaisance, leur but essentiel sera donc de détruire cette race insignifiante : l’être humain !
Encore une fois, c’est le cinéma qui va s’approprier les plus belles réussites et l’on se souviendra, un léger frisson dans le dos, du film de Edward Ludwig « Black scorpion » (1957), dont les créatures furent animées par le célèbre Ray Harryhausen sans oublier « Beginning of the end » de Bert I.Gordon (1957) ou « The Deadly Mantis » de Nathan Juran (1957). Mais mon coup de cœur se porte plus volontiers sur le nostalgique et merveilleux « Matinee » ( Panic sur Florida Beach ») de Joe Dante (1993), un véritable film hommage, fait par un amoureux du cinéma où les monstres gigantesques étaient bricolés au fond d’un garage. Une grande réussite avec le génial John Goodman Scarabées, mantes religieuses, papillons et coccinelles, tout y passe sans distinction. Il faut dire que dans ce cas de figure les circonstances atténuantes ne manquent pas et elles ont pour noms : expériences de laboratoire, radiations, explosions nucléaires…..fallait pas les inviter
Toute médaille a son revers et si le scientifique aussi génial que dérangé « bricole » les membranes chitineuses sans aucune vergogne, il est normal qu’un jour ou l’autre le monstre de laboratoire se retourne contre son créateur nous rappelant en cela un classique bien connu. Faisant fi de toutes considérations, le chercheur va se livrer à de terribles expériences, le scientifique bravera tous les interdits mais à trop vouloir s’approcher du soleil, il finira par se brûler gravement les ailes et il faut se remettre en mémoire « Face à face avec les monstres » (Henri Darblin), « La Cité sous la terre » (Eric North) ou « Horde des monstres » (Charles Ronze) afin de se rendre à l’évidence : les insectes ne nous aiment pas.
Nous les écrasons sous nos pieds, ils se fracassent sur nos pare-brise, on les fait grossir et grandir pour mieux étudier ou pour les utiliser comme machines à tuer, et à trop vouloir les exterminer par soucis d’hygiène, ils finissent par se retourner contre nous. Un des exemples les plus spectaculaire reste à ma connaissance «Cafards» de Thomas M. Disch qui inspira sans contexte Romero lorsqu’il réalisa en 1982 «Creepshow». La nature reprend toujours ses droits.
Au final, qu’il soit de petite taille ou bien gigantesque, l’insecte n’a pas fini de se révolter contre nous, la bataille ne fait que commencer et les références en ce domaine loin de se terminer.
Bibliographie Séléctive
- « Les êtres géants du Dr Vouga » de Daniel Bersot. Feuilleton paru en 1911 dans un magazine Genevois pour enfants.
- « L’humanité enchaînée »de Paul Féval Fils et H. J. Magog. J. Ferenczi et Fils 1923. 4éme volume des « Mystères de demain »
- « Au centre de la terre » de Jean Duval. Éditions de la Nef, 1925.
- « La menace invisible » de Charles de Richter. Les éditions de France. Collection «A ne pas Lire la Nuit» 1937. Des termites à l’appétit plutôt vorace.
- « Face à face avec les monstres » de Henri Darblin. Feuilleton dans «Jeunesse magazine» du N° 20 (16 mai 1937) au N° 26 (27 juin 1937). Illustrations de Pellos. Une analyse de ce roman ce trouve ici.
- « La horde des monstres » de Charles Ronze. Collection «Sphynx» série policière N° 20.Ils sont grands et affamés. Sans date vers 1930. Une analyse de ce roman ce trouve ici.
- « L’étreinte de l’invisible » De Paul-Yves Sébillot. Éditions Baudiniére.1935. Nos amis les scorpions passent à l’attaque.
- « Le peuple des ténèbres » de Joseph O’neil. Éditions Gallimard .193. Une faune souterraine dont des mille pattes géants.
- « Camouflage » de Donald A. Wolheim (Mimic). Réédité par la revue «Antarès» N° 4. Pages 7 à 14. Parution originale en 1942. La nouvelle donnera lieu à un excellent film de Guillermo del Torro
- « Les robinsons souterrains » de Yves Derméze. Pré originale dans «Siroco» (4 septembre 1943 – 15 juin 1944) N° 34 à 60. Réédité par J. P Moumon dans la collection Bédéphilia» N° 12, 1997.
- « La ruée des monstres » de Daniel Girard. Dans le volume « Le mystère du Puy », Éditions Boivin et Cie 1945. Pages 157 a 201.
- « Le monstre des Black Mountains » N° 2 des aventures du Captain Chester Buston du « Spécial Squad ». » Anonyme probablement de Robert Dansler). Éditions et revues Françaises.1945.Fait exceptionnel il s’agira de vers de terre géants…. - « Les naturels du Bordelais » de Jacques Audiberti. Théâtre tome II. Gallimard N R. F. 1952. Les grillons sauvent le monde.
- « L’heure funèbre » de Patrick Svenn. Fleuve Noir «Angoisse» N° 2. 1954. Mante religieuse de taille humaine.
- « Les premiers jours de Mai » de Claude Veillot. Nouvelle parue dans «Fiction» n° 78. Mai 1960 pages 3 à 16. Invasion de sauterelles géantes.
- « La planète oubliée » de Murray Leinster (Forgotten Planet] 1954. Edition Ditis n° 189, 1960 et réédité par J’ai Lu en 1981 N° 1184. Un bien étrange planète où des insectes géants sèment la terreur. Un classique.
- « La scolopendre » de Jean Ray. Nouvelle parue dans le recueil « Les 25 meilleures histoires noires et fantastiques », éditions Marabout Géant 1961. Pages 271 à 277. Rééditions chez le même éditeur.
- « Scarabées » de Robert Bloch. Nouvelle parue dans le recueil « Histoires d’outre monde », éditions Casterman 1966. Pages 285 à 298.
- « Les cafards » de Thomas M. Dish Nouvelle parue dans le recueil « Territoire de l’inquiétude », éditions Casterman 1972. Pages 159 à 172.
- « Le monde vert » de Brian Aldiss. 1962. Texte paru dans «Fiction» et réédité chez J’ai Lu en 1974, n° 520.
- « La mante au fil des jours » de Christine Renard. Éditions Marabout, N° 621. 1977.
- « Le mystérieux Dr Fu-Manchu » de Sax Rohmer. Editions Alta Tome 1. 1978. Utilisation de scorpions créés scientifiquement.
- « Les chenilles » d’E.F. Benson. Nouvelle parue dans la recueil « La chambre dans la tour ». Librairie des Champs Elysées «Le Masque Fantastique» 1978, pages 156 à 169.
- « Le cocon » de John B. Goodwin. Nouvelle parue dans le recueil « Histoires anglo-saxonne de vampires » à la Librairie des Champs-Elysées en 1978. Pages 223
- « Le roi des sables » de George R. Martin. Nouvelle parue dans la série «Univers» (1981). Editions J’Ai Lu n° 1208.
- « Puces » roman de Théodore Roszak. Éditions Seghers «Les Fenêtres de la Nuit» 1982.
- « La nuit des insectes » de Th. Cryde. «Cycle des Insectes» N° I. Éditions Fleuve Noir «Anticipation» N° 1336. 1984.
- « Osmose » de Th. Cryde. «Cycle des Insectes» N° 2. Éditions Fleuve Noir «Anticipation» N° 1356. 1985.
- « Le bruit » (The Worm) de David. H. Keller . Première parution «Amazing Stories» en mars 1929. Réédition dans «Antarès» n° 23, 1986. Pages 82 à 94.
- « La mort qui rit » de N I. Stevens. Longue nouvelle parue dans la revue Belge «Anticipation» N° 12. Invasion d’insectes géants à l’état larvaire.
- « L’homme aux milles pattes » de Frank Belknap Long. Nouvelle parue dans « La présence monstrueuse ». Editions Encrage, collection «Pulps» N° 3. 1987 pages 149 à 178.
- « Quand on a le cafard » de John D. Mac Donald. Nouvelle parue dans « L’île cannibale », éditions Encrage, collection «Pulps» N° 4. 1987 pages 239 à 251.
- « Le jeu des grillons » de Gustave Meyrink. Nouvelle dans le recueil « Histoires fantastiques » aux éditions Le Rocher en 1987. Pages 153 à 166.
- « Le scarabée » roman fantastique de Richard Marsh. Nouvelles éditions Oswald collection «Néoplus» 1987. N° 11
- « Les cafards n’ont pas de roi » de Daniel Evan Weiss. Éditions Gallimard N.R.F. 1997.
- « Insectes nocturnes » de Engles et Barnes. Pocket Jeunesse, collection «Paranormal» J. 352. 1998.
Terminons enfin par une petite fantaisie qui devrait avoir sa place en tête de liste :
- « La Gileppe, Les Infortunes d’une Population d’Insectes » par le Docteur Candeze. «Magasin d’éducation et de récréation », 1er semestre, 1er volume de la 15eme année, 1879.
Voilà qui va clore provisoirement ce dossier consacré aux insectes et il reste une multitude d’ouvrages à découvrir et qui renferment, je n’en doute pas, d’autres curiosités qui attendent bien patiemment leur heure de gloire.
Chapitre Quatre : Les Extra-Terrestres
Phénomène indispensable dans la S. F., la créature venant d’une autre planète ne pouvait pas faire autrement que de revêtir le pyjama chitineux, histoire de nous montrer que la terre n’est pas la seule dans l’univers à compter des bizarreries de la nature. Fait exceptionnel en littérature conjecturale, ils seront pratiquement tous doués non seulement d’une intelligence souvent exceptionnelle mais représenteront bien souvent la seule et unique espèce intelligente de leur planète. Ailleurs, les insectes sont devenus par évolution ce que sont les hommes sur la terre actuellement. Il faudra faire avec ! Ils seront rarement une race de conquérants, se trouvant bien souvent sur notre planète pas le plus grand des hasards, sans autres intentions que de vivre en paix et ce, à l’inverse des autres catégories dont nous venons de parler. Finalement, la folie des hommes parvient à déteindre sur l’ensemble de son monde : la sagesse n’appartient pas au nôtre.
Il nous faudra cependant mettre un bémol à cette thématique pourtant si passionnante. En effet, dans l’état actuel des choses, ce genre reste une minorité en littérature conjecturale et quelques auteurs seulement comme Tancrède Vallerey avec « Un mois sous les mers », Cyril Berger « L’Adversaire inconnu »Claude Veillot ou « Les Premiers jours de mai » parviendront de façon ponctuelle t à tirer leur épingle du jeu, en nous proposant des textes, audacieux et passionnants.
Bibliographie Sélective
- « Les premiers hommes sur la lune » de Herbert George Wells. Éditions du Mercure de France 1911. Nombreuses autres rééditions. Sur la Lune, une race d’insectes vénère des larves géantes. Nos courageux explorateurs qui, grâce à la « cavorite » se retrouvent propulsés sur notre satellite vont vivre de trépidantes aventures et se trouver confrontés au « Grand lunaire » en personne. Un classique du genre.
- « L’adversaire inconnu » de Cyril Berger. Éditions Ferenczi 1922. Incroyable insecte recouvert de lamelles de chitine, il possède en outre deux ailes repliées sur son dos. Sorte de vampire de l’espace, suçant de malheureuses victimes pour sa survie, une fort belle réussite en matière de visiteurs venus de l’espace.
- « Un mois sous les mers » de Tancrède Vallery. Éditions F. Nathan 1939. Un fragment creux d’une autre planète tombe sur la Terre. Des « Fourmis » énormes en provenance de Mercure s’y affrontent avec une technologie basée sur la radioactivité.
- « Les demi-dieux » de A. Gordon-Bennett. Hachette «Le Rayon Fantastique» 1951.
- « Les troupeaux de la lune » de Léopold Massiéra .Éditions Ferenczi « Mon roman d’aventure » N° 295.1954. Des insectes extra-terrestres intelligents et minuscules
- « Ceux de demain » de F. Richard-Bessiére. Éditions Fleuve Noir «Anticipation» n° 139, 1959.
- « Les premiers jours de Mai » de Claude Veillot. Dans la revue « Fiction » N° 78 éditions Opta. Mai 1960
- « Druso » de Fiedrick Freksa. Éditions Hachette «Le Rayon Fantastique», 1960. Scarabées de taille humaine qui asservissent l’homme.
- « Ouvre moi ô la sœur ! » de Philip José Farmer. Nouvelle parue dans «Fiction» n: 93. Août 1961, pages 3 à 45.
- « La fin du Quaternaire » de Y. Hecht. Éditions Hachette «Le Rayon Fantastique» N° 90, 1962.
- « La vermine de l’espace » de Clifford D.Simak. Nouvelle parue dans «Fiction» N° 111. Février 1963, pages 60 à 94. Invasion de … coccinelles intelligentes.
- « Étoiles garde à vous ! » de Robert Heinlein. Éditions J’Ai Lu n° 562. 1974 pour la traduction Française.
- « Les puits de l’enfer »de Graham Masterton. Nouvelles éditions Oswald N° 141.1984.Une sorte d’insecte, rejeton des Grands Anciens.
Hélas un texte remarquable reste encore inédit à ce jour en France. Il s’agit d’un roman d’un auteur Français: Francis Didelot qui sortit en 1957 dans une revue Italienne «Urania» sous le titre « Tradutto dal Marziano »( Traduit du Martien).
«Termés est envoyé sur Terre pour préparer l’invasion de termites géantes venant de Mars. Quatre termites physiquement modelées à l’image des Terriens franchissent donc le vide interstellaire à la tête d’une avant-garde suffisante pour entamer la conquête et constituer un embryon de termitière. Termés est le plus réussi et c’est à lui qu’incombe la direction des opérations…»
Bientôt le tout dernier chapitre viendra clore ce dossier. Il regroupera les autres créatures, les inclassables les laissés pour compte, les indésirables , mais rassurez vous amateurs de sensations fortes, elles n’en sont pas moins viles et répugnantes.
Chapitre Trois: Les volants
Peu courants dans la littérature, légions sur la pellicule, les insectes ailés profiteront de cet avantage afin de frapper vite et fort cette pauvre humanité clouée au sol. Attaque en piqué, vol en rase motte, formation de groupe, le cinéma portera plus particulièrement son attention sur le phénomène de masse. Les mouches, abeilles autres conserveront toujours leurs tailles normales mais compenseront leurs petitesses par leur quantité toujours incroyable, voir à ce sujet « Quand les abeilles attaquent », de Bruce Geller, 1977, que les allergiques s’abstiennent ! En de rares exceptions, elles seront gigantesques comme dans « L’Ile mystérieuse », Cyril Endfield, 1960 ou « Monster from the green hell », Kenneth J.Cane, 1957.
Mais l’abeille possède à son niveau, un avantage supplémentaire la piqûre ! Profitant de cet avantage sur sa malheureuse victime, elle n’en sera que plus mortelle si le terrain visé est, qui plus est allergique à la seule vision d’un pot de miel. Côté romans, quelques ouvrages sont à retenir : « Désert des spectres » de David H. Keller, « Un bruit de guêpes » de Jean Paulhac, « Furies » de Keith Roberts (plus récent et tout aussi efficace). La mouche quant à elle sera, à l’image de l’araignée, un objet de répulsion venant perturber la tranquillité de nos siestes estivales et toujours utilisée dans des histoires purement fantastiques. Le septième art lui attribua ses lettres de noblesse avec l’extraordinaire « The Fly », La Mouche noire, 1958 de Kurt Neumann, inspiré d’une nouvelle de George Langelaan. Plusieurs suites s’inspirèrent de ce petit loyaux tel « Return of the Fly » d’Edward L. Bernds « La Mouche » en 1959 et plus récemment le très sympathique de David Cronenberg en 1986. Lorsqu’elle n’est pas le centre d’intérêts de savants distraits ou perturbés, (« Le monstre de la St Basile » de J.P.Benson) elle symbolisera le plus souvent la décrépitude, suceuse de corps en décomposition, le messager du Prince des Ténèbres. Rencontrée peu souvent dans des romans de S.F., elle occupera cependant une place primordiale sur nos étagères, grâce aux bons soins de Jacques Spitz qui avec « La Guerre des mouches » nous apporte la preuve que la mouche, lassée de perturber le regard vitreux des vaches, peut-être une menace encore plus terrible pour l’homme.
Bibliographie Sélective
- « La vallée du désespoir » de Gustave Le Rouge .Journal des voyages 4 éme série, du 15 Septembre 1927 au 5 Avril 1928. Une région inconnue du globe renferme une faune et une végétation incroyable dont des insectes géants, libellules etc…
- « Face à face avec les monstres » Roman de Henri Darblin. Deux éditions : - Dans la revue « Sciences et Voyages » sous le titre « La horde des monstres » du N°479 (1er Novembre 1928) au N°485 (13 Décembre 1928), - Dans la revue « Jeunesse-Magazine sous le titre « La horde des monstres » du N°20 (16 Mai 1937) au N°26 (27 Juin 1937).Réédité aux éditions Antares. Des rampants et des volant, répugnants et voraces, encore les méfaits d’un savant fou!Superbement illustré par le grand Pellos.
- « La guerre des mouches » de Jacques Spitz. Editions Gallimard «Les Romans fantastiques» 1938 Réédité chez Marabout Terrifiant et oppressant. Du grand art !
- « Le monstre de la St Basile » de J.P. Besson. Collection «Stick» (Roman Policier) Agence Parisienne de Distribution 1941.
- « La mouche » nouvelle de Marcel Béalu parue dans le recueil « Mémoires de l’ombre ». Éditions Gallimard 1944. pages 96 à 97.
- « Les robinsons souterrains » de Yves Derméze, dessins de Marijac. Parution dans la revue Siroco du N° 34 (4 Septembre 1943) au N°60 (15 Juin 1944)sous le nom de Alain Janvier puis Paul Mystère.Réédité en fac-similé dans la collection« Bédéphilia» N° 12. Éditions de l’Apex.1997. Tiré à 250 exemplaire. Monde souterrain, créatures étranges et insectes géants. - « La mouche » d‘Arthur Porges. Nouvelle parue dans «Fiction» n° 1, octobre 1953. Pages 29 à 33.
- « « La planète oubliée» »de Murray Leinster. Éditions J’ai lu N°1184. 1981 et 1954 pour l’édition originale.De gigantesque papillons carnivores, des hannetons tueurs, des fourmis semblables à des loups, un véritable cauchemar….
- « La plutonie » de Obroutchev. Éditions de Moscou.1954. Terre creuse et…guêpes et abeilles géantes qui vont avec..
- « Désert des spectres » (The Solitary Hunter) de David Henry Keller. Éditions Fleuve Noir, Collection «Angoisse» n° 5, 1955. Guêpes géantes.
- « Les papillons anthropophages »de Roger Dee Nouvelle parue dans «Galaxie» l ére série n° 21, août 1955. Pages 3 à 14.
- « Un bruit de guêpes » de Jean Paulhac. Éditions Denoël «Présence du futur» n° 19, 1957. Et en plus elles piquent.
- « Les frelons d’or » de Peter Randa. Éditions Fleuve Noir «Anticipation» n° 168, 1960.
- « Le mouche » de George Langelann. Dans le recueil « Nouvelles de l’anti-monde ». Éditions Marabout Géant G. 252. 1962 et rééditions chez le même éditeur. Pages 45 à 85. Célèbre nouvelle qui inspira le film La Mouche noire.
- « Le dernier moustique de l’été » de Gérard Klein, Première édition dans «Fiction» n° 106 de septembre 1962. Pages 60 à 63. Dans cette nouvelle l’homme ne serait-il pas lui même le dernier moustique de l’été face à une future ère glaciaire proche
- « Les mouches » d’Isaac Asimov. Nouvelle parue dans le recueil « Les vingt meilleurs récits de Science-fiction ». Editions Marabout. «M. Géant» G. 207. 1964. Pages 103 à 114.
- « Les mouches » de Anthony Vercoe. Nouvelle parue dans le recueil « Histoires de terreur ». Anthologie de la revue «Fiction» n° 138 Bis. 1965. Pages 61 à 68.
- « Les papillons de l’ombre jaune » de Henri Vernes. «Bob Morane» Série «l’Ombre Jaune». «Marabout Pocket» n° 87, 1968.
- « Papillons espions » de Charles L. Herness. Nouvelle parue dans «Fiction» n° 172, mars 1968. Pages 27 à 35.
- « La fiancée de Fu-Manchu » de Sax Rohmer. Éditions Alta, Tome 11, « Fu-Manchu ou le defi de l’Asie ». 1978. Mouches mutantes porteuses d’un redoutable poison.
- « Les furies » de Keith Roberts. 1971 pour l’édition Opta du «Club du Livre d’Anticipation» et 1979 pour l’édition du «Masque S.F.»
- « La ruche d’Hellstrom » de Franck Herbert. Editions J’Ai Lu n° 1139 1980.
- « Les cages de Belthem » de Gilles Thomas. Editions Fleuve Noir «Anticipation» n° 1191. Décembre 1982.
- « Le sacrifice du papillon » de Andréa H. Japp. Éditions du Masque. 1997.
- « Le papillon de la mort » de Maurice Renard. Nouvelle parue dans « Le carnaval du mystère », éditions Crès1929 pour l’édition originale. Réédition NEO 1985. Pages 29 à 32.
Chapitre Deux: L’araignée.
Une fois de plus ouvrons les hostilités en parlant de cinéma. L’araignée en effet n’a eu de cesse d’envahir nos écrans. De « Tarentula » (Jack Arnold 1956) où notre cher Clint Eastwood fit une de ses toutes premières apparitions ( le pilote chargé à la fin de bombardé le redoutable monstre) au fameux« Arachnophobie » ( Franck Marshall 1990) ses pattes velues et son corps repoussant se fait un malin plaisir à nous faire dresser les cheveux sur la tète. Le mécanisme en est très simple : réveiller en nous le dégoût et la terreur.
Symbole Freudien à caractère sexuel, celle-ci sera d’ailleurs utilisée dans des histoires plus fantastiques comme symbole de la Femme fatale. Redoutable prédateur se jouant de ses malheureuses victimes, sublime architecte aérien tissant avec une logique et un savoir faire unique le lieu de ses redoutables ripailles, sa taille importe peu, le nom seul suffit. La littérature en fera, à de nombreuses reprises, son héroïne mais principalement dans des histoires à forte tendances fantastiques. Quelques exceptions vont parsemer de ci de là notre thème de prédilection sans jamais pourtant atteindre le stade de chef-d’oeuvre. Citons pour exemple « L’Araignée de l’île » de Pierre Jouvet, bien que j’assimile de préférence cette histoire au genre épouvante. En effet un homme échoué sur une île doit survivre dans un milieu hostile, peuplé d’araignées carnivores, un excellent texte dans le genre. « La Révolte des monstres » de Norbert Sevestre, est également intéressant car il réchappe un peu à la thématique classique puisque dans le cas présent, elles seront le produit de dérives scientifiques, conçues de façon volontaire et ne seront pas le fait du hasard, ni le résultat d’une longue évolution ou d’une mutation.
En effet, bien souvent, ces arachnides, quelles soient gigantesques ou intelligentes, seront presque majoritairement l’aboutissement d’un long processus « naturel ». Le « savant fou » ou l’homme de science ne sera, que dans de rares exceptions, le responsable d’une telle dérive. Deux textes d’exception cependant : « L’empire des araignées » de H. G. Wells et le fameux « Péril bleu » de Maurice Renard. Mais le constat de cette rubrique reste une fois de plus mitigé car l’appartenance de la majorité des «petites perles» à cette branche parallèle de la littérature populaire, se trouve dans des limites assez floues et la zone crépusculaire entre science fiction et fantastique sera bien souvent assez difficile à déterminer.
Bibliographie sélective
- « L’araignée crabe », nouvelle de Erckmann-Chatrian. Nombreuses éditions dont dans «Les Chefs-d’Oeuvre de l’Épouvante», Anthologie Planète. Pages 177 à 185. Redoutable araignée mutante qui a pris ses quartiers près d’une source thermale. (Parution originale 1860, librairie Hachette « Bibliothèque des chemins de fer »).
- « Toujours plus petits » de Alphonse Bleunard. « La science illustrée » Du N° 287(27 Mai 1893) au N° 313(25 Novembre 1893). Suite à une expérience, des scientifiques rapetissement et forcément le moindre insecte devient un monstre et notamment des araignées.
- « Voyage dans la lune avant 1900 », textes et dessins de A. de Ville D’Avray. Librairie Furne, Jouvet et Cie, éditeurs. Cartonnage polychrome grand in-8° « à l’Italienne » de 52 pages. Un voyage vers la lune en ballon conduit nos intrépides explorateurs vers d’étranges découvertes dont des « araignées sélénites » monstrueuses. - « Le péril bleu » de Maurice Renard. Éditions Michaud 1911 pour la première édition et nombreuses éditions postérieures. Le doute se pose sur l’appartenance de ces créatures à l’espèce des araignées. Peu importe le roman est excellent : Imaginez que le monde où nous vivons n’est en fait que le fond d’un vaste océan et que l’espace qui nous entoure appartient à un univers peuplé de créatures qui échappent à notre entendement et notre compréhension. Imaginez ensuite qu’elles nous considèreraient comme de vulgaires animaux et de ce fait s’amuseraient à nous pêcher comme de simples poissons. Tel est l’argument de cet extraordinaire roman de Maurice Renard « Le péril bleu » où une race d’extra terrestres, les Sarvants, nous regardent comme des animaux sans importance, nous capturent, nous dissèquent nous étudient. Au départ tout commence comme un banal roman policier, les personnes disparaissent les unes après les autres, puis vient le tour des animaux, des objets, des édifices….A l’image de l’animal de laboratoire, l’homme est ainsi l’objet d’expériences incompréhensibles qui dépasse sa propre logique et qui remet tout naturellement en doute sa légitimité dans un monde qu’il croyait bien à lui. Un jour pourtant, les Sarvants découvrent que nous ressentons la peur, la douleur et que nous sommes peut-être un animal doué de raison. Un roman certes qui n’est pas exempt de certaines faiblesses mais qui souligne une fois de plus que l’auteur, à qui nous devons l’origine du si beau terme de « merveilleux scientifique », était soucieux de l’avancée technologique de son époque, mais aussi qu’il voulait nous mettre en garde des dérives de la science
- « Le guerrier de Mars » de Edgar Rice Burroughs. 1919 pour l’édition originale. Traduction Française, Lattés « éditions spéciales ».1971
- « L’empire des araignées » nouvelle de Herbert George Wells. Récit paru dans « Douze histoires et un rêve » au Mercure de France en 1921. Pages 55 à 74. Leur but: conquérir le monde.
- « Au cœur putride de la foret » de E.M.Laumann. Nouvelle dans la .revue « Je sais tout » du 15 Novembre 1921. N° 191. Rééditons « Contes de terreur », Recueil composé par Marc Madouraud, Éditions Recto/Verso collection « Idés… et autres » Tirage 60 exemplaires 1994. Araignées des forets Guyanaises dévoreuses d’hommes. - « L’abîme » de E. M. Laumann nnouvelle dans «L’Aventure» n° 24. 1er décembre 1924. Rééditons « Contes de terreur », Recueil composé par Marc Madouraud, Éditions Recto/Verso collection « Idés… et autres » Tirage 60 exemplaires 1994. Un explorateur, aux prises avec des araignées vampires.
- « Sous le ciel de carreau » de Henry-Jacques. Nouvelle parue dans le recueil du même titre à la librairie Delalain en 1925. Vision poétique d’un petit peuple menacé par des araignées monstrueuses.
- « L’araignée » de Hans Heinz Ewers. Nouvelle. Première parution Française dans «La revue de Paris» 1er novembre 1927 (tome 6) pages 137 à 158. Réédité par Marabout de nombreuses fois. La plus célèbre nouvelle fantastique mettant en scène l’araignée/femme fatale.
- « La révolte des monstres » de Norbert Sevestre . «Bibliothèque des Grandes Aventures», éditions Tallandier. «Grande Aventures et Voyages Excentriques» en 1928. Araignées géantes produites par expérience. Un jour elles sortent de leurs cages…
- « La princesse émeraude » de Félicien Champsaur. 2ditions Ferenczi.1928. Une autre araignée fatale.
- « La cuve aux monstres » de Charles Magué. Editions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures » 1er série N°332.1930. Passage obligé par une grotte et son cortége d’agréables petites bestioles rampantes.
- « L’araignée d’argent » de Maurice Limat. Ferenczi 1936. «Le Petit Roman d’Aventure» n° 40. - « L’araignée de l’île »de Pierre Jouvet. A Compte d’Auteur, Lyon 1942. Il existe au moins trois éditions de ce titre. Sur une île déserte un homme l’ace face avec une créature gigantesque.
- « Les catacombes infernales » de L. Van der Haeghe et Jean des Marchenelles. Collection «Notre Rêve» 1944.Encore une araignée gigantesque et affamée.
- « Le monstre bleu » de Thyde Monnier. Dans « Les œuvres libres » 2éme série.1945. Une piqûre de celle-ci pourra régler bien des problèmes.
- « L’impossible enquête » de Pierre Jouvet. A Lyon chez l’Auteur 1946, Il existe deux présentations différentes de ce roman. L’araignée géante, le retour (avec en prime toutes ses petites sœurs).
- « Expédition épouvante » de Benoit Becker. Fleuve Noir, Collection «Angoisse» n° 4. 1954. Réduction de taille d’humains donc augmentation de celles des araignées.
- « Araignées dans le plafond » de Claude Veillot. Nouvelle parue dans «Fiction» n° Spécial hors série Anthologie de la S.F. Française mai 1954. Pages 190 à 204.
- « L’araignée du Professeur Bjornsen » de Kurt Wargar dans la revue «Galaxie» 1ère série N° 6. Mai 1954 Pages 5 à 11.
- « L’homme qui rétrécit » de Richard Matheson. Éditions Denoël «Présence du Futur» N° 18, 1957. Réduction de taille du héros mais bataille mémorable avec une locataire de la cave
- « La mort vient des étoiles » de Richard-Bessiére. Éditions Fleuve Noir «Anticipation» n° 214. 1962. Bon d’accord ! Elles viennent des étoiles, mais agressives les bestioles…
- « La sortie de l’araignée » nouvelle de Jean Ray parue dans « Le carrousel des maléfices ». Éditions Marabout N° 197, 1964, Réédition « le masque fantastique » N° 10, 1978. Réédition Nouvelles éditions Oswald N° 150, 1985. Page 97 à 104.
- « L’araignée d’eau » de Marcel Béalu. Nombreuses éditions dont Nouvelle Office d’Éditions, 1964, dans le recueil du même titre. Pages 11 à 35.
- « Mme Atomos sème la terreur » de André Caroff. Editions Fleuve noir « Angoisse » N°115.1965. La redoutable asiatique ne pouvait s’empêcher de créer un dangereuse araignée géante.
- « La mygale » de Maurice Limat. Éditions Fleuve Noir. Collection «Angoisse» n° 123. 1965.Notre Teddy Verano national aux prises avec un redoutable adversaire à plusieurs pattes, un monstre hideux du nom de Lasiodora.
- « La toile d’araignée » de Maurice Vernon. Éditions Gai liera «Bibliothèque de l’Étrange». 1972. Nouvelle variation sur la femme fatale.
- « L’araignée noire » de Jérémias Gotthelf. Longue nouvelle parue dans le recueil « L’Allemagne fantastique ». Edition Marabout Géant. 1973. Pages 211 à 277
- « L’araignée » d‘Elisabeth Walter. Nouvelle parue dans le recueil « Histoires Anglo-saxonnes de vampires ». Librairie des Champs-Élysées. 1978. Pages 199 à 221.
- « Spider master » John Flanders dans le recueil « Les contes du Fulmar ». Nouvelles éditions Oswald N°171 1986. Pages 121 à 124.
- « L’aventurier de Mars » de Edgar Rice Burroughs. Éditions Antares.1986. Une araignée géante pas très amicale.
- « Le dieu monstrueux de Mamurth » de Edmond Hamilton. Dans le recueil éponyme. Nouvelles éditions Oswald N° 176.1986
- « Le monstre du Docteur Karlof »de Wallace Edger. Collection «Futura», sans date. Réédité en 1987, premier volume de la collection «Procyon». Encore une araignée vampire.
- « La maison de l’araignée » de Fritz Leiber. Nouvelle parue dans « Le piano satanique », éditions Encrage, collection «Pulps» n° 6. 1988. Pages 67 à 90.
- « L’amour venin » de Sophie Schallinger. Éditions du Rocher. 1989. Une petite fille utilise une «araignée de laboratoire» à des fins personnelles.
L’homme a toujours éprouvé le désir de voler et de conquérir les airs, mais si ce rêve d’Icare ne cessa de l’obséder jusqu’au point de le pousser à conquérir les étoiles, il reste avant tout un solide terrien attaché au contact humide de ses champs et de ses prés. C’est la littérature conjecturale qui sera le témoin de cette affinité avec l’élément minéral et ce n’est pas Guy Costes et Joseph Altairac qui nous diront le contraire, en regard de la monumentale encyclopédie des terres creuses.
Car loin d’être un oiseau, l’homme est avant tout une taupe, un fouisseur qui, faute d’avoir des ailes, va utiliser ses deux mains pour creuser une terre généreuse qui n’a de cesse d’attiser sa curiosité. Comme si la surface du sol n’était pas assez mystérieuse, il va se complaire à imaginer des civilisations souterraines, s’inventer des cités troglodytes, fantasmer sur des créatures cavernicoles. Pendant des siècles, il n’aura de cesse de creuser toujours plus profond, repousser les limites des mondes intra terrestres, imaginer des voies de communications qui, non contentes de passer sous les océans, permettraient de traverser le globe de part en part et qui sait, passer par le feu central et découvrir de nouvelles formes d’énergies ou de vies.
L’anticipation ancienne est riche de se « terreau fertile », si vous me pardonnez ce jeu de mot, et va ainsi développer des thématiques assez extraordinaires, dont la multiplicité ferait l’objet d’un article à part entière, mais d’autres érudits, comme je vous le disais précédemment avec les « terres creuses » ont relevés le défis avec brio. Des tunnels donc, puisque tel est l’objet du billet d’aujourd’hui, qui vont permettre de relier les hommes entre eux, rapprocher les continents, faciliter les échanges, mais surtout hélas, générer des conflits. L’être humain étant ce qu’il est et le savant fou en sera un parfait exemple, ce genre de réalisations ne seront pas sans conséquences.
Déjà en 1893, Vilgensofer dans son « La terre dans 100 000 ans », que vous retrouverez sur les pages de ce blog ( Éditions H.Simonis-Empis. 1893) Imagine un vaste système de communication entre les continents et creusé sous les pays et les océans. Projet insensé, souvent à des fins militaires, le Capitaine Danrit ( Driant pour les intimes, Éditions Flammarion 1895), dans son roman « L’invasion noire » fait creuser un tunnel de 14 Kms entre l’Espagne et l’Afrique du Nord, ceci afin de permettre un envoi rapide et massif de troupes Africaines envahir l’Europe. Emilio Salgari aura les mêmes visées récalcitrantes dans son roman « Le canal souterrain du capitaine génois » (Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures » N°303, 1930) puisque pour envahir Venise, un Génois fera creuser un tunnel sous l’Italie entre la mer Tyrrhénienne et l’Adriatique. Mais certains de ces ouvrages auront des objectifs plus pacifistes ainsi Bernhard Kellermann dans son roman « Le tunnel » ( Éditons Flammarion, 1922 et 1934) creusera pour la bonne cause, un gigantesque boyau entre l’Europe et les États-Unis. Luigi Motta quand à lui dans son ouvrage « Le tunnel sous-marin » tome 1 (Éditions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures »N°138,1926) suivi de « La vengeance de Mac Roller » tome 2 (éditions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures » N° 139 ,1927 préférera pour relier les deux continents utiliser la technique de l’immersion des tuyaux dans l’atlantique, un système comparable à certains métro qui passent sous des fleuves. Le roman sera réédité en un seul volume toujours chez Tallandier, collection « Les meilleurs romans d’aventures » 1937. Le colonel Royet dans son « Le tunnel de Gibraltar » (Éditons Tallandier collection « Grandes aventures et voyages excentriques » N° 494,1933) traversera quand à lui le détroit de Gibraltar à l’intérieur d’une locomotive électrique empruntant un passage creusé à cet effet. Émile Chambe sera encore plus imaginatif puisque dans son roman « Droit au pôle Sud » (« Journal des voyages »Novembre 1900 à Juillet 1901) creusera une galerie au moyen de « L’hélix » entre une île inconnu, L’île Colombus à l’antarctique, sur les terres de l’imaginaire, tout est possible. Mais tout ceci n’est rien face aux lubies d’un excentrique milliardaire qui, pour raisons de mal de mer, fait creuser un tunnel entre l’Italie et la Corse et Léon Groc pour qui l’aventure est une affaire d’honneur, nous en fera un intéressant résumé dans son roman « La cité des ténèbres » (Editions Tallandier « Bibliothèque des grandes aventures N° 119, 1926) fraîchement réédité dans la prestigieuse collection « Les moutons électriques ». Jean de la Hire, notre conjecturopathe national apportera également son trou à l’édifice avec son roman « Kaïtar » où cette fois une tout autre percée sera réalisée entre la mer Caspienne et le lac Baïkal. Dans le roman de Alan Darmor « Le bolide stratosphérique » également analysé dans les pages de ce blog, nos héros sur la planète Mars utilisent un système de communication souterrain, mais ne nous égarons pas.
Mais le projet le plus ambitieux ou pour une fois réalité et fiction se confondent de la manière la plus intime, est sans nul doute le fantastique projet du tunnel sous la manche. Un rêve concrétisé il y a quelques années, symbole d’une technologie triomphante, qui paraissait pourtant irréalisable il y a quelques années.
Les premiers ébauches de cette colossale entreprise virent le jour sous le crayon de l’ingénieur Nicolas Desmarets datent en 1751, mais c’est en 1801 que le projet prendra forme avec Albert Mathieu-Favier qui proposa de construire un tunnel composé de deux galeries superposées. La Première galerie, pavée et éclairée, devait servir aux malles-poste tandis que la seconde servait à l’écoulement des eaux d’infiltration. A mi-parcours, une île artificielle aurait permis une halte aux voyageurs. Déjà le projet ne manquait pas d’ambitions et revêtait même un aspect « conjectural » En 1803, un anglais proposa d’immerger un tube métallique dans un fossé creusé au fond du détroit, mais son projet se heurtait à de nombreux problèmes techniques, notamment la pression à cette profondeur. Il faudra par la suite attendre 1833, pour que l’ingénieur français Aimé Thomé de Gamond étudie le fond marin et les différentes possibilités de liaison. De cette analyse en sortira une proposition sérieuse en soumettant un projet de tunnel ferroviaire foré qui fut accepté en 1867 par Napoléon III et la reine Victoria. Mais la guerre de 1870 mit fin à ce projet.
Après de nombreuses tentatives avortées , l’idée de creuser le Tunnel sous la Manche a été relancée en 1984. En 1984, les gouvernements français et britannique lancent une demande conjointe pour des propositions de tunnels financés par le secteur privé. Le 20 janvier 1986, François Mitterrand et Margaret Thatcher, réunis à Lille, annoncent le choix du projet de Tunnel sous la Manche. Le 29 juillet 1987, François Mitterrand et Margaret Thatcher donnent le coup d’envoi de la construction du Tunnel. L’inauguration officielle du tunnel par la reine Elizabeth II et le président François Mitterrand a lieu le 6 mai 1994. Finalement, une fois de plus, ce sont les écrivains qui depuis le début vont mettre à mal les différentes hypothèses, en creusant des tunnels imaginaires qui, si techniquement sont assez peu détaillés, n’en demeurent pas moins une preuve supplémentaire de ce désir de rattacher l’Angleterre à notre vieux continent. Un désir de notre part de vouloir à tout prix se rendre dans la « perfide Albion » les pieds au sec mais une certaine réticence de la part de nos voisin voulant de toute force garder leur statut d’insulaire. Diantre ! La royal navy pour le coup risquait d’en prendre un coup et l’on ne met pas aussi facilement au placard une institution qui au fil des siècles fit la renommée d’un des pays les plus colonisateur au monde. Puisque les projets subissent un certain ralentissement, il est donc nécessaire de faire valoir notre désir de rapprochement, au moyen de la littérature. Mais même sous cet angle, la partie n’était pas gagnée et si de l’autre coté du « Channel » les œuvres y sont plus abondantes, elles ne sont pas pour autant très optimiste. Il faut dire qu’en matière de guerres futures et d’invasion il y a de redoutables précédents et ce n’est pas la parution du roman de Chesney « La bataille de Dorking » ( Éditions Henri Plon, 1871) qui va calmer les esprits, bien au contraire. Il vous sera possible de la constater dans la reproduction du premier article reproduit plus bas. On y constate à quel point ce texte eut un impact sur l’inconscient des gens et qu’il traumatisa les auteurs au point d’en faire une source de cauchemar dans l’excellent roman de Louis Denay et Eugène Tassin « La revanche fantastique » ( Éditions E.Dentu 1873).
D’après Versins dans son incontournable « Encyclopédie » il semblerait que soit une auteur Danois, Hans Christian Andersen qui ait ouvert les hostilités dans un roman inventif et novateur faisant la part belle aux spéculations en tout genre. « Dans des milliers d’années » nous rapporte en effet que des voyageurs Américains de passage en Angleterre, décident de gagner la France par l’intermédiaire d’un tunnel sous la manche. Suivront ensuite, toujours d’après les sources de Versins, toute une série de roman Anglais qui dénoncèrent d’une certaine façon les dangers d’une telle entreprise : « La bataille de Boulogne » de Brinslay Richard, où 3000 soldats Français déguisés en volontaire Britanniques vont passer le « tunnel » et envahir ainsi le pays, en 1882 « How John Bull lost London of the capture of the channel tunnel », d’un certain Grip où cette fois les envahisseurs seront déguisés en touristes…les perfides Français ! « The surprise of the channel tunnel » de C.Forth en 1883, toujours un coup bas des Français, « The capture of London » de J.Peddie en 1887, toujours une histoire d’invasion et pour terminer ce petit tour d’horizon en 1901 de Max Pemberton « Pro Paria » ou il sera cette fois question d’un traître Anglais qui va aider les Français à construire un tunnel afin d’envahir son propre pays. Auteur qui sauf avis contraire est le seul dans la liste ci-dessus, à avoir été traduit en France dans le domaine qui nous intéresse avec deux roman « Le pirate de fer » (Éditions Tallandier « Voyages lointains aventures étranges » N°19, 1930) et « La maison sous la mer » (Éditions Tallandier « Voyages lointains aventures étranges » N°65, 1930).
Il semblerait que la France n’ait pas trouvé un écho favorable dans cette audacieuse entreprise et les auteurs de ce fait bouderont cette thématique audacieuse qui ne trouvera finalement son équivalent que dans la concrétisation de ce gigantesque projet. Il est en effet difficile de trouver des textes d’imagination scientifique Français s’intéressant au projet du tunnel sous la manche, ou ne sera abordé que de manière très anecdotique dans quelques œuvres obscures dont il nous faudra retrouver les traces.
Pourtant comme en témoigne les deux articles que vous allez lire plus loin, l’idée fut souvent d’actualité et les articles réalisés autour ne manquent pas. Dans le domaine de la conjecture citons l’article « Le tunnel sous la manche en trois ans » superbement illustré par Heat Robinson (« Lecture pour tous » de Juin 1919), un article de G. Pawlowski « Anticipations : le tunnel sous la manche de Douvres à Calais » (« Je sais tout » Novembre 1916 N°132) et les deux documents reproduits ci-dessous. Ils font état à l’époque de l’avancée du projet tout en soumettant les différentes possibilités permettant enfin de réunir deux pays séparés par un simple bras de mer mais que tout semblait vouloir séparer.
Premier article relevé dans la revue « Journal des voyages » du Dimanche 22 Décembre 1912.N°838
« Le tunnel sous la manche, les autobus Douvres-Calais »
La vieille question du « tunnel sous la manche » revient à l’ordre du jour, et, cette fois, avec de grandes chances de succès. Un ingénieur Anglais très connu, M.W.Rose Smith, soutenu par des hommes politique de grande influence, rouvre la campagne en proposant la construction d’un tunnel qui permettre à des trains électriques de se rendre de Paris à Londres en trois heures et demi. Sa proposition sera soumise au parlement de Westminster au cours de la prochaine session. Dans une brochure qu’il vient de lancer, l’auteur montre que l’état actuel des transports entre les deux pays est indigne des deux peuples civilisés. La solidité de l’entente cordiale vient de se manifester d’une façon éclatante par la décision du gouvernement Français de concentrer ses flottes dans la méditerranée. Les apôtres du projet font valoir qu’il est de l’intérêt de l’empire Britannique que l’armée Française puisse se porter rapidement à l’assistance des forces Françaises, en cas de guerre continentale. Grâce au tunnel, elle pourra se concentrer sur notre rivage en quelques jours, ce qu’elle ne pourrait faire qu’en plusieurs semaines par voie de mer. Ils montrent encore que le ravitaillement des îles Britanniques, en temps de guerre, s’effectuerait plus aisément. Quand aux avantages à tirer du tunnel en temps de paix, ils seraient considérables, pour les deux pays directement intéressés, comme pour d’autres nations voisines ; le prix de transport des passagers et des marchandises seraient réduits dans des proportions sensibles. Incontestablement, l’opinion publique anglaise a cessé d’être aveuglément hostile à l’idée d’un tunnel sous la manche, idée plus que jamais populaire en France ; et il se pourrait que la chambre des communes prît à son tour le nouveau projet en sérieuse considération.
Voici un autre article également intéressant et qui paru dan la revue « Je sais tout » N°5 du 15 Juin 1905 , qui nous propose différentes solutions pour se rendre les pieds au sec et sans le mal de mer sur le sol Anglais pourtant si proche de nous.
« De Paris à Londres en chemin de fer »
Si les trains pouvaient se rendre directement de Paris à Londres, les multiples conséquences de cette « correction de la nature » seraient véritablement incalculables. Cette gigantesque entreprise, la merveille la plus grande du monde moderne, est-elle possible ? Oui, répondent des voix de plus en plus nombreuses d’un coté et de l’autre du détroit. Nous exposons ici cette question, qui à fait ces dernières années un pas décisif, avec des détails inédits sur les derniers projets présentés.
Un abbé d’autrefois a dit que le melon est une preuve de l’existence de dieu. Ce savoureux cucurbitacé est, en effet, naturellement découpé en tranches, ce qui indique bien qu’il a été créé tout exprès pour être mangé en famille. Un raisonnement du m^me genre conduit à estimer que le mal de mer a été inventé pour mettre les hommes en garde contre les voyages maritimes, et les avertir qu’il vaut mieux circuler sur un terrain solide que sur un terrain mouvant. Il faut bien avouer que nombreux sont nos contemporains pour qui cet avis physiologique n’est pas lettre morte. On raconte que la femme d’un professeur, nommé en Algérie, ayant une fois la traversée de la Méditerranée , refusa de prendre le bateau pour retourner en France, préférant courir le risques et affronter les fatigues d’un immense voyage en caravane par la tripolitaine, l’Egypte et les cotes Turques. L’anecdote est sans doute inventée de A à Z, mis elle plait à l’imagination des innombrables victimes du roulis, auxquelles on fera difficilement comprendre que la grandeur et la portée d’une œuvre telle que celle qui reliera l’Angleterre à la France par un chemin de fer direct, ne consistera pas principalement dans la suppression du mal de mer.
Cependant les deux pays ainsi raccordés peuvent prévoir d’autres avantages, peut-être moins pittoresques, mais d’une autre importance par l’accroissement du bien être général et l’avancement du progrès. L’intérêt des deux nations est en balance, et l’idée mérite d’être populaire pour des raisons plus sérieuses que la disparition du « mauvais hoquet » sur une courte traversée.
Il y a quatre façons différentes d’aller en wagon de France en Angleterre : Le passage mixte, le tunnel, le tube sous-marin, le pont.
Le projet d’établir un passage sec entre la France et l’Angleterre est déjà fort ancien. Il y a plus de cinquante ans qu’on en parle sérieusement. Quatre solutions de la question ont été présentées jusqu’ici : le tunnel sous la manche, le pont sur la manche, le tube sous-marin, enfin le « passage mixte ».
Le tunnel sous la Manche est facilement réalisable. La craie de Rouen, qui forme le fond de la mer, des falaises françaises aux falaises anglaises, est le meilleur terrain qu’on puisse rêver pour les perforatrices. Les machines ne s’émousseraient pas contre des roches presque impénétrables. La dynamite y creuserait son œuvre d’une façon sûre. Il n’y aurait point à craindre les accidents effrayants qui marquèrent le percement du Saint-Go- thard, où, parfois, les ouvriers furent réduits en miettes, pour n’avoir pu calculer les effets des explosifs, et où la moitié de certains enterrements consista à laver les parois à grands jets de lances d’arrosage.
Le tunnel sous la Manche ne soulève plus d’objections techniques, mais il a provoqué un argument d’ordre moral tout à fait curieux, qui a fait renoncer à ce projet.
Il y a déjà trente ans que le Parlement français, a voté la construction du tunnel sous la Manche, d’après les plans de Thomé de Gamond et de ses successeurs. En 1874, on crut un moment que l’œuvre allait être exécutée quand parut, en Angleterre, un pamphlet, « la bataille de Dorking », qui alarma vivement nos voisins d’outre-Manche. L’auteur expliquait que le tunnel mettrait le pays à la merci d’une invasion française. C’était l’opinion des chefs de l’armée anglaise, et, en particulier, celle de lord Wolseley. Le gouvernement de la Grande-Bretagne dut s’opposer à la construction du tunnel.
En y appliquant la meilleure volonté, les Français n’arrivent pas à comprendre cette crainte, peut-être tout d’abord parce que nul d’entre eux ne songe à conquérir l’Angleterre. Mais même en supposant qu’un jour ces sentiments pacifiques se modifient, il semble que rien n’est plus facile que de défendre une galerie de cette espèce. On met le feu à une mine et l’issue est bouchée.
Cependant lorsqu’on étudie l’histoire de l’Angleterre, on finit par saisir de quelle nature est l’opposition de nos voisins d’outre- Manche. Toute leur activité universelle, toute leur vie nationale, a grandi du fait que la Grande-Bretagne est une île et que, n’ayant point de frontières à défendre, elle a laissé à sa seule flotte le soin d’assurer son intégrité économique et territoriale. Le tunnel échapperait au contrôle des cuirassés et des torpilleurs.
Il a donc fallu renoncer au tunnel. C’est alors qu’on a songé à construire un pont gigantesque, d’un rivage à l’autre. L’argument militaire tombait ainsi. En un clin d’œil, la flotte pourrait démolir le passage. Mais alors s’éleva une clameur universelle. Le souterrain ne regardait que la France et l’Angleterre. Le pont lésait les droits d’une foule de nations. La mer, au large, appartient à tout le monde. Elle n’est ni anglaise, ni française. La Belgique, la Hollande, l’Allemagne, le Danemark, la Russie, pour qui la Manche est une route nécessaire, demandaient à être consultées. La construction du pont exige une conférence de diplomates du monde entier. Seul un optimiste un peu fou peut s’imaginer qu’on obtiendra l’accord de nations concurrentes qui voient avec déplaisir tout ce qui peut faciliter le commerce de la France et de l’Angleterre S’il y a une unanimité certaine, c’est celle des opposants qui déclareront à grands cris que le pont créera de grands obstacles à la navigation.
Ne pouvant ainsi ni passer sous l’eau, ni passer sur l’eau, les inventeurs découvrirent le moyen de passer dans l’eau.
Pourquoi ne pas poser tout tranquillement, au fond de l’océan, à côté du câble télégraphique, un énorme tube dans lequel glisseraient les trains? Il y a bien assez longtemps que les hommes font voyager l’eau à travers les tuyaux, c’est bien à leur tour de voyager dans des tuyaux à travers l’eau. On filerait ainsi de France en Angleterre, à quelques centimètres des soles errantes, effrayées par le vacarme longuement propagé sous les ondes! Oui, mais en quelle matière serait fabriqué ce tube? Les métaux s’altèrent et se déforment au contact chimique et à la pression physique des eaux. Un revêtement de ciment ne suffirait pas à protéger le tube métallique. Le contenu flexible d’un contenant inflexible provoquerait sûrement des fissures et des ruptures.Il faudrait la plume d’Edgar Poë pour déduire l’effroyable noyade en masse qui en résulterait.
L’effroyable danger d’un tube sous-marin : des catastrophes inouïes qui pourraient se produire.
En plus, il y aurait à craindre un fait-divers inouï, une de ces catastrophes énormes et prodigieuses que le hasard paye en tragique publicité au progrès et au génie créateur de l’homme. Il pourra arriver qu’un grand bateau, — il suffirait même d’un navire de 4.000tonnes — sombre juste au-dessus du tube. Qu’on se figure cette rencontre avec toutes les complications étranges de ces accidents qui confondent l’esprit, par exemple, un train passant à la seconde précise où le navire s’écrase au fond de la mer, la locomotive arrêtée dans sa course par l’aplatissement du conduit, par l’afflux de l’eau, par une barrière subite de bois et de fer éventrant le tube, peut-être le combustible de la cale percée venant se déverser sur celui du tender, peut-être une hélice tournoyant encore dans un wagon-salon et décapitant les voyageurs! Est-ce qu’on sait? La réalité de ces sortes de sinistres dépasse souvent tout ce que peut imaginer de plus saugrenu l’imagination la plus détraquée.
Le tube étant impossible pour des raisons pratiques; le pont pour des raisons diplomatiques; le tunnel pour des raisons tactiques, il a fallu en venir à la seule possibilité qui restait, le « passage mixte ». Elle répond à toutes les objections. « Vous ne voulez pas d’un tunnel, parce qu’il ne se voit pas, dit-on aux amiraux anglais, on va vous donner un pont qui se verra! » « Vous ne voulez pas d’un pont qui se verra, dit-on aux diplomates étrangers, on va vous donner un tunnel,.qui ne se verra pas. » Si on désignait les œuvres, de l’ingénieur, comme on intitulait jadis les romans, on appellerait le nouveau projet « le Passage mixte,ou « la Part du Feu ». Grâce à lui on contente tout le monde, et l’Angleterre.
Chaque nation, en vertu des usages internationaux, est propriétaire, le long de ses côtes, d’une large bande de mer. On imagine, par une fiction universellement admise aujourd’hui, que le territoire se prolonge sur l’eau de trois milles anglais; c’est ce qu’on appelle la mer territoriale. Chaque pays y fait sa police à sa façon, sans avoir à donner d’explications à personne, et peut y construire librement. En conséquence, le « passage mixte » commence sur les côtes anglaises par un pont viaduc d’un mille de long. Après quoi, il plonge brusquement dans la mer pour se transformer en tunnel, sous les eaux internationales. A un mille des côtes françaises, le train émergera de nouveau de la mer pour rejoindre la voie ferrée de la Compagnie du Nord.
La construction d’un pont dans la mer peut sembler une œuvre formidable, et elle l’est, en effet, si on se trouve en présence de très grandes profondeurs. Mais à profondeurs égales, il n’est guère plus difficile de bâtir des arches dans un océan que dans un fleuve. Avec les grands caissons à air comprimé, les ouvriers, habitués à ce travail étrange, peuvent bâtir sur le sol sous-marin jusqu’à 35 mètres au-dessous du niveau des flots. C’est néanmoins là la limite extrême, et les travailleurs de la mer ne respirent pas très à l’aise au-dessous de 28 mètres. Pour la construction du passage mixte, on n’aura pas l’occasion, aux piles du pont, d’atteindre plus de 15 mètres au-dessous du niveau de la basse mer et 23m75 au-dessous du niveau des hautes eaux. Les fondations les plus profondes seront à 26 mètres au-dessous de la haute mer. On n’atteindra donc pas le maximum de pression que l’ouvrier peut supporter sous le piston pneumatique.
Comment le train pourra-t-il passer du pont sur le tunnel ? Gigantesques ascenseurs ou plans inclinés.
Le point délicat de l’œuvre sera la plongée dans la mer. Le train devra passer d’une hauteur de pont de près de 23 mètres au-dessus des flots, à une profondeur de souterrain de 23 mètres également au-dessous du fond marin. Le saut du train, pour passer du niveau supérieur au niveau inférieur, sera, de rail à rail de plus de 71 mètres dont, aux fortes marées, près de 24 mètres à travers l’eau.
Comment s’opérera ce plongeon, de façon a ne pas réveiller les dormeurs des wagons-lits? Deux moyens sont proposés. Un ascenseur ou un plan incliné.
Il s’agit de bâtir en pleine mer une île capable de supporter la formidable machine qui servira à monter et à descendre rapidement du 500 tonnes. On se rend compte de l’importance gigantesque de l’appareil nécessaire, de l’ampleur du piston chargé de soulever la masse, de la difficulté de suspendre en équilibre un poids aussi long, aussi mal réparti que celui d’un train, et cela, au beau milieu de la Manche, en plein centre des tempêtes. La conception de cet ascenseur unique n’est cependant pas irréalisable. Tous les termes du problème ont été étudiés et la solution est prête.
Néanmoins la plongée par le plan incliné paraît plus simple et moins coûteuse. Sur ou mieux dans un socle de maçonnerie, partant du souterrain pour aboutir jusqu’à la hauteur du pont, on construira deux tunnels à deux voies chacun, grâce à un procédé de construction sous-marine relativement simple.
Avec plongée des deux côtés par plans inclinés, il reviendra à 250 millions; c’est ce que Paris mange de viande de boucherie en six mois.Si la plongée se fait du coté anglais par ascenseur et du côté français par plan incliné, le travail montera à 287 millions. Avec des ascenseurs des deux côtés la dépense sera de 322 millions. Par la solution avec les plans inclinés on pourrait encore obtenir une économie importante en faisant en France, la montée sur terre, puisque nous n’opposons aucune objection d’ordre militaire.
Ainsi, par « cette correction de la nature » pourra être accompli le « Passage mixte », et les hommes seront de nouveau capables d’aller à pied sec de France en Angleterre, ce qu’ils ont déjà fait, sans doute, il y a quelques milliers d’années, avant la déchirure du globe, qui détacha la Grande-Bretagne de l’Europe continentale et influa d’une façon si capitale sur la marche de la civilisation dans le monde.
Pour nous qui vouons au papier un amour incommensurable, que se passerait-il si le papier disparaissait ou pire, si une étrange maladie s’attaquait d’un façon impitoyable à nos précieux volumes ? Cette thématique cauchemardesque fut au moins abordée dans deux ouvrages d’anticipation, ce qui est peu en regard des autres textes traitant de la fin du monde ou tout du moins de la fin de la civilisation. Car imaginez un peu le monde civilisé privé d’un tel support.
Le premier, à ma connaissance, à avoir utilisé cette bien triste hypothèse est Georges Blond dans « Les naufragés de Paris » éditions « Le livre contemporain » 1959. L’auteur nous met en garde : Il ne s’agit nullement d’un roman d’anticipation ! Comme pour vouloir se faire le témoin d’une catastrophe qui est bien arrivée, acteur impuissant d’un drame épouvantable dont est frappé l’humanité.
« A partir d’un fait d’abord presque imperceptible, les conséquences s’enchaînent irrésistiblement. Un grain de sable dans la trop complexe mécanique de notre civilisation et, progressivement, tout s’arrête. Plus de journaux ni de livres ; les transports sont paralysés, le ravitaillement devient impossible, la lumière s’éteint. La ville prend son visage des grands désastres, on revoit les exodes historiques, le sauve-qui-peut des égoïsmes…. »
Un roman traité avec une certaine froideur, un ton proche du documentaire, dans la plus pure tradition du roman catastrophe.
Dans le second texte, le narrateur de l’histoire se réveille un matin avec une étrange odeur qui semble flotter dans l’air, un incendie ? Alors incrédule il constante que sa pièce est recouverte par une fine poussière…Tous ses livres viennent de disparaître ! Il ne reste que les reliures, comme si les livres avaient été mangés de l’intérieur. A l’extérieur en contre partie, c’est la panique, les gens s’aperçoivent progressivement de l’étrange phénomène et très rapidement ce nouveau « mal » contamine la terre entière, il ne reste plus un seul bout de papier sur le globe. Une telle situation donne lieu à des scènes assez burlesques mais la tragédie prend rapidement le dessus et l’on ne compte plus le nombre de suicides de gens ruinés ou de bibliophiles dont les précieux ouvrages ne sont plus que cendres. Est-ce une maladie, un virus, un redoutable insecte dévoreur de pulpe de bois ? Le mystère reste entier et le milieu scientifique commence à plancher sur une possible parade.
Alors que l’économie mondiale basée sur l’argent papier commence à battre de l’aile, les solutions commencent à prendre tournure. On se dépêche de prendre en photos tout ce qui est encore « récupérable », la pellicule et le micro film, sont les moyens les plus fiables de l’instant. La radio, connaît un regain d’intérêt, pénurie oblige et face à une telle débandade, une solution s’impose, la création d’un papier qui sera cette fois protégé de ces attaques assassines. Jamais auparavant cette noble et fine pellicule de cellulose, n’avait ainsi suscitée un tel engouement et elle tente ainsi de trouver progressivement la place qu’on lui avait jadis toujours refusée.Un roman beaucoup plus léger que le précédent, faisant preuve d’une bonne dose d’humour lorsque l’on sait que cette plaquette fut demandée pour un…fabricant de papier.
Toutefois il vous faudra beaucoup de chance ou quelques espèces sonnantes et trébuchantes pour trouver cette « pièce » bibliophilique tirée à très peu d’exemplaires Peut-être verrons nous un jour le même style d’ouvrage, commandité par un gros fabricant de « E-book », avec cette fois-ci une fin moins heureuse, mais là il ne s’agira probablement pas d’un roman d’anticipation.En tout cas une thématique passionnante qui devrait à mon avis donner des sueurs froides aux maniaques de l’accumulation de livres que nous sommes.
Après « La fin de l’or » (P.Hamp, éditions Flammarion 1933), « La mort du fer » ( S.S.Held , éditions Fayard 1931) « La disparition du rouge » (François Pafiou, Nos loisirs N°11 15 Mars 1908)…, nous voici confronté à un nouveau fléau qui, dieu me garde, ne restera qu’à l’ébauche dans les cervelles enfiévrées de nos écrivains de l’imaginaire.
- « Les naufragés de Paris » de Georges Blond. Le livre contemporain .1959. Cartonné avec jaquette. Réédité au format de poche, éditons Presse Pocket N°826. 1971.
- « La maladie du papier » de Eero Tolvanen. Imprimé par A.Deurve et Cie, pour le compte des papeteries Ruysscher. Cartonné, 32 pages, illustrations originales de Sempé, tirage limité à 500 exemplaires.1964.